559. C’est le nombre de pages qui suffisent à mettre une claque.
20 000 lieues sous les mers, un titre au nom évocateur. Un classique mais pourquoi l’est-il ? C’est pour cela que je me suis lancé dans cette aventure. Par où commencer ? Tout d’abord cette critique sera la critique d’un lecteur à chaud, après une première lecture, avec le recul analytique que cela implique. De ce fait des divergences d’opinion apparaîtront sans doute.

______________Critique pouvant contenir des spoils ____________

Les bases de ce roman, la pierre angulaire qui permet de rendre cette aventure aussi incroyable c’est bien entendu les personnages. Par personnage j’entends bien évidemment Pierre d’Aronnax conteur et témoin privilégié de cette histoire. Ce naturaliste par son approche tant scientifique qu’humaine suscite un réel engouement, une passion pour l’environnement et les événements qui se passent autour de lui. Une clairvoyance, une connaissance et une sincérité flagrantes permettent d’apprécier à juste titre ce personnage amoureux de la nature, qui semble presque neutre pour le coup. Neutralité renforcé par Conseil, son suivant. Totalement insipide par son caractère mais qui vit dans ce roman grâce à son dévouement pour son maître. Certes on pourrait ressentir une notion d’esclavagisme dans cette relation. Pourtant il n’en est rien. Aronnax n’impose pas dans le sens ou Conseil est totalement consentant à suivre son ami (?) dans les plus incroyables périples. Ceci avec un sang-froid, et un fort lien (expliqué) envers Aronnax. Passif mais attachant. Le caractère opposé du Canadien, Ned Land. Personnage fort de caractère impulsif, qui apporte de la variété et surtout qui permet de développer une grosse branche scénaristique de ce roman, la fuite du Nautilus. Le Nautilus justement. Réel personnage à part entière dont je reparlerais dans un paragraphe plus bas.

Enfin, après avoir évoqué la « triade » (de personnages), comment ne pas parler du capitaine Némo. Énigmatique et de ce fait si charismatique. Le mystère, la nébuleuse autour de cet être misanthrope mais Homme avant tout. Demi-dieu assumé de la mer, il incarne pour ainsi dire le monde marin. Les questions qui l’entourent ne trouveront, pour certaines, pas de réponses. Qu’importe il est le capitaine, l’équipage, le submersible, le monde marin, il donne vit au roman.

Toutes ces lignes assez descriptives mais peu analytique pour dire quoi ? Tout simplement que le relief apporté au scénario doit grandement à ses protagonistes. C’est grâce à eux qu’on s’immerge dans ce bouquin. On respire avec eux, on suffoque avec eux, on découvre, classe, vibre, s’émerveille… On est dans l’histoire de bout en bout. En bref, ces personnages complémentent à la perfection la variété des lieux où se déroulent les différentes scènes. Et oui ce Nautilus n’est pas un huis clos ! Ou l’art d’offrir des environnements et situations aussi diverses qu’intéressantes (que je ne citerai pas pour éviter de gâcher le plaisir aux éventuels lecteurs de ce pavé).

C’est aussi dans ces paysages de rêves que l’on voit toute l’inspiration de Jules Verne. Au-delà de l’imagination je veux dire. Des inspirations mythologiques, antiques et très actuelles. Oui il y a des questionnements et des réflexions existentielles dans ce roman, mais pour ma part, une seule, concernant le capitaine bien entendu, me parait être le fil rouge et la seule nécessaire. Sa misanthropie et sa réflexion sur son monde contemporain. Pour preuve ses nombreuses répliques et dialogues qu’il a avec le naturaliste qui endosse ici le rôle du lecteur. À la manière d’un prof qui explique les choses du monde sous forme de questions-réponses, ça ne vous rappelle rien ? Encore une preuve d’inspiration antique (il me semble que c’est Platon mais je peux me tromper étant novice dans ce domaine). Tout en étant indispensable au scénario, ceci ne constitue pas pour moi la finalité du livre. Il a tellement plus à offrir qu’une simple ouverture au débat. Il se veut bien plus contemplatif et descriptif. En dehors des longues pages de descriptions d’espèces marines qui renforcent l’immersion mais assez barbantes pour le coup. Chaque scène se savoure et cela grâce à une écriture au vocabulaire riche et tellement fluide. D’ailleurs cette critique est peut être une tentative d’hommage par l’utilisation de substantifs et adjectifs dont Verne use avec délice. La forme au service du fond, quelle belle leçon !

Pour finir, un mot sur le Nautilus qui illustre parfaitement la solidité de la construction scénaristique. Ce dernier est un bijou de technologie et l’explication de son fonctionnement impressionne, surtout à l’époque d’écriture ! Chaque détail me semble parfaitement pensé et réfléchi. Le monde créé s’appuie sur des sciences et des données que Jules Verne nous développe et qui sont totalement surprenantes par leur justesse. Une précision scientifique, une culture littéraire, historique, géographique, mathématique, … Bref je fusse très impressionné par le travail de fond et la force avec laquelle l’auteur a voulu créer un monde probant tout en gardant une part de fantas(me)tique.

Merci Monsieur.
Pelennor
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le 1 août 2014

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