S'il y a un sujet que l'Amérique aime par dessus tout, c'est l'Amérique elle-même. Narcissique au possible, le pays aime se regarder, s'observer, s'auto-analyser, peu importe les déformations du miroir. American Crime Story se place parmi les miroirs peut-être les plus nets, larges et justes qui soient.
Près de 20 ans ont passé depuis le procès contre OJ Simpson, star du football américain et du grand écran, accusé du double meurtre de son ex-femme et de son compagnon, qui a failli à nouveau déchirer la Californie deux ans après les émeutes de 1992 quand les policiers agresseurs de Rodney King ont été acquittés. Cette première saison retrace rapidement l'enquête pour s'attacher au long déroulé des audiences, aux portraits de la Dream Team des avocats de la défense et des procureurs qu'on observe avec une certaine ironie dramatique quand nous, spectateurs du XXIe siècle, connaissons le verdict avant même que le suspect soit arrêté. C'est donc avec compassion et fascination qu'on observe la dégringolade de Marcia Clark, la procureure en charge du dossier, qui fonce tête baissée dans un procès qu'elle est persuadée d'avoir gagné d'avance et qui va voir aller de déception en déception à mesure que les principales preuves à charge vont être affaiblies. En face, on observe la guerre des egos des avocats de la défense qui se moquent bien des deux morts mais vont transformer savamment le dossier en procès contre le racisme latent du système judiciaire californien.
Le scénario, avec tous les retournements parfois si invraisemblables qu'il faut se souvenir que l'histoire se base sur des faits réels et récents pour y croire, est solide et méritait bien tous ses épisodes pour être développé. Le casting est malheureusement inégal : Sarah Paulson, Sterling Brown et Courtney Vance sont excellents, John Travolta et Cuba Gooding Jr. sont dans cette zone grise du surjeu à la limite du cabotinage, et David Schwimmer est transparent. La réalisation en fait parfois trop, usant et abusant de travelings avant. Mais là où la série frappe juste, c'est dans son point de vue : elle ne juge pas, ne prend jamais vraiment parti, se contente de décrire avec minutie et recul comment toute l'affaire ne pouvait que mal se terminer, que la victoire était forcément à la Pyrrhus.
L'Amérique aime se regarder dans un miroir. Mais quand elle espère y voir une image idyllique, elle n'y voit qu'un reflet triste, ambigu, contradictoire, humain.