Zoulis images

Ce qui frappe, c'est le soin apporté à la restauration des images d'archives : les bavures des vieilles pellicules ont été traitées au maximum, de même que les effets de surexposition, et les images ont été bruitées de manière crédible (encore que, je ne sais pas si les soldats poussaient un cri de horde barbare en sortant de leur tranchée).

Le montage dramatise les événements et colle bien au commentaire, avec un effet "film d'action" qui sera sans doute un peu trompeur pour les classes de 3e à qui ce documentaire ne manquera pas d'être montré. Un exemple : monter une image de sniper allemand visant et tirant après avoir montré des soldats français installant des barbelés à la nuit tombée. Mais ça ne me choque pas plus que ça, si ça peut retenir l'attention des chères têtes blondes. Il y a quelques effets que je trouve un peu faciles : arrêt sur l'image d'une femme arménienne portant un bébé, alors que la voix off dit "l'ordre dit de tuer tous les Arméniens, sans distinction de sexe et d'âge", et bruitage dramatique de couperet qui tombe... Un peu trop dramatique, en fait.

Au niveau du contenu, c'est solide mais je me bornerai à quelques remarques :

• le film accorde un peu trop d'attention à la manipulation des images à mon goût, mais c'est dans l'air du temps de montrer du doigt n'importe quoi en hurlant : "propagande ! manipulation !", alors que la question de la censure du courrier, ou des épurations politiques n'est pas abordée, le film se focalisant tout de même bien plus sur le front que sur l'arrière.




• la thématique de la "guerre totale" est légèrement moins centrale que celle de la "brutalisation". Encore une fois, c'est dans l'air du temps. On a droit à de longs plans bien traumatisants de gueules cassées. Merci pour les enfants.




• Je ne suis pas d'accord en ce qui concerne l'offensive voulue par Briand à Salonique. Le documentaire suit la doxa qui voyait dans l'envoi de ce contingent une expédition inutile, ces troupes n'ayant pu mener des affrontements directs et suivis là où elles étaient. C'est plus compliqué : ce corps a obligé l'Autriche-Hongrie a maintenir sur le front de l'est des troupes qui sinon auraient pu être rapatriées sur le front de l'ouest, a fortiori après la paix de Brest-Litovsk. Le commentaire décrit cette initiative trop méconnue comme une erreur, un piège dans lesquels la Triple Entente se serait elle-même enferré. Simpliste.




• J'ai du mal avec le procédé consistant à introduire le documentaire par un moment bien postérieur, comme la commémoration de Tannenberg par Hitler en 1934, je trouve que ça risque de perdre les élèves, mais encore une fois : c'est dans l'air du temps.

Un documentaire qui n'apprendra rien à tout prof d'Histoire qui se respecte, mais qui intéressera les néophytes et ravira les IPR.