Bref.
7.3
Bref.

Série Canal+ (2011)

Maintenant que la série est terminée, et le risque de la saison de trop radicalement évité, on peut abandonner la sociologie amateur ("Bref" comme miroir d'une génération — génération de cossards narcissiques ou de laissés pour compte aux ambitions bridées, selon le point de vue), mettre de côté la communication (« les réseaux sociaux dans et autour de "Bref" » : bon sujet pour la rubrique « culture » des hebdomadaires du week-end), cesser de regarder la série comme un enfant (« Lui, j'ai envie de lui ressembler, pas lui… ») et oublier l'estampille "Canal+" : on peut parler de cinéma.
On admet que ce n'est pas facile : "Bref" s'inscrit dans un courant du « quotidien revisité » (Norman, le Palmashow, etc.) duquel il est difficile de faire abstraction. Par ailleurs, Kyan Khojandi ne nous facilite pas la tâche, car son travail tend la perche à une lecture sociologique ou au moins générationnelle (cf. les épisodes « Bref, je suis comme tout le monde », « Bref, j'ai grandi dans les années 90 ») et peut agacer par sa branchitude de trentenaire parisien. Vus à 20 heures 30, après la bouffe et avant la glandouille du soir, les épisodes ne découragent pas la superficialité.
Finalement, "Bref" dure deux heures et demie. C'est moins long que "le Hobbit", et moins pénible qu'une minute de Que du bonheur ! Surtout, le spectateur attentif des quelque quatre-vingts épisodes d'affilée remarquera à quel point la construction est de plus en maîtrisée : les anecdotes d'épisodes en one-shot (« Bref, je me suis bourré la gueule », « Bref, j'étais coincé dans l'ascenseur ») font place à une imbrication croissante. Et c'est là qu'on gagne en profondeur : lorsque les épisodes se suivent (« Bref, j'étais dans la merde », « Bref, j'étais toujours dans la merde »), lorsqu'on adopte un autre point de vue, celui de Marla (« Bref, je suis un plan cul régulier »), celui d'une vieille dame (« Bon, alors, pour résumer »), ou lorsque les épisodes se suivent tout en variant les points de vue (« Bref, j'ai fait une soirée déguisée » et ses prolongements). Et là, on commence à avoir quelque chose comme de la réflexion : cf. l'ultime épisode.
Bien sûr ce n'est pas encore "la Comédie humaine" des années 2010, mais c'est l'occasion d'échapper au pur exercice de style et à l'humour sans conséquences qui tournait un peu à vide. Il fallait peut-être commencer là : comme galerie de portraits, comme forme à contraintes (montage au hachoir, format court, alternance discours / récit, retours en arrière récurrents), et comme série comique, "Bref" est une réussite. Restait à donner un peu de substance à ces qualités.
Alcofribas
8
Écrit par

Créée

le 31 déc. 2013

Critique lue 303 fois

2 j'aime

Alcofribas

Écrit par

Critique lue 303 fois

2

D'autres avis sur Bref.

Bref.
Misterfox
9

bref.

J'ai appris que c'était la rentrée télé. J'ai allumé Canal+. J'ai vu qu'il y avait toujours le Grand Journal. J'ai soupiré. J'ai vu que Tania Machin avait quitté le Grand Journal. J'ai fait "Ouais...

le 6 sept. 2011

320 j'aime

17

Bref.
Kalian
3

Y a un pépin, le bref.

Des thèmes parfaitement consensuels et profondément inintéressants (la drague, la procrastination, l'embauche...SU-PER !). Un personnage principal de gros mou vaguement loser stupide et méprisable...

le 6 sept. 2011

213 j'aime

143

Bref.
Hypérion
6

Du short comic strip animé avec des vrais gens dedans.

Soyons concis. Bref, c'est une série qui, de part une narration inventive et une écriture percutante, met en exergue le quotidien paquebot de son personnage principal, . Il n'est ni beau, ni ignoble,...

le 5 janv. 2012

97 j'aime

31

Du même critique

Propaganda
Alcofribas
7

Dans tous les sens

Pratiquant la sociologie du travail sauvage, je distingue boulots de merde et boulots de connard. J’ai tâché de mener ma jeunesse de façon à éviter les uns et les autres. J’applique l’expression...

le 1 oct. 2017

30 j'aime

8

Le Jeune Acteur, tome 1
Alcofribas
7

« Ce Vincent Lacoste »

Pour ceux qui ne se seraient pas encore dit que les films et les albums de Riad Sattouf déclinent une seule et même œuvre sous différentes formes, ce premier volume du Jeune Acteur fait le lien de...

le 11 nov. 2021

20 j'aime

Un roi sans divertissement
Alcofribas
9

Façon de parler

Ce livre a ruiné l’image que je me faisais de son auteur. Sur la foi des gionophiles – voire gionolâtres – que j’avais précédemment rencontrées, je m’attendais à lire une sorte d’ode à la terre de...

le 4 avr. 2018

20 j'aime