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Imaginez vous la scène une seconde ; depuis vingt bonnes minutes déjà mon bus voguait en slalomant dans d'étroites rues du 13e comme s'il n'y avait aucune bagnoles en face. Une saleté de chanson me trottait dans la tête avec l'élégance d'un dugong : l'incarnation de l'horreur, l'énervant générique de Chica Vampiro, le si bien nommé. De plus, j'imaginais ma sœur me piailler les paroles avec ferveur. Terrible pour ma santé mentale.


J'avais beau m'être foutu à l'arrière pour ne pas me faire emmerder par la populace et les chiards en poussette, qu'une grosse femme se planta devant moi et me fit signe pour que je lui laisse de la place. D'un air d'autoroute je la mira des pieds à la tête et m'écarta légèrement. Une fois assise, madame prit ses aises et me colla presque contre la vitre. Dans mon crâne battait encore plus fort : « Chica Chica Vamp... Chica Chica Vampiro ! ».


Je me surpris alors à fermer ma gueule en me déportant sur le côté. J'acceptais la grosse dame dans mon espace vital, ce qui m’accaparait presque autant que la douce musique. Et vint l'odeur... Tel le vieux camembert oublié à la fenêtre depuis six mois, un violent flux nauséeux m'agressa par la droite, si bien que je dus faire un effort surhumain pour penser à autre chose. Comme seule autre pensée me vint inévitablement Chica Vampiro...


Je devais y penser, je devais écrire une critique, disséquer la série en toute objectivité ou bien seulement la tourner en dérision à l'aide de bons mots. Je me concentra en fermant les yeux (et les narines) et me retrouva, voyageant dans mes souvenirs comme devant un livre ouvert, dans un autre espace. Je me revis, zappant minablement une après-midi où l'un de mes profs avait décidé de ne pas se pointer (pour cause de train en retard. Encore une histoire sentant bon la fumisterie si vous voulez mon avis). Les infos tournaient, dix, quinze minutes...aucun intérêt. Et je la vis !


Je la vis, entre deux chaînes trollant son spectateur d'un téléfilm médiocre, je la vis Elle. J'entendais sa voix dans ma tête. Elle m'a demandé mon nom, je n'ai pas répondu. Elle m'a brutalisé...


J'ai ris. Qu'est-ce que j'ai ris. Un rire franc de baleineau, le truc distingué, quoi. C'était fantastique ! Jamais je n'avais cru tomber sur un jeu d'acteur plus mauvais, plus faux que le doublage ne faisait que démultiplier. Et il y avait cette histoire de vampire absolument navrante.


Je vous refais la scène : un gamin, seul dans sa chambre, l'air faussement méditatif attend d'évacuer sa pétoche en balançant ses lignes de texte. On frappe à la porte, sa mère entre, le gosse prend peur. Bien qu'il ne se touchait pas le cigare à moustache, l'enfant semble horrifié de voir sa mère, si bien qu'il s'empare d'un crucifix et le dirige sur elle. La mère recule, blessé par l'aspect religieux de la chose (même le bidule est fait maison. Pratique de craindre toutes les croix... Faut pas poser du carrelage au sol). Le fils se met à brailler de la charmante voix de Naruto, prétextant qu'il ne veut pas vivre dans une famille de vampires, qu'il ne veut pas se faire bouffer etc. Certes. Enfin ça reste tes parents couillon, fallait peut-être se rendre compte avant, surtout quand tu sais qu'ils dorment toutes les nuits dans un cercueil...


Je continuais de zapper pensant avoir trouvé mon maître en matière de comédie de l'absurde mais préférais tout de même l'oublier. Trois minutes s'écoulèrent et j'y revins, n'ayant pas eu ma dose. Cette fois-ci, maman vampire et papa vampire avaient le visage bien inquiet sous leurs maquillages grotesques. Près d'eux, leur fille, notre héroïne au timbre appelant au meurtre, était vraiment très colère. Au cours de la nuit l'adolescente a perçu en elle un changement. Pensant immédiatement aux règles, mon doigt navigua sur la zappette mais il en alla autrement. Il était question des oreilles de la donzelle, devenues sylvaines au matin. Ça criait, fustigeait dans tous les sens. C'en était trop, j’éteignis le poste et passa à autre chose.


Voyez-vous Chica Vampiro n'est pas simplement une très mauvaise série, c'est une purge scénaristique. On a beau tomber sur n'importe quel épisode, n'importe quelle scène (parce qui oui je suis retombé dessus par la suite, faute encore à ma chère sœur s'étant elle aussi coltiné un épisode par hasard), le constat est toujours le même : effarant. Et pourtant j'en ai vu/subit à la pelle des séries mignonnettes pour gamines au cours de ma vie. Faut croire que la magie de la connerie opère encore et toujours.


Je crois que je préfère encore prendre le 27 en bonne compagnie que de retomber dessus un jour, même si j'en ris de bon cœur à chaque fois. Sauf pendant le générique, là j'ai juste envie de mourir, que ça soit rapide et indolore.

Fosca
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le 15 mars 2016

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Fosca

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