Entourage
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Entourage

Série HBO (2004)

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Entourage est tout à la fois : une bromance, une mise en abîme hollywoodienne, une œuvre chorale, des histoires d’amour et d’ego. Doug Ellin y raconte les péripéties de Vincent Chase, un jeune acteur prometteur, toujours flanqué de son frère « Drama », dont la carrière de comédien bat de l’aile, d’Éric, son manager, et de « Turtle », son homme à tout faire. Vincent leur offre une existence dorée et oisive qui les pousse au statu quo et les maintient dans un état de dépendance relative. Ce postulat possède à lui seul une puissance humoristique remarquable : un boulier ne suffirait pas à dénombrer les instants où Vince apporte son soutien financier à ses amis, où ces derniers se voient renvoyés à leur subordination pécuniaire, ou traités en moins-que-rien. Il faut dire que Johnny « Drama » ne parvient plus à décrocher le moindre rôle et vit dans le passé, tandis qu’Éric manage Vince de telle manière qu’il provoque régulièrement le courroux d’Ari Gold.


« Le requin ». C’est son surnom. Ari est un agent influent, très bien intégré au circuit hollywoodien. Campé par un Jeremy Piven majuscule, il exerce sur le récit une emprise herculéenne. Ses colères épiques, ses répliques parfaitement troussées, sa gestuelle de nabot survitaminé, mais aussi sa vie privée et son dévouement sincère envers Vincent en font l’un de meilleurs personnages secondaires portés sur petit écran. C’est par son truchement que le spectateur découvre les dessous de Hollywood, ses batailles de coulisses, ses espoirs déchus, ses triomphes tardifs. Ari, c’est l’impatience, l’arrogance, la combativité incarnées. Un volcan en éruption constante. L’élément qui vient contrebalancer la relative torpeur qui anime le groupe d’amis sur lequel se braquent les projecteurs d’Entourage. Même les guests tels que Mark Wahlberg, Jessica Alba, Snoop Dogg, Val Kilmer, Peter Jackson, Larry David, Martin Scorsese ou Scarlett Johansson peinent à susciter le même enthousiasme, lors de leurs apparitions, qu’un Jeremy Piven décidément au firmament. Au golf, à son bureau, dans un walk and talk téléphonique, à une table de jeu, en soirée devant une célébrité, lors d’une projection test, dans l’école de ses enfants, en vociférant face à son assistant Lloyd, Ari crève tout à la fois : l’écran, les abcès, les cœurs, de colère, de rire, de honte… Citation aléatoire (sans la gestuelle inimitable de Piven) : « Paramount a refusé avant de savoir qu’Universal avait accepté. C’est comme à l’école, Éric. Tu peux pas sauter la reine de la soirée tant qu’elle a pas appris que sa meilleure copine t’avait branlé dans un vestiaire ! »


L’essentiel d’Entourage se déroule à travers les différentes strates du système hollywoodien. La production d’un blockbuster, les négociations avec les grands studios, la vision d’un acteur sur son métier, ses attentes concernant sa carrière, sa volonté de dénicher un rôle, n’importe lequel, pour son grand-frère, sa déception quand il apprend qu’il est contractuellement engagé dans une série de films alors que James Cameron ne réalise que le premier d’entre eux : la série de Doug Ellin est un voyage dans le centre névralgique du cinéma américain, avec un souffle de folie sur la nuque. Mais cette image est quelque peu réductrice : ses moments les plus justes et touchants, Entourage les réserve aux liens d’amitié et de solidarité que cinq amis entretiennent les uns avec les autres. À chacun sa caractérisation, à chacun ses obsessions, à chacun ses arches narratives. Mais tous contribuent à façonner une production HBO autoréférentielle et rendue au dernier degré de l’irrévérence. Pour notre plus grand plaisir.


Critique publiée sur Le Mag du Ciné

Cultural_Mind
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le 24 oct. 2019

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