Du balais, merci.

Je fus à l'hôpital il fut un long bail, je ne m'en souviens presque pas, mais je me souviens de ça. Comment l'oublier, j'en frissonne.

Mon frère pour me faire patienter, un mois c'est long, s'était procuré à la va-vite deux de ces petits divertissements circulaires qu'il me semblait encore saugrenus d'utiliser parfois.

« Saugrenu », je charrie, je louais même encore des DVD à l'époque, 2013 ! Has-been à 25 ans c'est dur. T'es là dans les rayons (tel Adam l'heureux ion) d'une boutique déjà condamnée, probablement à la banqueroute. À la fermeture en tout cas. C'est très mauvais tout ce que tu vois, en rayon j'entends, et puis quand tu partais avec la boîte tu te demandais même si tu pourrais la rendre un jour. Si le magasin serait ouvert demain. Bonjour l'angoisse.

T'as pas l'envie de te retrouver avec Mission Impossible 4 sur ta table de nuit, pour la fin de tes jours, à ne plus savoir qu'en faire.
(Pour info je me suis tapé le making-of, pour rentabiliser, Tom Cruise fait ses cascades tout seul, c'est fort)

Mais je m'égare. Mon frère m'avait acheté deux DVD donc : un spectacle de Jean-Marie Bigard et deux saison de Friends. Persuadé qu'il était que j'aimais beaucoup les deux. Et il avait à moitié beaucoup raison, la moitié Friends.
(La critique s'arrête là si vous vouliez qu'on parle de Friends... mais rassurez-vous, j'en parlerai plus longuement dans une critique de Jean-Marie Bigard)
L'autre moitié fut terrible, car moi influençable que je suis me suis laissé suggérer par l'intuition de mon frère qu'en effet j'aimerais écouter un idiot vulgaire parler plutôt mal d'évolution avec sa bite.
Ne pouvant parler à l'époque j'avais mal à la gorge (et un petit peu autour, au tour) ce fut quitte ou double, je perdis.
Le DVD lancé, c'était le soir, et mon frère parti, je redécouvrai mon aversion pour Bigard jusqu'au bout, jusqu'à la fin presque du spectacle, les yeux écarquillés comme une orange mécanique.

Et je dis « presque ». car sur les trois quarts une femme de ménage inspirée vint couper le supplice infernal, d'un geste si négligé que presque poétique, comme on ramasse des miettes.
Beaucoup d'infirmiers me sauvèrent probablement la vie ce jour-là, dur à dire, mais c'est clairement cette femme et son balai inflexible qui fut l'héroïne de ma nuit.
Si elle se reconnaît merci.