Grégory par Thierry Dupreuilh

L’affaire Grégory, ce petit garçon de 4 ans retrouvé noyé dans la Vologne au soir du 16 octobre 1984, est devenu le fait divers le plus connu de France. Au matin du 17 Octobre 1984, la France est habillée de chagrin, horrifiée par la barbarie de l'acte. Le visage de ce garçonnet, cette beauté fragile, cette insouciance la hantent. Ce petit garçon ordinaire, après son assassinat barbare devient un être hors du commun. Le meurtre d'un enfant est un crime abominable. Le prénom de l'enfant s'est inscrit tout de suite dans la mémoire collective.il a marqué les esprits de toute une génération, ma génération. Beaucoup de parents ont refusé de donner ce prénom à leurs enfants Il devient un prénom maudit.
En 1984, quelques jours, après ce maudit assassinat, très vite, la tension monte, les radios fonctionnent en permanence. On écoute, on commente chaque flash. On réclame, même le retour de la peine de mort, surtout lorsqu’on on découvre une mère éplorée, écrasée par un chagrin incommensurable. Perdre un enfant pour une mère est une cruauté inégalable, une calamité inégalable. On voudrait soulager sa peine. Une mère qui de victime passera à meurtrière, qui subira les ragots et les regards lourds de sens. On fait la connaissance d'un père sanguin, rageur à l'esprit de vengeance et qui abattra froidement son cousin, soupçonné alors d'être le meurtrier. Il s'abat sur ce village où les calomnies, les insinuations, les secrets d’alcôve, les antipathies macèrent, une véritable malédiction.
Ce fait divers à ce jour, n’est toujours pas résolu. Avec cette affaire, le pays est devenu fou. La justice est déboussolée. Les médias se sont déchaînés. Prenez tous les épisodes de »Cold Case »ou « Esprits criminels », cette tragédie pourrait faire l’objet d’une série à succès aux multiples rebondissements. La famille Villemin est une famille à histoires, à rumeurs. Elle est devenue presque aussi célèbre que la famille Ewing de « Dallas ». Tous les ingrédients d'une tragédie étaient réunis, une province moisie, des jalousies, des rivalités. L’amour et la haine sèment le doute et la méfiance. La suspicion est partout chez eux. Les aventures de la famille Ewing ne font pas le poids.
Nous entrons dans une histoire brutale, au cœur d’un drame qui nous angoisse en permanence. Nous sommes toujours hantés par le cerveau malade de ce corbeau destructeur. Pour les personnes de ma génération qui ont suivi le déroulé de l’histoire, jour après jour, mois après mois ; années après années, l’effet de surprise sera moindre. Pour les lecteurs des générations suivantes, le choc risque d’être plus violent.