"Hastings! Ah, mon ami, mon ami!"

Difficile de faire comprendre à ceux qui me connaissent que je m'ennuie comme un rat mort devant les films qu'ils qualifient de "géniaux", "prenants", "intelligents". Les débauches d'effets spéciaux mal incrustés me gonflent, de même que les bellâtres aux yeux de mérou et les potiches interchangeables qui défilent encore et encore devant mes yeux dans chaque type de film sortant ces dernières années.

Quand on a atteint un certain âge, il n'est pourtant pas compliqué de sortir une phrase pareille, mais quand on est dans la vingtaine et que votre entourage ne jure que par les blockbusters américains ou les films français bien tire-larme, difficile de ne pas passer pour un extraterrestre quand on avoue préférer rester chez soit pour se regarder un bon Hercule Poirot!

"Le vieux dégarni enquêtant au début du siècle dernier?" Tout juste, Auguste.

J'ai envie d'être honnête avec vous, lecteur tombé sur les divagations écrites d'un obscure inconnu dont vous vous foutez totalement, en vous révélant que je n'ai pas été un admirateur immédiat du détective belge expatrié à Londres.

Le premier épisode a été une vraie purge à regarder (excepté le fameux générique d'ouverture qui me faisait déjà du charme). Je ne voyais pas pourquoi ce téléfilm vieillot et particulièrement plan-plan pouvait autant plaire à une fille que j'ai connu. C'était lent, c'était ch***t. Et pourtant je suis fan d'Inspecteur Barnaby (je sais, votre intérêt envers moi augmente de minute en minute)!

Bref, quelque temps plus tard, je suis tombé par hasard sur un autre épisode... et je l'ai regardé en entier. Certes, je trouvais toujours cette ambiance Art Déco un peu quelconque (qui me faisait penser sans arrêt au manoir de Resident Evil sur ps1) et les personnages secondaires étaient de telles endives que j'oubliais sans cesse leur prénom.

"Mais qu'est ce qui a changé, alors?" me demandez vous. Eh bien, j'ai commencé à ressentir une réelle sympathie envers ce petit moustachu dégarni à l'intelligence hors du commun et au melon pas possible, ce qui m'a donné envie de voir la suite.

Bref, de fil en aiguille, j'ai facilement regardé trois bon quart de cette série, pas forcément dans l'ordre.
Nette préférence pour les premières saison, où ce brave Hercule à son cercle de fidèle, à savoir Japp, l'inspecteur sympathique à la moustache bien fournie, Miss Lemon, la secrétaire dégourdie et fidèle (à la coiffure des plus originales) et enfin, le capitaine Hastings. Ce dernier est d'ailleurs impayable et apporte une belle touche d'humour, notamment dans sa relation avec Poirot. Sans cesse rabroué par ce dernier qui le considère pourtant comme son plus cher ami, il assiste fidèlement l’enquêteur belge dans un bon nombre d'affaires.

Hercule est un personnage complexe. Toujours habillé d'une manière excessivement soignée, possédant une moustache ridicule dont il très fier, il parachève son physique atypique par une préciosité et une obséquiosité exceptionnelle. C'est clair, il ne laisse personne indifférent. Dans un épisode, certaines personnes s'interrogent même sur son appartenance à tel ou tel bord!
Poirot a beau être mystérieux, c'est tout d'abord un génie qui finit toujours par résoudre n'importe quelle affaire, ce qui explique son léger manque de modestie et la fierté qu'il ressent envers "ses petites cellules grises", expression qu'il nous ressortira une bonne centaine de fois.
Homme fondamentalement bon et croyant, Hercule essaie de faire le bien autour de lui mais n'est aucunement parfait, ce qui explique notre attachement pour le personnage qui se montre tantôt aimable, tantôt irritable. Enfin concernant son vécu, il nous le sera révélé petit à petit au fil des aventures.
Dernier point sur le personnage, et non des moindres, son amour immodéré de l'ordre et de la propreté, ce qui le rend facilement dégouté par tout et n’importe quoi: il faut le voir froncer le nez en voyant un chien ou quand il respire "le bon air de la campagne"!

En conclusion, une excellente série avec un David Suchet impérial en Poirot, qui ne s'adresse pas uniquement aux "vieux" mais à quiconque désire s'évader en compagnie d'un drôle et attachant bonhomme. Certains épisodes ont beau être moins intéressant que d'autres, ils possèdent cependant tous un petit quelque chose.
Bénéficiant d'une excellente VF (Roger Carel et Jean Roche en tête), drôle, émouvant et nous faisant voir du pays (l'Angleterre bien évidemment, mais aussi la Belgique, en passant par l’Égypte et la "Mésopotamie"), Hercule Poirot apporte une détente bienvenue. Et pour un jeune gaillard comme moi qui court partout, par moment ça fait vraiment du bien!