Pas mal du tout

Je suis en désaccord avec la plupart des critiques concernant ce documentaire.

Certes, celui-ci est orienté dans son survol de l'histoire du jeu-vidéo, et commet peut-être quelques erreurs historiques (le créateur de la cartouche ; ok, c'est Haskell, mais c'est bien Lawson qui a adapté le modèle pour la production de la première console), cependant il a l'immense mérite de chapitrer le regard posé sur le sujet.

Par chapitrer, je veux dire que chaque épisode s'intéresse à un aspect particulier du sujet, et chaque épisode propose à mon goût un regard pertinent sur la façon dont n'importe qui aurait pu découper son travail pour une présentation sommaire mais captivante.

D'abord les premiers jeux hérités de pong, et les premières arcades, les premières consoles et les jeux textuels, puis la crise du jeu-vidéo de 1983 et l'arrivée de Nintendo, ensuite le combat entre SEGA et Nintendo et le passage à une vitesse supérieure et plus agressive, les jeux de combat, la question de la 3D (hacking de game-boy et puce sur la SNES pour Starfox), puis le parallèle du jeu sur PC, avec ID Software (Romero et Carmack) et le jeu DOOM qui en 1993 entrera dans l'histoire par son degré d'immersion en trois dimension.

Il est vrai que le passage avec le jeu créé par un homosexuel donne à penser à un besoin de politiquement correct, mais ce passage reste toutefois important pour comprendre que le jeu était aussi une succession de révolutions émotionnelles.

Il est vrai aussi que nous aurions tous à dire, en tant que joueur ayant connu une floppé de jeux, que bien d'autres oeuvres vidéoludiques ont jalonné le paradis du jeu-vidéo et repoussé les limites (Ocarina Of time, Half-Life, etc), mais le documentaire reste néanmoins assez bien foutu et avec un sens de l'esthétique qui caresse énormément la rétine et soutient le rythme du montage. Lorsque les images d'époque manquent, des petites animations en rétro-8bits servent de scènes illustrant le propos et donnent à celui-ci une profondeur immersive (la réalité devient elle-même un jeu).

Je ne peux pas me prononcer sur la pertinence d'avoir interviewé tel ou tel individu au regard d'une philosophie plutôt capitaliste que créative. Je pense qu'il y a suffisamment de portraits de créateurs notables (le créateur de Pacman, de Street Fighter, de Mario, de Sonic, de Final Fantasy, etc) pour que nous n'ayons pas à faire la fine bouche et avoir l'arrogance de se croire supérieur en matière de synthétisation d'un sujet aussi vaste.

J'ai personnellement énormément appris de ce documentaire, et découvert des jeux que je ne connaissais pas tel que celui en textuel et inspiré de Donjon et Dragon, puis son concurrent avec des "fausses" images en 3D (tracées avec des lignes), qui m'ont éclairé sur certains expériences qui s'étaient enfouies au fond de ma mémoire (j'ai pu jouer à des jeux textuels sur un ordinateur au collège, en 1994/1995).

Dire que "E.T n'a pas été le seul jeu qui a plombé l'industrie et créé la crise de 1983" et reprocher une trop grande la légèreté de ce documentaire, ne peut cacher que celui-ci a justement parlé de la baisse d'intérêt des consommateurs envers les consoles n'arrivant pas à immiter les bornes d'arcade, et les salles d'arcade elles-mêmes devenues trop monotones. Il faut savoir regarder un documentaire avec le regard neutre qu'implique la fraîcheur enthousiaste de sa réalisation pour ne pas finir aveuglé par son propre savoir.

Mes amitié de joueur ayant facilement les larmes aux yeux en pensant à des chef-d'oeuvres de pixels.