Saison 1 :


Après avoir œuvré en tant que scénariste sur Weeds et Raising Hope, Dave Holstein revient aux commandes de Kidding et s’adjoint les services de Michel Gondry .


Il n’est guère étonnant de retrouver l’artiste français, notamment en tant que réalisateur, au sein d’un tel projet, tant le pitch semble être fait pour lui. Chaque épisode ouvre, d’ailleurs, sur un générique en stop-motion des plus ingénieux.


Comment animer une émission pour enfants lorsque l’on doit faire face à des situations familiales dramatiques ?


La trame narrative se base sur cette problématique pour suivre les déboires de M. Pickles. Alternant le passé et le présent, on découvre lentement la situation de l’animateur et les circonstances l’ayant amené dans une telle situation.


L’événement tragique, vécu, ébranle les fondations de sa vie et l’oblige à se redéfinir lorsqu’il voit son entourage s’éloigner pour diverses raisons. La démultiplication des points de vue permet de comprendre ces relations, et la manière dont est gérer cette entreprise familiale. Les enjeux financiers du show sont, par exemple, mis en péril par la prise de conscience de sa vedette.


En effet, de par l’expérience vécue, l’homme s’interroge sur sa notoriété, sa responsabilité dans ses actes, ses propos et surtout les valeurs véhiculées par son émission. Ses réflexions donnent lieu à des moments singuliers de par l’écart entre la nature du programme et les sujets traités.


Outre la vie sur le plateau et ses aléas, nous découvrons aussi la personne derrière le personnage. Sa notoriété n’est plus à faire et cela est autant un fardeau qu’un avantage en fonction des circonstances. Elle lui permet d’aider son prochain, de lui éviter certains tracas, mais le condamne à une image ne reflétant pas ses réels états d’âme.


De même, à force de jouer un rôle depuis tant d’années, il en devient difficile de se rappeler qui il est réellement. Les solutions et la philosophie, d’une émission pour enfants, ont peu d’effets lorsque des problématiques sérieuses surgissent. Il est, donc, un être déconnecté de la réalité devant évoluer, auprès de la Mort, pour pouvoir sauver le peu qu’il lui reste.


De par la nature de la série, Dave Holstein peut se permettre d’intégrer des protagonistes en cours de route : les patients en fin de vie, son alter ego japonais, …. En agissant de la sorte, l’auteur dynamise son récit et s'ancre dans un univers des plus réaliste. Il est ainsi possible d’aborder de nombreux sujets sans avoir à les centraliser sur les mêmes protagonistes.


La place des marionnettes dans ce Monde est importante, car il est un moyen d’expression plus libre. Ils permettent de briser les barrières de la langue, d’exprimer un sentiment ou de donner sa vision d’un membre de son entourage. Chaque figurine à sa fonction et un passif qui lui est propre.


Pour faire accepter ce mécanisme, l’auteur adopte un ton particulier. Dans sa grande majorité, l'atmosphère est légère. Lorsqu’un évènement dramatique surgit, il est traité de façon détaché, comme tout autre moment lambda. Cette approche peut paraître déconcertante, de prime abord, mais correspond finalement à la façon dont cela se produirait en réalité. Un moment tragique a lieu, mais cela ne va pas changer le Monde pour autant. Ainsi, lorsqu’un accident de voiture survient, seul subsiste le silence après le fracas de la tôle, sans fond sonore artificiel pour accompagner cet instant.


Cette façon, de procéder, se justifie aussi par la volonté de suivre le point de vue de M. Pickles. Cet homme est en décalage avec son environnement. De ce fait, sa vision, et par extension la nôtre, s’en retrouve altérée. Les êtres humains et les pantins deviennent, in fine, interchangeables car complémentaires pour comprendre la psyché de chacun.


La combinaison de cette approche à la densité des thématiques abordée permet d’obtenir une œuvre singulière, touchante et captivante. On ressort de cette première saison bouleversée par le torrent d’émotions convoqué. On ne peut qu’attendre avec impatience la deuxième saison.

tzamety
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le 3 juil. 2019

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