L'Amie prodigieuse
7.5
L'Amie prodigieuse

Série HBO (2018)

Voir la série

Dans la catégorie des séries historiques, il y a deux écoles: celle qui épouse le destin d’un personnage ayant existé, et celle qui préfère se pencher sur d’illustres inconnus.
L’amie prodigieuse joue dans la seconde cour, celle d’un quartier défavorisé de Naples où l’après-guerre est animée des potins locaux: de la folle du quartier aux dernières frasques du coureur de jupons en passant par des tentatives de meurtres, des vols ou des suicides…. Un vrai programme de soap opéra.


Et pourtant la série n’est jamais redondante: elle vit au rythme d’un quartier qui tout en étant couvert de poussière et habité par la violence à tous les étages arrive à éviter l'écueil du misérabilisme facile.
La vie n’est pas facile mais on ne s’en formalise pas: c’est la vie, point. Le souffle qui traverse la série a quelque chose d'entraînant, de revigorant, et sans en venir à envier l’enfance des petites héroïnes, on comprend qu’elles restent attachées aux lieux et aux jeux de leur enfance.


L’ambiance du quartier, les costumes élimés et les décors défraîchis donnent à l’amie prodigieuse une patine historique et réaliste qui font qu’on se sent tout de suite emportés.


Vient s’ajouter à cela le vrai sujet de la série: la relation entre les deux héroïnes. Avons-nous déjà autant apprécié de suivre une amitié féminine?
Difficile de remuer ses souvenirs pour chercher des comparaisons tant la relation entre Léna et Lila est envoutante et palpitante.


Léna est la narratrice et c’est par ses souvenirs que nous rencontrons la fascinante et vénéneuse Lila. Longtemps on pense que Lila est le personnage le plus intéressant de tout ce petit monde: parce qu’elle est brillante au milieu d’une foule ignorante, parce qu’elle ose défier tout le monde, envoyer des pierres aux garçons du quartier, jeter une poupée dans une bouche d’égouts.
Lila fait peur, même petite, et on comprend vite le décalage qui existe entre son intelligence innée et Léna qui dans l’absolu n’est pas bête mais qui aura besoin de plus d’efforts.
Comme on conçoit très vite la relation qui lie les deux filles: à la fois complices et concurrentes, toujours à flirter entre la volonté de partager des expériences et d’être en avance sur l’autre.
Le rapport de forces entre elles évolue perpétuellement et c’est ce qui fait que la série est très juste: on sait que rien n’est jamais établi dans les relations humaines, et c’est pour cela que les échanges sont beaux, parce qu’ils ne répondent pas à une logique infaillible. Celle qui est un jour la meilleure amie du monde est aussi capable le lendemain de poignarder dans le dos son amie, par jalousie, parce qu’elle entend exprimer son mal être, parce qu’elle ne voit pas d’autre moyen de se sortir d’une vie qui ne la satisfait pas.


l’amie prodigieuse c’est l’histoire d’une amitié qui évolue en même temps que ses protagonistes, et ça permet de mesurer aussi l’accélération de l’émancipation féminine depuis les années 60, et la façon dont peut être (mal) traité le génie dans un environnement qui n’a pas le loisir de pouvoir considérer l'intellect comme une force.
Le scénario est riche notamment sur la manière dont chacune doit se battre pour exister, dont la vie malmène les ambitions des uns et des autres et oblige à avancer parfois en faisant de mauvais compromis, parfois en devant laisser de côté une partie de son existence.
Il y a là des thèmes universels et beaucoup de sentiments qui ne se cantonnent pas à une époque.


L’amie prodigieuse est un souffle qui nous entraîne et nous donne envie de connaitre la suite, d’accompagner jusqu’au bout l’évolution des deux amies, parce qu’on s’est attaché à leur destin, parce qu’on veut absolument savoir jusqu’où leurs ambitions vont les conduire, parce qu’on veut pouvoir finir l’histoire pour se retourner et mesurer le chemin parcouru.


Une très bonne découverte qui parait-il rend parfaitement hommage aux livres de base, qu’on va s'empresser d’aller découvrir pour étancher notre soif de connaître la conclusion.
Une très bonne série à côté de laquelle il serait dommage de passer.

iori
8
Écrit par

Créée

le 4 oct. 2020

Critique lue 150 fois

iori

Écrit par

Critique lue 150 fois

D'autres avis sur L'Amie prodigieuse

L'Amie prodigieuse
Max-D
9

Chef-d'oeuvre 2018

Il n'y a même pas à réfléchir. Cette mini-série est la meilleure série de l'année. Rien ne peut l'égaler. Tout est beau et bien, l'histoire, le visuel, la production, les acteurs... Enfin une série...

le 25 déc. 2018

13 j'aime

1

L'Amie prodigieuse
LuHell
9

Prodigieux !

J'ai dévoré les livres… Et j'ai englouti la saison 1 de la série. Un vrai bien de mettre un visage sur ces personnages. J'ai largement apprécié le fait que l'image que je m'étais faites des...

le 20 déc. 2018

9 j'aime

L'Amie prodigieuse
ChristineDeschamps
2

Critique de L'Amie prodigieuse par Christine Deschamps

Pourquoi je n'ai pas tenu plus d'un quart d'heure ? Je dirais que c'est une question d'attentes déçues, mais pas celles qu'on pourrait croire, parce que je ne suis pas une fanatique des livres dont...

le 16 juil. 2020

6 j'aime

2

Du même critique

Adults in the Room
iori
8

La dette qui avait trop de Grèce (ou l’inverse)

Voici un film qui illustre parfaitement une certaine idée du cinéma, celle qui permet à des orfèvres de s’emparer de sujets politiques difficiles, abscons et d’en donner une interprétation qui permet...

Par

le 24 oct. 2019

31 j'aime

Jalouse
iori
7

Le cas-Viard

Comme quoi c’est possible de faire une comédie qui force le trait sans tomber dans la danyboonite aigüe (une maladie de la même famille que la kev'adamsite ou la franckdubosquite). Karine Viard...

Par

le 14 sept. 2017

27 j'aime

9

Les Cowboys
iori
8

Kelly watch the stars

François Damiens dans un film qui s’intitule “les cowboys”, où il incarne un père de famille fan de country dans les années 90. Voilà une base qui donne envie. Envie de fuir bien loin. Sauf que ça se...

Par

le 18 nov. 2015

24 j'aime

7