Les Chevaliers du Zodiaque
7.4
Les Chevaliers du Zodiaque

Anime (mangas) TV Asahi (1986)

Diffusée à partir de 1986 au Japon mais surtout, pour ce qui nous concerne, à partir de 1988 dans le Club Dorothée en France, Saint Seiya (ou improprement Les chevaliers du Zodiaque) est l'adaptation en animé du manga éponyme de Masami Kurumada. Elle raconte l'histoire de chevaliers des temps modernes, arborant des armures à l'effigie de leur constellation protectrice, chargés de protéger la réincarnation de la déesse Athéna, garante de la justice sur Terre.


Passons sur les détails du scénario (déjà passés en revu ici) pour envisager cette critique sous l'angle de l'adaptation.



Premier contact



Disons-le tout de suite, à l'aune des premiers épisodes, l'animé enterre le manga sur bien des points.


D'abord, l'univers visuel retravaillé par Shingo Araki a beaucoup plus de gueule : les personnages, mieux dessinés, disposent d'armures infiniment plus travaillées que les originales, les décors continuent d'exister après les scènes d'introduction, et surtout, animation oblige, les combattants ont enfin l'air de se battre un peu (et non pas de seulement prendre la pose) – que l'on regarde, pour s'en convaincre, le duel de Seiya et Shiryû lors du tournoi galactique.


Ensuite, l'adaptation a eu l'intelligence de passer sous silence certains éléments du scénario comme, par exemple, l'âge des héros (en effet, Seiya par exemple est censé n'avoir que 13 ans... à moi, il m'en a toujours paru 20). On verra plus tard qu'ils ont aussi "omis" de préciser que ces derniers sont tous demi-frères et qu'ils étaient une centaine à l'origine (à peu près du même âge, oui, c'était grotesque).


Enfin, l'animé bénéficie d'un argument de taille : la BO composée par Seiji Yokoyama. Elle est tout simplement excellente et colle parfaitement à l'univers : orchestrale pour le côté chevaleresque antique, électrique pour l'époque moderne, le tout mixé ensemble pour un résultat étonnamment efficace.


Bref, Saint Seiya l'animé, c'est bien, un divertissement pour la jeunesse très réussi, pendant une quinzaine d'épisodes. Le point de basculement est là.



La débandade



C'est à partir de là, en effet, qu'apparaissent les premiers recyclages d'animation vraiment visibles. Et c'est surtout à partir de là que l'animé, qui a rapidement rattrapé la parution du manga, est contraint de gagner du temps avec des épisodes filler. Or, on constatera bien vite que si l'animé améliore sensiblement le matériau d'origine, il patauge complètement lorsqu'il n'y a plus de matériau – et c'est bien normal. Il s'agit en effet d'ajouter des éléments scénaristiques qu'il faudra intégrer tant bien que mal dans l'histoire principale. C'est très délicat, et on imagine que les scénaristes n'avaient pas tellement le temps de la réflexion.


Ce problème de rythme – c'est-à-dire l'animé plus productif que le manga et les épisodes filler qui en découlent – minera complètement le reste de la série, rallongeant la sauce là où la concision serait souhaitable. De plus, ce qui est probablement lié, les recyclages d'animation se multiplient. Et on se rend compte enfin de la difficulté que représente l'adaptation en animé des combats du manga. Les météores de Pégase, par exemple, sont censés être une multitude de coups portés à la vitesse du son, voire de la lumière. Dans le manga, cela donne juste un personnage brandissant le poing et quelques impacts sur le corps de celui qui prend le coup. Comment traduire ça en animation ? Au début, la solution était d'étendre le temps de l'action et de montrer Seiya portant une multitude de coups de poings en même temps. Très vite, on ne voit plus que Seiya brandissant le poing et une multitude de faisceaux lumineux (les coups) en partant pour frapper l'adversaire. Aucune solution n'est vraiment satisfaisante, mais que faire d'autre ? Le matériau de base est si pauvre qu'il est difficile de broder, surtout avec des impératifs de temps très contraignant.


Pourtant, malgré tous ces problèmes, des fulgurances subsistent. Il me semble que pour pleinement mesurer le potentiel de Saint Seiya, il faut regarder le combat contre Shaka de la Vierge. Même en VF, il est prenant, les personnages impliqués ont une grande classe, les épreuves qu'ils subissent frappent l'esprit. Si la série était toujours de ce niveau, ce serait très bon. Mais non. Un peu plus loin, nos héros visitent la maison du Sagittaire, et c'est une catastrophe placée sous le signe du filler.


Notons à ce propos que l'animé ne couvrait à l'époque que deux arcs du manga sur trois (la Bataille du Sanctuaire et le Sanctuaire de Poséidon), mais qu'entre ces deux arcs il a greffé un arc filler entier : la Bataille d'Asgard. On sent que l'idée était de laisser suffisamment d'avance au manga pour pouvoir adapter dans les meilleures conditions l'arc de Poséidon. D'ailleurs, cette volonté de fidélité se traduit notamment par le retour aux armures du manga, pourtant moins réussies. Ce qui est intéressant dans l'arc d'Asgard, c'est qu'il consiste, comme celui de Poséidon, à vaincre sept guerriers pour sauver Athéna. Or, l'arc d'Asgard se déroule sur 25 épisodes, tandis que celui de Poséidon tient sur 15. C'est une assez bonne illustration arithmétique de la différence entre "gagner du temps" et "adapter correctement". D'ailleurs, il est à mon avis préférable de sauter l'arc d'Asgard, sous peine de saturer devant la répétitivité de la série.


Finalement je suis convaincu que cette adaptation en 114 épisodes aurait pu tenir sur 60 épisodes pour un résultat optimal.


Mais elle aurait néanmoins souffert des défauts inhérents au manga. Qu'on ne s'étonne pas en effet que l'arc du Sanctuaire ait plus la cote que celui de Poséidon : les spectateurs (et les lecteurs) ont compris à la fin du premier que les héros ne meurent pas et qu'un miracle leur permettra toujours de vaincre les adversaires les surpassant. Toute la dimension tragique de l'histoire s'évapore alors (quand j'étais petit, la mort de Shiryû m'avait fait pleurer... alors qu'en fait il réapparaît comme par magie quelques épisodes plus loin). Et à force de voir des miracles on finit un peu blasé...



Infos pratiques



Pour ceux qui voudraient tout de même tenter l'aventure, je leur conseille de regarder en VO, la VF étant très inégale (changements de comédiens, erreurs de traduction). La seule voix que vous regretterez est celle d'Eric Legrand, que je préfère largement en Seiya que le comédien Japonais. Au passage, je vous recommande son site internet, passionnant pour qui est intéressé par le doublage.


Pour les nostalgiques, réécoutez la BO en repassant vos souvenirs de la série, cela vaudra tous les revisionnages du monde. Et si ce n'est déjà fait, regardez la série abrégée de StateAlchemist, l'œuvre d'un fan qui exploite les défauts de l'animé avec malice mais toujours sans méchanceté (n'ayez pas peur de lui donner sa chance, sa technique et son talent s'améliorent au fil des épisodes).

Créée

le 17 mai 2016

Critique lue 2.5K fois

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