Laissez Lucie faire
Je vais d'abord critiquer la série en "oubliant" qu'elle se veut une adaptation d'un merveilleux comics. Parce que ce dernier n'a qu'un succès d'estime, encore plus limité dans les pays non...
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le 7 févr. 2016
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Lucifer, c'est comme un cocktail alcoolisé. On prend un shaker et on mélange. Une pincée de série policière avec un consultant plus ou moins légitime (Castle, Bones, Lie to me, the Mentalist...). Un peu de Supernatural avec la Bible qui se déplace sur terre pour jouer avec les humains. Une dose de comédie dramatique autour des relations amoureuses et amicales.
Si vous aimez le mélange, ça vous plaira.
Mais si vous aimez juste un ou deux ingrédients et que vous ne supportez pas le dernier, ça reste sur l'estomac. En cette fin de saison 3, je fais une crise de foi(e).
Le paradis
L'humour : la série offre un panorama de toutes les sortes d'humour : sarcastique, de situation, de répétition, de soulagement, le référencé, le décalé, l'absurde, le potache, le jeu de mot. Et j'en passe. Un festival qui est la qualité première de Lucifer.
Les personnages très chouettes : Lucifer en tête, bien sûr. Excellent , désopilant, mais aussi émouvant. Il porte la série indéniablement, même s'il interagit avec de très bons personnages secondaires.J'ai beaucoup d'affection pour sa relation avec Dan.
Linda, à la fois posée et maladroite. Gros plus quand est elle bourrée. Ses répliques font souvent mouches. Elle est aussi très touchante dans ses moments d'émotions. Son personnage est bien écrit en toute circonstance.
Dan s'en prend plein la tronche. Considéré comme un éternel dernier, perdant dans sa vie professionnelle, sociale et amoureuse, il est un très bon pivot comique et dramatique. Je regrette qu'il soit trop en retrait depuis la fin de l'arc Malcolm.
Amenadiel est touchant dans sa maturité d'une part et sa candeur enfantine de l'autre. En quête de reconnaissance, il incarne cet ange persuadé de sa position divine mais attendri par les humains.
Pierce est très mystérieux.
Saison 3 : En dehors de son amourette très rapide avec Chloé, un peu téléphonée pour le coup, il est profond dans son rôle de Caïn, qui joue un double jeu avec les mortels et les êtres célestes. Il ne se perd pas dans des questionnements existentiels. Et charismatique avec ça.
Chloé ne parvient pas à me convaincre en tant que flic d'action. Son côté enquêtrice investie est plus réussi. Sa relation avec Lucifer est intéressante. Cependant je la trouve trop "gentille" avec les autres, quelques soient les circonstances. Elle manque de mordant.
La mythologie : le traitement des personnages bibliques est intéressant (même si certains comportements peuvent paraître contraires à l'idée qu'on pourrait de faire d'eux). On attend avec impatience l'arrivée d'un petit nouveau. Les visites aux enfers sont trop rares ! L'image qu'on y donne est très différente de celle de l'imaginaire collectif. Verra-t-on un jour le purgatoire et le paradis ?
Le purgatoire
Intrigues en dents de scie : Les intrigues font le grand écart en terme de qualité. D'un côté, le pénible "L'enterrement de vie de jeune fille". De l'autre, le double épisode "Poignée d'amour"/"une belle journée pour mourir". Malheureusement, on flirte plus souvent avec le style du premier que le suspense du second.
Saisons inégales : La saison 2 propose un double épisode digne d'une fin de saison. Deux très grands moments en 18 épisodes.
Au contraire, la saison 3, plus longue, ne bénéficie pas de vrai élan de mi-saison. Et quand on arrive au cliffhanger de la saison 3 (ô joie moment très attendu de la série !), on nous fait le coup du soufflé qui retombe. Les deux derniers épisodes de la saison 3 : un filler sur Ella qui ne tient pas compte de l'épisode précédent (pourquoi ne l'avoir pas mis avant le 23 ? Ce choix n'a aucun sens !) et un "what if", un monde alternatif. Voilà qui calme votre joie de tantôt. J'ai plus envie d'aller me coucher que de regarder la suite.
L'univers LA / Hollywood : on peut voir cela comme une critique de la société dévoyée de Los Angeles. Des dérives de l'argent et du luxe. Je regrette certaines enquêtes moins bling-bling de la saison 1, montrant la face cachée de la Californie. Soit le traitement des pauvres et les démunis, qui soulève de vraies problématiques sociales à l'heure actuelle aux USA.
Néanmoins j'adore voir et revoir la ville ou les environs avec leurs photographies splendides de transition.
Mise en en scène : Certains choix de mise en scène handicapent l'immersion dans la série. Au lieu de me laisser guider par le récit, je tique sur un acte qui me rappelle que tout est artificiel.
L'exemple le plus parlant est une scène où Chloé explique les détails de son enquête à Ella, dans le commissariat, tout en marchant. Aucun contact visuel entre les deux. On sent derrière cette scène :"Ok, Lauren, tu dois aller du point A au point B en faisant face à la caméra. Aimée, tu la suis mais en restant au même niveau qu'elle. Vous vous arrêtez au gaffer et là vous vous mettez face à face. Ça tourne !". C'est aussi refroidissant que de lire un livre et de se dire :"Tiens, il y a de l'encre et du papier".
Dans le même ordre d'idée : les protagonistes n'ont aucune connaissance en dehors de leur microcosme. Ils tombent amoureux entre eux. Ils ne sont amis qu'entre eux. Ils ont même des liens avec les enquêtes qui, oooh comme par hasard, sont attribuées à Chloé ou Dan (les seuls flics de la LAPD). Ah, Los Angeles... Un vrai petit village.
Il faut toujours que les personnages soient au centre même quand ça n'a pas de sens. Illustration : Ella enquête sur une scène de crime à Las Vegas, loin de sa juridiction. On l'a laisse faire. Mieux, on s'éclipse de la scène. Pourquoi ? Parce que c'est un personnage de la série.
Saison 3 : Et pourquoi ne voit-on le procureur à la LAPD qu'à partir de la saison 3 (qui du coup y est toujours fourré comme s'il y bossait H24) ? Depuis que c'est Charlotte, pardi ! Et bien-sûr, elle ne vient au commissariat que pour des enquêtes relatives aux héros. Logique, dans un sens, vu que ce sont les seuls flics de la LAPD (#troll).
L'enfer
Maze. Quand on veut créer un personnage "bad-ass", on fait en sorte qu'il le soit jusqu'à bout. C'est bien beau de se proclamer bourreau ultime, de menacer tout le monde en fronçant les sourcils et de s'habiller en cuir. Mais quand on dit :"je vais te tuer" trente fois sans le faire, qu'on pose le couteau sur la gorge et qu'on ne fait rien... on est juste minable. Quant à ses états d'âme... A part des moments d'amour vrai et d'amitié -un démon bourreau, le pire de tous, pour rappel - elle est en colère pour des raisons dignes d'une diva en manque d'attention. La psychologie de ce personnage est réduite à ce concept.
Trixie : Elle est psy, conseillère en amour, admiratrice d'armes blanches et de faits divers macabres. Et elle a moins de dix ans. Heureusement que Chloé n'a jamais voulu prétendre qu'elle voulait protéger sa fille des horreurs de son travail. Ce serait un comble. Trixie est une enfant-actrice à qui les scénaristes ont donné des lignes de dialogue d'adultes. Le pire est qu'ils essaient de nous faire croire que c'est un enfant surdoué. Pure paresse d'écriture.
Les enquêtes policières prétextes : Le déroulement et la conclusion des enquêtes ne permettent pas de se suivre le cheminement de la réflexion. Beaucoup d'épisodes se finissent par un personnage "random" qui se trouve sur le chemin du coupable et qui dit :"je sais tout". De nombreuses déductions durant l'investigation sont trop cousues de fil blanc ou incompréhensibles. Ce n'est pas une série policière : c'est une série qui utilise un contexte policier pour placer les relations avec les personnages.
Ficelles scénaristiques en dépit du bon sens : La série déborde de ce problème.
Où Linda a-t-elle suivi ses études en psychiatrie ? Toute personne qui en connait un minimum sur le sujet sait qu'une thérapie ne peut pas être efficace quand on est intime avec le praticien. Or Linda reçoit des amis ou d'anciens partenaires sexuels. Très pro.
Un policier qui enquête seul sur une affaire à risque. Bien sûr, sans cette possibilité, il n'y aurait pas de série. Il fallait un duo Chloé/Lucifer. Mais se rendre chez des criminels seul avec un consultant qui n'a a priori aucune compétence pour se défendre, c'est plutôt irresponsable. Elle laisse aussi Lucifer polluer une scène de crime en le laissant fumer son joint.
Une scène de crime analysée par une seule technicienne de la scientifique. Des flics et des cordons pour maintenir la foule, ce n'était pas possible ?
Chloé est une mère irresponsable.
Elle laisse Maze faire des choses inconvenantes en présence de son enfant. Elle la gronde un peu et elle s'excuse même de la gronder. Sans parler des moments où Lucifer corrompt la petite fille à coup de dollars pour obtenir des services. Chloé laisse couler. Dépêche-toi de reprendre en main son éducation au lieu de la laisser entre les mains de Maze et Lucifer ! Dis quelque chose ! Arrête de vouloir ménager ces deux-là et occupe-toi de ta fille et des valeurs que tu veux lui transmettre, bon sang !
Charlotte et Ella :
Ella est remise en place face à son supérieur. Elle se confie à Charlotte, qui va aller la défendre avec véhémence auprès du vilain Pierce qui lui a crié dessus. Sauf que Charlotte, en grande avocate compétente, a oublié ce qu'on appelle, dans le métier, le savoir-être. Ella a dépassé les bornes en gueulant de joie dans le commissariat et en manquant de respect envers Pierce qui a tué un être humain. Un geste qui n'est pas anodin, même quand on est flic.
**En Bref **
La série est sympathique. Ce n'est pas un immanquable, car elle a plus de défauts que de qualités. Elle tient le pari de divertir. Mais comme un cocktail alcoolisé, à regarder avec modération.
Édit saison 4 : j'aurais dû faire une pause à la saison 3. La série continue sa descente aux enfers. Je passe d'une note de 6 à 5.
Créée
le 15 nov. 2020
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