Paroles du quotidien

Dans une société où il est question de toujours consommer, de toujours plus posséder, notre quotidien se voit être envahi par une multitude d’objets divers et variés. Ces objets, nous les avons, nous les utilisons, nous les jetons, nous les oublions… ils sont là autour de nous, inanimés. Et si lorsque l’on sortait de la pièce ils se mettaient à discuter ?

C’est le fil rouge de la web série «Objectivement» réalisée par Grégoire Sivan et Mikaël Fenneteaux, deux réalisateurs/monteurs issus de la FEMIS, et diffusée sur Arte Creative à partir du 24 août 2015. La série comprend une saison pour le moment, avec un total de quarante épisodes en libre visualisation sur internet, chaque épisode ayant une durée courte d’environ deux minutes.

Pour le pitch de départ, rien de plus simple : un ensemble d’objets faisant parti d’un intérieur se mettent à agir et interagir entre eux lorsque le propriétaire, un trentenaire célibataire nommé « LUI » n’est pas présent.
Les caractéristiques des personnages sont dictés directement par leur utilisation, leurs aspects physiques, leurs spécificités, associés à des archétypes du quotidien avec par exemple un savon de Marseille à l’accent du sud bien affirmé et aux tendances xénophobes. La série propose des décors variés pour mettre en scène une multitude d’objets, avec plusieurs rôles récurrents : dans la chambre à coucher, la lampe, le réveil, et autres objets environnants discutent des habitudes de leur propriétaire en termes de relations sentimentales, pendant que dans le salon le cendrier tente de séduire la bougie, et que la télécommande est en pleine crise existentielle.
Il est question d’aborder des thèmes de la vie quotidienne avec une grande diversité, que ce soit la sexualité, l’immigration, le sectarisme ou bien l’obsolescence programmée.

Mais ce qui fait la spécificité de cette série c’est sa réalisation entièrement en stop motion, source de défis à relever par l’ensemble de l’équipe technique.
Sur la base d’un storyboard puis des voix enregistrées, la série nécessite l’intervention de plusieurs marionnettistes pour créer bras articulés et « rig », squelettes artificiels, afin de faire tenir les objets pendant les prises de vues, puis des animateurs pour les animer en créant des mouvements fluides, image par image. Un travail de post-production est ensuite réalisé pour dissimuler tous les éléments de structure afin que le spectateur ait bien l’impression que les objets s’animent d’eux même.

Avec une écriture très fine en amont, et une réalisation d’une grande qualité, les objets personnifiés se font miroirs de nos propres interactions sociales. En partant de clichés pour mieux les dénoncer, et bien sûr en passant par le rire, « Objectivement » permet de passer un bon moment tout en réfléchissant aux différents signes visuels qui nous entourent et fondent notre société de consommation.