Oz
8.4
Oz

Série HBO (1997)

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Oz, Oz, Oz…

Combien de fois ai-je pu prononcer ces deux petites lettres ces dernières semaines, au point qu’elles en deviennent mes préférées.

Oz, la série.

Je la connaissais depuis longtemps, bien sûr ! De nom. Et puis j’ai décidé de m’y mettre (en fait, la présence de Kirk Acevedo dans le show m’a décidé). Il n’est jamais trop tard, non ?

Tu parles !

Ca faisait 15 ans que j’étais passée à côté de ce bijou de la télé. Je ne l’aurais très certainement pas savouré de la même manière à l’époque, certes (après tout, j’avais 11 ans), mais je regretterais presque d’avoir tourné aussi longtemps autour de ce phénomène sans jamais y plonger.

Oz, c’est un concentré de tout ce que je peux aimer en terme d’art : réalisme, humanité, vérité. Rassemblement de seconds rôles et de méchants, qui plus est. Quand je lis un livre, je m’attache toujours plus aux personnages secondaires qu’au héros. Là, il n’y a pas de héros ! Quand j’écris, j’articule toujours mes personnages autour de leurs défauts. Là, il y en a un tel panel que j’avais presque oublié que certains pouvaient exister.

Oz, ça se passe dans une prison. A part les flashes-back sur les raisons des incarcérations des prisonniers, la caméra, prisonnière elle aussi, ne franchit jamais les murs. Un huis-clos, donc. Certain grinceraient des dents en se disant « ouuh ça va être chiant ! ». En fait, le huis-clos est le format idéal pour exacerber le message passé par le créateur. Ici, c’est une arène à la psychologie dans son état le plus brut. Les sentiments sont tels des diamants qui n’ont même pas encore été caressés par le regard de l’homme. Et tout y est ! De la haine à l’amour en passant par la peur, la frustration, la colère, la joie (oui, oui), la tristesse, la découverte, la lassitude, etc., dans leurs plus grands retranchements. Tous ces sentiments amènent à l’inéluctable : la mort.

Finalement, Oz n’est rien d’autre qu’un concentré de nos vies, le défouloir de notre inconscient. Oz, ça pourrait être notre cerveau. Les personnages sont autant de variations de nous-mêmes que l’on ne peut se permettre de distiller qu’à petites touches sous peine de finir, nous aussi, derrière les barreaux.

Mais loin de nous faire uniquement réfléchir sur nous-mêmes, Oz a également une portée sociale – voire philosophique – amenée par le narrateur, et également détenu, Augustus Hill. Il illustre le quotidien des prisonniers de Oz par des concepts abstraits, des statistiques, des informations historiques, juridiques ou tout ce que vous voulez. Derrière ces petites coupures narratives, il y a toujours un message, qu’on se prend à analyser même après avoir éteint la télé. Pour ça, Oz ne se regarde pas en une seule fois.

Et puis il y a les personnages. Ah, les personnages ! Toutes les intrigues tournent autour de l’évolution-même des personnages (et non pas l’inverse), donc il est strictement impossible qu’ils restent statiques. Impossible de s’ennuyer, alors ! On se prend tour à tour à les aimer, les détester, avoir de la peine pour eux ou souhaiter qu’ils meurent au prochain épisode.

Tom Fontana, le créateur de la série, est connu dans le milieu pour n’avoir aucun scrupule avec ses personnages. Les rôles qui nous paraissent essentiels peuvent brusquement disparaître au milieu du film et on se retrouve comme un con, la bouche bée, jusqu’au générique de fin, sans avoir réalisé encore ce qui s’était passé. Il est fortement déconseillé de tenir les pronostics, à moins d’avoir un goût particulier pour le danger. Fontana nous surprendra toujours !

S’il n’y a pas de héros dans Oz, la série s’articule néanmoins autour d’un certain nombre de personnages piliers (et pas pour autant vivant jusqu’au bout, je vous aurais averti !) :

Le personnel de la prison, avec Léo Glynn, le directeur, Tim McManus, à l’initiative d’Emerald City (le quartier dans lequel se passe la plus grande partie des intrigues, sorte de petite ville de verre où les prisonniers ont plus de liberté que dans les autres quartiers, mais où ils sont également plus étroitement surveillés par les gardiens.) ; la sœur Peter Marie et le père Mukada, le docteur Nathan et quelques matons plus ou moins importants.

Et les prisonniers, Miguel Alvarez le malchanceux, Ryan O’Reily le manipulateur, Vern Schillinger le nazi, Kareem Said le prophète, Tobias Beecher la victime, Augustus Hill la Suisse – et le narrateur, Adebisi le fou furieux, et tous les prisonniers qui évoluent avec plus ou moins d’importance autour de ce cercle.

La loi de la jungle règne à Emerald City, où les gangs jouent des coudes pour avoir la mainmise sur les différents trafics de la prison, et où, individuellement, les personnages sont prêts à tout pour survivre… A tel point que ça conduit plus souvent à leur mort. Certains personnages, par le jeu de l’acteur, par leur histoire, nous accrochent plus que d’autres.

Miguel Alvarez, par exemple. En toute objectivité ! J’ai commencé à suivre la série parce que Kirk Acevedo, mais j’ai fini par tomber amoureuse de Kirk Acevedo parce que Miguel Alvarez. Le personnage le plus paumé de la série, et aussi celui qui a la plus grande évolution. Malchanceux dès la naissance – pour avoir vu le jour là où ça le conduirait inévitablement derrière les barreaux – il est l’exemple-même de la victime de la société. Il ne rêve que d’intégration, d’amélioration, mais il est sans cesse rejeté. Toujours mis à l’épreuve, l’épée de Damoclès vacille au dessus de sa tête en sifflant « tue, ou tu seras tué. » Le jeu tout en tension de Kirk Acevedo, qui pète des câbles comme personne d’autre (à qui je décerne l’award de celui qui hurle le mieux), ajoute grandement à l’intérêt du personnage.



A l’inverse, Augustus Hill – incarné par Harold Perrineau bien connu pour son rôle de Michael dans Lost, issu des quartiers pauvres comme Alvarez (et comme 95% de la population Ozienne d’ailleurs), a réussi à s’imposer, brebis dans un monde de loups, sans jamais adhérer à un quelconque conflit. Ce qui le fait survivre à Oz, c’est sa volonté de rester clean, dans tous les sens du terme, et il n’a pas peur de se mettre à dos certains leaders pour garder sa place d’élément le plus neutre de la prison. Sans en avoir l’air, il est l’élément le plus sage de la série, au sens noble du terme.

Je pourrais aussi faire un paragraphe sur chacun des personnages tant il y en a à dire, aussi bien pour ceux qui sont en avant de la scène que ceux qui sont à l’arrière. Parce qu’une des propriétés d’Oz, c’est que cette série, tellement riche, donne envie d’en parler.
Octobell
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le 4 déc. 2012

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Octobell

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