Oz
8.4
Oz

Série HBO (1997)

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Une section spéciale de la prison d'Oswald (Oswald Correctionnal Facility dite "Oz") est l'objet d'un projet de réinsertion baptisé "Emerald City" ("Em' City", "Em'") où les détenus sont à la fois plus libres d'interagir et constamment surveillés. Tim McManus en est le gestionnaire zélé et idéaliste, toujours convaincu qu'au plus profond du plus endurci des criminels, il y a un soupçon d'humanité. Pourtant, les détenus s'acharnent pendant six saisons à lui prouver le contraire. En effet, série pessimiste et intense, Oz est un catalogue d'exactions et de violences : viols, meurtres, chantages et rapports de force en tout genre. La fiction sera précédée d'un avertissement parental et interdite aux moins de 18 ans à peu près partout dans le monde. Première production intégralement financée par HBO, la dramatique de Tom Fontana (St Elsewhere, Homicide) vient opportunément rappeler que les États-Unis (avec la Russie, l'Ukraine et la Chine) mènent une politique sévère d'incarcération systématique. Et gardent une part importante de leur population (notamment noire et hispanique) sous les verrous. Les taux de récidive sont parmi les plus élevés et la brutalité de la vie carcérale américaine est proverbiale. Mais le propos n'est pas seulement réaliste. Pour les scénaristes, c'est aussi l'occasion de recréer une micro société primitive, sauvage, quasi exclusivement masculine. On y retrouve des groupes sociaux antagonistes ou complémentaires : musulmans, gangs, mafia, irlandais, chrétiens, racistes et même motards. Les relations entre eux sont seulement beaucoup plus agressives.

On comprend l'intérêt de HBO pour qui il s'agit quasiment d'une profession de foi : tout est permis, on peut tout voir (on est sur le câble) : sexe ("a penis system more than a penal system"), sang, drogue, racisme, etc. Et de fait, on n'a jamais vu cela. Tournée de manière chorale, l'intrigue rebondit d'un personnage à un autre, sans jamais d'espoir ou de rédemption. La religion est instrumentalisée, la concupiscence est partout, et la morale, nulle part.

Ce qui pourra faire dire à certains esprits chagrins que tout cela est un peu systématique. Pas faux. Mais à mon sens, cela ne remet jamais en question la cohérence d'Oz qui repose sur une esthétique, radicale certes, mais crédible et travaillée de la violence à la télévision. La construction du récit, toujours précédée de la petite fable et des explications d'Augustus Hill (ancien dealer et meurtrier, l'un des seuls à garder une once de morale) est impeccable, le jeu des acteurs, efficace. Les allers-retours entre l'univers des prisonniers et celui des gardiens est très probant dans sa continuité déprimante.

Chronique noire qui parodie le genre tragique, Oz est aussi une réécriture ironique de certains thèmes du Magicien d'Oz de L. Frank Baum. Son titre, bien sur, est une référence explicite, de même que le nom de la section spéciale dirigée par MacManus, "Emerald City" ("la cité d'émeraude", but du voyage de Dorothy).
Mais également l'une de ses phrases emblématiques : "it's not a place like home", reprise dégradée du célèbre "there's no place like home" de Dorothy. Ce jeu de clins d'œil est moins vain qu'il n'en a l'air. Oz est comme Oz : un endroit où tout est possible. Au classique jeunesse, les couleurs vives. À la série de HBO, le noir et le gris. Ce nouvel Oz, parfois insoutenable, est donc la réplique du premier, mais pour les adultes et pour la télévision.
Tibbar
9
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le 14 août 2013

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