Les p'tits enfants d'la France

Je suis du Nord. Non mais je préfère le dire tout de suite parce que forcément mon point de vue est plus orienté vers cette culture nommée "ch'ti" qui envahit depuis quelque temps le devant de la scène, et pas que par le bon bout...
"P'tit Quinquin", ça fait des mois que je l'attends. Des critiques dithyrambiques et une bande annonce alléchante m'ont convaincu avant de voir la première minute du premier épisode. Du coup, j'étais en attente, je me suis fait une idée de la chose et voilà ce que j'en ai pensé finalement.

Mon avis sur la mini-série de Bruno Dumont est ambiguë. C'est un peu "je t'aime moi non plus".
J'ai adoré la réalisation, les plans, la photographie, la gueule des comédiens, l'émotion de certaines scènes et au réalisme de cette culture rurale patoisante. Mais par contre, je n'ai pas accroché aux dialogues des deux premiers épisodes, au jeu trop "amateur" et limite gênant de certains personnages. Et pourtant quel final !!

La perspective de montrer de façon "loufoque" et décalée une réalité pesante du monde rurale de la France d'en bas n'est pas chose facile, déjà à faire accepter. On peut trouver et je le comprends parfaitement, que c'est grossier, facile et pas très subtile de filmer les paysans, les gens simples de notre terroir. Mais la force de Dumont, c'est de se concentrer sur un microcosme identifié par un accent et une sympathie générale. Les gens d'ici-bas sont beau, ils ne sont pas des gens qui passent à la télé pour trouver l'âme sœur. Ils vivent comme vous et moi, ont les mêmes préoccupations et ne sont pas bêtes pour autant. Leur quotidien est juste différent et leur richesse est là où les citadins que nous sommes majoritairement ne s'attendent pas. Finalement, leur monde est le notre, les clichés sont les mêmes, les résultats identiques.

Et je remercie Dumont d'avoir choisi cette région en particulier. Pour avoir tâté du terrain dans le coin, je peux dire que l'image que l'on se fait du Boulonnais, de ces affaires de pédophilie, de cette injustice, de cette misère sociale est biaisée. Les gens de là-bas sont majoritairement des personnes touchantes et bienveillantes, qui souffrent énormément de l'image qu'on rend d'eux. Porter à l'écran des personnes certes caricaturées mais vraies, est une aubaine et une grande valeur.

Je le prends pour moi aussi. On n'est pas des ch'timis, on est des Français qui ont un accent patois, certains en font leur langue mais chaque territoire à ces variantes. Mon patois n'est pas le leur, le vôtre non plus (sauf si vous venez de Boulogne-sur-mer bien sûr), et pourtant on s'y retrouve. On se retrouve dans ces temps de jeunesse à vadrouiller et à s'ennuyer entre amis sur nos vélos, dans ces paysages de campagne en vacances, dans ce silence apaisant à peine interrompu par le chant des oiseaux ou le bruit des animaux, dans ces rencontres parfois étranges face à des personnes atypiques.

Finalement, on rit ou on ne rit pas, mais on se prend au jeu de la lenteur, du temps réel qui nous pousse à nous poser la question de la vie tout simplement, de ce que nous vivons qui n'est pas virtuel.