Gangs of Birmingham
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Ma critique pourrait s'appliquer à bon nombre d'autres séries TV contemporaines d'aventures, drame ou thriller, puisqu'elle essaie d'analyser une évolution globale qui décidément me frappe, et dont "Peaky Blinders" est pour moi le dernier exemple en date.
Depuis une quinzaine d'années environ, l'audiovisuel et en particulier l'univers des séries, dynamisé par l'émergence de la VoD, s'est progressivement tourné vers des scénarii mettant en scène des anti-héros comme personnages principaux. L'émergence de ces protagonistes a certainement été profitable : leurs personnalités sont plus complexes, plus nuancées, donc plus proches de la réalité. Cette évolution est sans doute une réaction vis-à-vis d'une trop longue époque où nos héros étaient sans peur et sans reproche, à l'image d'un Tintin, mais qui apparaissent à la longue un peu mièvres. Finis "La petite maison dans la prairie" et "Sept à la maison", place aux anti-héros !
Pour autant cette tendance m'interroge : ces héros des temps postmodernes doivent-ils devenir une généralité et une référence ?
Je n'ai pas une immense culture des séries, mais honnêtement je ne vois quasiment plus que ça : des personnages certes charismatiques - à l'image ici de l'excellent Cillian Murphy -, à la personnalité mystérieuse et trouble, mais uniquement guidés par leur ego ou leurs ambitions personnelles. Les exemples sont légion.
Ce sont des personnages qu'on ne peut pas juger, plus aucun ne portant l'étendard du bien ni du mal... Mais in fine, il ne reste bien souvent plus que le mal, ou le médiocre.
On me répondra qu'il y a actuellement, au contraire, un regain d'appétit pour les films de super héros. Le héros par excellence ! Oui mais voilà, l'un des derniers blockbusters du genre, "Deadpool", a justement marqué un virage frappant : Deadpool est précisément un anti-super-héros. Cynique, individualiste, violent, luxurieux, sans repentir ni conscience du bien commun... Deadpool est le parfait super-héros postmoderne.
Ajoutons à cela un second constat : on sait que Netflix se sert de ses algorithmes non seulement pour recommander des visionnages à ses clients, mais aussi, désormais, pour sélectionner les scénarii de ses prochains projets de production. Il faut que chaque épisode ait sa bonne dose d'ingrédients pour plaire au plus grand nombre : un peu d'action, de violence, de sexe, d'intrigues avec personnages à la répartie aussi impeccable qu'improbable, de diversité, d'outrance, de coups bas, etc. L'algorithme aboutit en effet, fatalement, à sélectionner les aspects qui flattent les plus bas instincts du consommateur. Les émotions de la tripe, et non du cœur.
Le tout, il faut l'admettre, est très bien enrobé grâce au travail de la fine fleur des techniciens du cinéma : la photographie est propre, la mise en scène léchée avec quelques bonnes trouvailles, le montage haletant. Je dis bien techniciens, puisque mêmes les réalisateurs, la plupart du temps, se succèdent sur une même saison. La fiche SC du "Bureau des Légendes", par exemple, donne l'impression qu'Eric Rochant en est le seul réalisateur, alors qu'il en est en réalité le "showrunner", à l'américaine, sorte de chef d'orchestre d'un groupe de réalisateurs.
Tous ces processus, aussi rodés soient-ils, sont d'ordre industriel, alors que le cinéma est fondamentalement un artisanat. En sortent des séries blockbuster, calibrées pour plaire au monde entier et qui sont d'excellents produits culturels de consommation. Mais à mon sens, la négation même de l'Art.
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PS : dans ce registre, "Peaky Blinders" est plutôt une série réussie, qui ne mérite pas que ma critique tombe sur elle, mais il se trouve que c'est mon dernier visionnage en date... "House of Cards", "Game of Thrones", "Rome", "Marseille", "Versailles", "True Detective", "The Affair", "Big Little Lies", "Casual" et autres, auraient été plus adaptés.
Créée
le 15 mars 2018
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