Scream
5.6
Scream

Série VH1, MTV (2015)

Lorsqu'on s'attelle à l'adaptation en série télé de la saga culte Scream, initiée en 1996 par le déjà regretté Wes Craven, quels sont les ingrédients principaux obligatoires ? Une petite ville un peu paumée, une poignée d'ados, un tueur masqué traquant lesdits ados en leur passant des coups de téléphone avec une voix bizarre et qui se révèle au final toujours être plus ou moins lié à l'héroïne principale. Mais ce n'est pas tout ; il y a aussi, à un niveau plus conceptuel, tout ce qui faisait le sel de la saga de films, à savoir qu'ils étaient de grosses mises en abîmes de films d'horreur, et plus spécifiquement du sous-genre du slasher. Si Scream: The TV Series a bien réussi à rassembler tout ces ingrédients, elle peine cependant beaucoup à les mélanger et les préparer correctement.


Lorsqu'on regarde le(s) premier(s) épisode(s) de la série, nous ne sommes normalement pas perdus. La première scène de la série, avec Bella Thorne, fait bien évidemment écho à celle de Drew Barrymore dans le premier film, et on peux plus ou moins attribuer un "équivalant cinématographique" à une bonne partie des personnages de la série. En gros, passée la surprise du costume bizarre du tueur, tout est fait pour qu'on se sente en territoire connu.
La série adopte même le postulat des films selon lequel les personnages savent que les situations auxquels ils sont confrontés pourraient être tout droit sorties d'un film d'horreur et s'amusent donc constamment des clichés de ces derniers. Ainsi, si le speech "You can't do a slasher movie as a TV series" prononcé par Noah (bien évidemment l'équivalent télé du personnage de Randy) semble un peu forcé et pas des plus subtils, il a au moins le mérite d'être présent. Les premiers épisodes proposent quelques passages assez goûtus de ce point de vue là ; bien évidemment les personnages sont tous des sériephiles comme vous et moi et ne manquent pas une occasion de citer toutes les séries les plus populaires du moment, de The Walking Dead à Game of Thrones en passant par Hannibal, American Horror Story et How To Get Away With Murder. Par exemple, moment assez drôle dans l'épisode 2 quand la série tacle gentiment Pretty Little Liars et ses procédés d'écriture (surtout quand on sait que Lucy Hale, actrice principale de PLL, a joué un petit rôle dans Scream 4.)


Un problème que l'on remarque assez vite en regardant la série est qu'effectivement, comme l'avait prédis Noah, il est impossible de retranscrire en 12 épisodes de 40 minutes le rythme d'un slasher movie d'une heure et demi. Les morts ne s'enchaînent pas (n'en attendez même pas une à chaque épisode) et on sent que la série souhaite que les meurtres soient plus émouvants et/ou choquants que dans un film dans le sens où l'on apprend à mieux connaître les victimes. Elle n'y arrive cependant pas dans la mesure où la série rechigne à tuer les personnages les plus aimés par les spectateurs, les "fan favorites", et se rabat donc souvent sur les personnages "de seconde zone". Si ce n'est pas forcément la première série à tomber dans ce piège, c'est spécialement problématique pour une série se voulant être un "slasher".
Tout cela fait que souvent, et plus spécialement dans la saison 2, le tueur semble être plus souvent en train de torturer mentalement et de jouer avec ses victimes plutôt que de... eh bien, les tuer. Mais vu qu'il faut tout de même remplir les saisons avec une certaine dose d'hémoglobine, on fait mourir les personnages principaux oui, mais dans des scènes de rêve toutes plus ridicules les unes que les autres.


Scream: The TV Series oublie également assez vite le petit côté méta présent dans les trois ou quatre premiers épisodes pour se rabattre sur du name dropping et des références comme on en voit partout ailleurs ; ce qui devient sans aucun intérêt ni aucune utilité. Le pire étant que dans la saison 2, il ne s'agit même plus de name dropping de séries TV mais presque qu'exclusivement de films d'horreur, ce qui annihile l'intérêt même d'avoir au départ fait de Scream une série TV.
Si il y en avait bien quelques unes dans la saison 1 ("I will NOT be right back"), la saison 2 abuse énormément des références à la saga de films de Wes Craven. Conséquence du récent décès de ce dernier ? Peut-être, mais cela n'en reste pas moins extrêmement maladroit. Car si les films originaux avaient trouvé un moyen scénaristique ingénieux de s'auto-référencer par l'intermédiaire des films fictifs Stab, qui étaient basiquement des adaptations cinématographique de ce qui arrivait réellement à Sidney & Cie., la série ne dispose pas d'un tel procédé et donne carrément l'impression que ses personnages ont VU les films Scream de Craven, ce qui est un problème dans la mesure où ils partagent le même titre. Tout cela sans compter le nombre important de situations reprises directement de la tétralogie originale. Entre hommage, référence et manque réel d'inspiration, il n'y a qu'un pas.


Au niveau du scénario et de l'histoire, il faut bien dire que la saison 2 est un foutoir. La saison 1 à côté, sympathique sans être exceptionnelle, semble pourtant être un modèle de fluidité. En effet, le déroulement de la saison 1 tient debout, et peut-être même un peu trop quand on sait qu'il est difficile d'arriver vers l'épisode 7 ou 8 et ne pas déjà connaître l'identité du tueur (ce qui est un autre problème au fait d'adapter Scream en série TV ; ça dure tellement longtemps que l'on peut énormément théoriser chaque semaines entre les épisodes jusqu'à arriver au final à la réelle identité du tueur, alors qu'il est beaucoup plus facile de se faire avoir par les twists des films.) Le déroulement de la saison 2 en revanche part dans tout les sens (pas dans le bon sens du terme), enchaîne les situations "over the top" et l'on a réellement l'impression que les scénaristes eux-mêmes ne savent pas où ils vont. Conséquence directe ; au final on se retrouve devant énormément d'incohérences et de plot holes. Tout cela est porté par un casting vraiment limite, avec des performances frôlant parfois le ridicule (notamment pour les tueurs, une fois qu'ils ont révélé qu'ils étaient les tueurs.)


Si l'idée de faire de la saga Scream une série TV n'était pas intrinsèquement mauvaise, forcé de constater que cette dernière s'est malheureusement pris les pieds dans le tapis. On regrette sa maladresse mais surtout sa surenchère. Car si les suites du film Scream de 1996 fonctionnaient plus ou moins, c'est parce que Wes Craven et Kevin Williamson ont eu des choses à dire, dans un premier temps sur les suites, puis sur les trilogies, et enfin sur les reboot/remakes/suites à répétitions. Malheureusement, Scream: The TV Series a vite renoncer à tenir un quelconque discours sur les séries TV et son aspect méta n'aura été que très forcé et superficiel avant d'être totalement abandonné. Il faudra donc en rester à Community.

Qu3ntin
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Créée

le 19 août 2016

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Quentin Rybczak

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