Une guerre générationnelle

Le rachat de la firme de George Lucas a basculé sa série animée dans une tendance avant tout marketing et merchandising, choses à la fois déplorables et nécessaires pour que la saga puisse avoir un meilleur avenir. C’est avec recul que l’on doit aborder cette nouvelle série, dont les fans ne raffolent pas, si leur âme ne s’ouvre pas au renouvellement qu’elle annonce. Essentiellement destinée au jeune public, la série parsème néanmoins des notions qui auront de quoi inviter les initiés à divers débats. On ouvre de nouvelles perspectives quant au culte de la Force et on comble un certain vide que la précédente aventure a laissé en suspens.

La Rébellion est un mouvement visant à se libérer de l’oppression de l’Empire. Mais qu’en est-il des faits ? En quoi cette lutte est une charnière invitant les spectateurs à se positionner derrière leur idéal ? C’est avec méfiance que l’on se garde de développer ces aspects. Les enfants restent la principale cible et il ne faudra pas compliquer la compréhension avant le tour de force, en fin de chaque saison. On passe par le travail d’équipe, des missions périlleuses mais pourtant accomplies sans trop d’accrocs. Tout cela débouche alors vers les valeurs de l’amitié qui règne au sein d’un groupe que tout opposait au départ. Il en fallait pour tous les goûts et c’est pourquoi les personnages principaux font la différence au terme d’un parcours fort en bonnes intentions. La lutte contre les méchants justifie à elle seule la critique d’un régime totalitaire mise en place par un Empire peu accueillant, mais également peu convaincant dans certains manœuvres. Il faut bien accepter que leur puissance soit limitée et que l’on assiste avant tout à une fracture de cette rigidité et cette domination.

En si bon chemin, on ne dresse pas toujours le portrait de l’inconnu, si ce n’est qu’un changement d’angle de vue. Il y a peu de place pour les nouveautés que l’on qualifierait de pertinent, car la plupart des interventions des deux premières saisons ne font que gratter la surface d’un potentiel que la série se garde pour le dénouement. Mais pour nos repères, la série n’hésite pas à replacer des échantillons de la trilogie et de la prélogie afin de mieux situer les enjeux. On comprend alors que l’aventure des jeunes résistants ne s’éloigne pas de la racine de Lucas et des préceptes qu’il a mis en place. D’un côté, nous avons Ezra, le jeune héros qui fera face à la Force et au côté obscur. De ce fait, il est apte à juger objectivement, mais il reste humain avant tout et c’est la première faiblesse que l’on tend de nous faire comprendre. La guerre vue d’un enfant peu mener à la haine ou bien la paix. Dans les deux cas, il faudra se battre pour combler le vide qui lui manque, une sorte de destinée dont le mystère est bien huilé, à défaut d’étirer toute la trame dans une affligeante longueur au fil des saisons.

Mais il y a d’abord l’apprentissage avant d’exploiter toute la maturité du récit associé à la Force. On remonte aux origines de la divinité afin de justifier tant de dialecte de cette entité abstraite et omniprésente. C’est à partir de ce moment, où les méchants héritent d’un charisme majeur et on prend le temps de développer une stratégie, à l’image de l’inébranlable Amiral Thrawn. Toujours une figure emblématique dans l’univers, il sert à présent de tremplin vers la chute de l’Empire et des ressources qu’il met à disposition. On s’accorde alors à cristalliser son rôle comme le dernier rempart avant que l’Étoile de la Mort ne soit inaugurée. On se régale, mais on grimace tout de même de l’enfantillage qui s’affirme avec insistance par moment. Et entre les clins d’œil adressés aux fans, il est difficile de discerner toute la noblesse de ce que Star Wars constitue à l’origine.

Le rôle de « Star Wars : Rebels » dans toute cette épopée mythologique est avant tout une forme d’accompagnement. Au même titre que « Le Réveil de la Force », cette aventure au cœur de la rébellion sert à convaincre et à sensibiliser le sot qui ne croit pas en la Force et en sa discipline spirituelle. Ainsi, on revisite tout un univers où on y trouve autant de place pour les padawans que pour les maîtres, forgés dans l’adoration d’une saga qui file vers une universalisation. Modeste dans le message, mais peu aguichant comme démarche, qui se voulait privilégier. La série reste tout de même à contempler pour la synthèse qu’elle s’efforce de véhiculer.