The Boys
7.7
The Boys

Série Prime Video (2019)

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Après des années de gavage intensif de films de super-héros - et tout ce que cela comporte de bêtise, de patriotisme exacerbé, de scénarios ultra redondants, de blagues moyennes lâchées d'un air fat, de reboots sans fin de Spiderman, prequels, ramifications à gogo et sorties de films sous haute intensité - On accueillit donc The Boys adaptation BD de Garth Ennis et Darick Robertson avec un grand plaisir. Celui que l'on éprouve devant un rebrousse poil de la mythologie des super héros, s'amusant de leur image quasi christique, en imaginant concretement et avec mauvais esprit les implications de ces castes divines dans le vrai monde.

Evidemment la BD Superman avait déjà imaginé des intrigues où Kal L devait rendre des comptes aux citoyens rapport au fait qu'il pète parfois un mur pour sauver un chat. Mais The Boys est allé plus loin, et c'est non seulement les super héros qui sont exposés sous un jour peu reluisant mais le "star system" Hollywoodien ou sportif.

Dans ce monde, les super héros tirent leur puissance de leur pouvoir, mais surtout de leur célébrité presque plus importante que leurs aptitudes. Et ils ont beau respirer sous l'eau ou tirer des lasers pour leurs orifices, les disgrâces au sein des 7 semblent difficiles à renverser en cas de bad buzz sur les réseaux sociaux.

Les 7 c'est cette association de super héros, qui sauvent le monde en restant coolos, et en collant le plus possible à la fiction, car leurs exploits sont adaptés en film. Sauf que ces célébrités surpuissantes et désinvoltes provoquent morts involontaires et destruction. Ainsi A-Train, tue par accident la petite amie de Hughie (le fils Quaid), un type tout ce qu'il y a de plus normal. Endeuillé et désireux de se venger il est approché par un certain Billy Butcher, bien déterminé à faire chuter cette association qui tire sa puissance de la maléfique corporation Vaught, géant pharmaceutique et du divertissement (?!) qui fait penser à un mélange improbable entre Disney et Monsento.

La saison 1 était drôle, acerbe, ingénieuse, avec peu de longueurs et surtout beaucoup d'humour. Un petit frère de Watchmen en plus fun et moins cérébral. On y trouvait beaucoup d'excellents moments souvent en écho à des histoires familières, avec un bon dosage dans l'action. Le personnage du Protecteur se dévoilant petit à petit. Et ce rapport de force entre humains / mutants puissants, à priori défavorable aux premiers, n'a jamais cassé la vraisemblance du récit.

Bref un bon gros 7 sur 10. Quoi. Il aurait peut-être fallu en rester là.

Car en saison 2, de gros défauts apparaissent. Alors qu'il n'y avait peu de longueur l'année d'avant, on baille plus d'une fois dans la première moitié de saison devant des épisodes allant parfois jusqu'à 1h10 !(l'épisode avec la baleine...), et The Boys semble devenir petit à petit la série dont elle se moquait.

Des intrigues amoureuses sans intérêt bien utiles pour remplir un épisode, une caricature un brin lourde de l’exécutif américain avec le personnage de Stormfront qui envoûte le protecteur (aka la tentation nazi-raciste, tarte à la crème des séries modernes US de Preacher à American Horror story plaçant le nazi parmi les bêtes immondes halloweenesques du genre loup garou, vampire, demon de paranormal activity), et des moments très américains : les personnages qui passent leur temps à s'excuser du fond de leur cœur pour des conneries, (et puis ils se disent qu'ils s'aiment).

A grand taux d'audience, grandes responsabilités

Peut-être victime de son succès, la série devient consensuelle et rend finalement ses super héros appréciables. Ces salauds de la saison 1 sont en fait des personnages qui ont leur raison. A l'exception du Protecteur (qui aura peut-être sa rédemption dans les saisons à venir, je sais pas pourquoi je le sens), et encore, même lui a des circonstances atténuantes.

On se rend compte Deep, le merlu violeur est juste un pauvre gars complexé par ses branchies, A-train n'est pas un meurtrier mais un type sans assurance qui fait des conneries à cause de la drogue, Maeve est mal dans sa peau à cause de son histoire d'amour cachée puis surexposée en produit pour marché LGBT... Il n'y a plus qu'à apprendre que Black Noir est méchant parce que Bègue avec un micro pénis et aura un blanc seing total pour ces types.

Autre détail négatif, l'asymétrie dans la narration entre les deux groupes qui s'affrontent. En saison 1, les histoires de Billy Butcher et de son équipe étaient plaisantes à suivre (la mort de translucide grand moment), en saison 2 les qualités de leurs expéditions sont inégales. Hughie est plus ouin ouin que jamais dans son flirt sans fin avec Starlight, Billy plus fragile et accablé sous le pathos familial (sa femme, son père, son frère défunt... ne manque plus le souvenir de son chien Tobby mort écrasé quand il était en 5e et qui est encore cher à son cœur), le Français parle sa langue maternelle en phonétique (accent mi-canadien ou israélien on ne sait pas trop) La Crème est affublé de TOC pour lui donner de la substance car un Tshirt Run DMC et sa relation avec sa fille n'étaient pas suffisants, et la mutante muette est là pour casser des gueules (girl power) et que ça soit plus gore que jamais.

Et ce côté gore est d'ailleurs trop envahissant. Certaines critiques de la saison 1 regrettaient le fait que la série ne soit pas aussi violente que la B.D. Les créateurs ont pris en compte les remarques, et on se rend compte que cette escalade sanglante n'apporte pas grand chose à l'ensemble. Elle renforcera l'image de série subversive chez certains, alors qu'elle se recroqueville au contraire dans le déjà vu sentimental et le moralisme.

La saison 2 est une déception pour moi. Les créateurs ont voulu brasser large et s'emparer de trop de sujets différents, c'est louable mais ils ne sont pas développés correctement faute de temps : la recherche de rédemption de l'Homme poisson ... qui se perd dans une secte copiée sur la scientologie, l'outing forcé de Maeve et la question de la vie privée des stars (même si cela donne quelques bonnes répliques où le cynisme de la franchise de film est exposée), et la question de la manipulation des réseaux sociaux par les populistes est naïve (la manipulation et le traitement de l'info n'échappe à aucune moulinette politique ou idéologique). Ça part dans tous les sens sans proposer autre chose que des stéréotypes.

Bref, des débuts tonitruants et une rentrée dans le rang contrebalancée par une avalanche gore pour faire illusion. La saison 3 pourrait retrouver un peu l'acidité des débuts dans l'intrigue mais on n'est pas parti pour. Dommage.

SAISON 3

En fin de saison 2, j'espérais - sans trop y croire - un sursaut de la part des créateurs The Boys. Et c'est un peu le cas qui s'est produit, il faut l'avouer, puisque les défauts majeurs que je pointais ont été gommés dans la plus grande partie de la saison 3 : l'amourette entre starlight & Hugh a été réduite à portion congrue, la fragilité émotionnelle de Butcher fait place à l'exact opposé puisqu'il est désormais doté de super pouvoirs qui lui permettent de botter le cul des autres super héros, et les scénaristes se sont moins éparpillés avec les sujets sociétaux (exit la nazie, exit les questions LGBT, la secte de Deep), et seule a été conservée une poignée de situations tragi comiques autour de BLM, des wokes et de l'altright. Bref, les longueurs qui plombaient le visionnage de la saison 2 se sont envolées... sans pour autant que la finesse s'installe dans The Boys

On peut encore déplorer de trop nombreuses scènes absolument répugnantes et gratuites, et des blagues de cul non moins gerbantes (l'épisode 1 avec l'homme qui rétréci et l'Herogasme sont vraiment des trucs à ne pas mettre devant des gamins, c'est quelque chose qui n'est malheureusement pas assez dit au sujet de la série, c'est une série de super héros, mais faut éviter de mettre des enfants devant. Enfin vous montrez ce vous voulez à vos gosses, mais à 8-9 ans je regardais Mcgyver, et j'aurais pas apprécié de voir Antman qui rentre dans l'urètre d'un gars pour le faire ensuite exploser le corps en 1000 morceaux, mais j'avoue que je suis vieux jeu.)

 Et au rayon des problèmes pas résolus, le personnage de Frenchie - qui n'a toujours pas pris la moindre de leçon de français - et Kimiko sont le seul arc narratif poussif de l'ensemble et qui mériterait d'être sabré une bonne fois pour toute. Car l'introduction de Soldier Boy et de l'ancienne caste de super-héros donne un peu d'air frais à l'opposition Vought / les Boys qui piétinait un peu. Homelander vs les butcher boys vs Soldier Boy, ça rend les scénarios moins prévisibles.

Notons que la série repose en grande partie sur la prestation exceptionnelle d'Anthony Starr, le fameux Homelander qui est assurément un des meilleurs acteurs de série des dernières années. Le méchant le plus flippant entraperçu dans une série depuis Varga (David Thewlis dans un genre bien différent) dans la saison 2 de Fargo.

A noter un sérieux coup de mou dans les deux derniers épisodes et une tendance à retomber dans les travers susmentionnés. Mais la saison 3 redresse quand même pas mal la barre.

Negreanu
7
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le 11 juil. 2022

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