Noir c'est noir, il n'y a plus d'espoir
Diffusée par HBO 2 ans avant l’excellentissime The Wire, The Corner est une mini-série de 6 épisodes adaptée et inspirée de l'ouvrage “The Corner : A Year in the Life of an Inner-City Neighborhood” par David Simon et David Mills. Mêmes créateurs ? Oui, mais mode opératoire différent ; résumer ces 6 heures de programmes comme un ersatz de The Wire serait une erreur, car là où la meilleure série de tous les temps déployait sa vision tentaculaire de la ville de Baltimore, The Corner se limite à retracer fidèlement le quotidien d'un quartier pauvre vampirisé par la drogue. La plongée s'opère, et ce de manière quasi documentaire, au sein des pérégrinations morbides d'une famille noir-américaine : descentes policières, achats et consommations de drogues, cambriolages, règlements de comptes, petits boulots, etc. Une vie désespérée retranscrite avec force et réalisme par Simon. Tout le savoir faire et la puissance de narration de cet ancien journaliste s'offre à nous, toujours juste dans la retranscription de la violence et du désespoir de cette monotonie infernale, obsédée par le besoin de se soulager de toute souffrances, de fuir le monde réel.
Telle une lessiveuse, les personnages de The Corner s'engouffrent dans cette spirale destructrice et ressassent le passé (via des flashbacks) ou décrivent les douleurs (via des interviews de rue), comme pour mieux extérioriser une réalité cruelle mais pourtant évidente. Le format mini-série, en parfaite adéquation avec le but recherché par Simon, ne fait pas l'erreur de trop s'éterniser dans le nihilisme et le glauque et finit par apporter la conclusion intelligente d'un sujet dont il semble le seul à s'intéresser.