The Handmaid's tale ressemble à un épisode de Black Mirror de 8 heures sur le thème de l'extinction de l'humanité - extinction liée à une baisse de la fertilité. Les méchants sont incarnés par une société religieuse et sa milice ultra-violente, les gentils sont incarnés par les femmes fertiles. Pour résumer, les "méchants" ont pris le pouvoir par les armes afin d'encadrer la société et forcer les "gentils" à pratiquer une forme de GPA musclée, habillée d'un peu de bigoterie. À partir de ce point de départ, le scénario suit l'histoire d'une servante et parle, à travers elle, de la condition féminine au sein de l'état fasciste et patriarcal qui a été mis en place.


Parler de féminisme et du droit des femmes à disposer de leur utérus dans un contexte où la race humaine n'arrive plus à se reproduire, cela semble un peu casse-gueule : à vrai dire, ce serait comme parler du droit des arbres pendant la seconde guerre mondiale ou de véganisme pendant la grande famine... Sur le papier, tout le monde est d'accord mais le hors-sujet n'est pas loin... Et la série donne en effet l'impression d'enfoncer les portes ouvertes du politiquement correct dans un contexte qui ne s'y prête pas. Si on y réfléchit un peu, il est probable si la race humaine n'arrivait plus à se reproduire, que l'État aurait besoin d'établir des règles pour faire enfanter davantage celles qui le peuvent... Et certes, ce serait difficile à vivre pour les femmes (et Simone de Beauvoir se retournerait dans sa tombe) mais cela paraîtrait presque logique à tout le monde... Sauf qu'ici, le scénario préfère éviter cette problématique et se contente de la caricaturer.


La série se résume en effet à une opposition binaire où thèse (priorité donnée à l'individu) et anti-thèse (priorité donnée à l'État) sont traitées de manière déséquilibrée et manichéenne. Là où l'héroïne principale est jouée avec fragilité et profondeur par Elisabeth Moss, les membres qui encadrent cette nouvelle société, sont eux joués sans aucune subtilité par des militaires interchangeables ou des commandants vicieux... Et cela, alors même alors que leur politique porte ses fruits.


L'épisode 6 est le plus frappant à ce titre : on y voit une délégation mexicaine admirative face à la ribambelle d'enfants nés de cette dictature religieuse, mais le spectateur lui, n'a pas le droit d'y voir une réussite. Il est poussé par les scènes de flash-back à ne penser qu'à travers la souffrance psychologique de l'héroïne. Au Commandant qui lui déclare, que le bonheur est dans la reproduction, celle-ci répond que pour elle, le bonheur est dans "l'amour". Si l'on suit la logique de June jusqu'au bout, le bonheur au moment où la race humaine s'éteint, consisterait à pouvoir faire des cookies avec son mari et sa petite fille, peinarde... Voilà, après sa misandrie déguisée, un autre des problèmes de la série : réduire le féminisme à une défense des droits individuels, pour ne pas dire à de l'individualisme, et mettre en avant le bonheur personnel avant le collectif.


Pour finir sur une note plus optimiste, le féminisme, né dans les années 60 et qui encourage les femmes à devenir indépendantes, est en passe d'apporter (pour de vrai cette fois) une solution concrète aux problèmes de surpopulation dans les sociétés occidentales, en faisant baisser le taux de natalité... De ce fait, on peut trouver ça ironique que pour répondre aux grands enjeux écologiques et sociaux qui attendent la planète, il semble exister encore un pouvoir (plus subtil que l'usage de la mitraillette) : celui de la propagande anti-patriarcale et féministe infusée dans les oeuvres culturelles.

JérémyMahot
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le 5 nov. 2017

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Jérémy Mahot

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