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La tendance de l’horreur semble être au figement. Ou comment réinvestir des lieux déjà bien parcourus par le cinéma d’épouvante en ralentissant à outrance le rythme général, en complexifiant inutilement l’intrigue par un éclatement de la structure spatio-temporelle (si bien qu’on n’y comprend plus grand-chose), en bannissant les fameux jump scare désormais persona non grata de toute production horrifique qui se respecte. Car deux voies paraissent aujourd’hui empruntées : c’est tantôt l’épouvante grand-spectacle où l’enjeu n’est pas tant de construire la peur dans la durée que de proposer au spectateur une avalanche de scènes fortes selon la machinerie d’un train-fantôme, tantôt l’atmosphère malsaine d’une malédiction qui plane sur un groupe d’individus unis par le sang, l’amour ou l’amitié. Dans ce dernier cas de figure, rangeons les pénibles productions d’Ari Aster, ainsi que la présenté série Netflix, The Haunting of Hill House.


Des histoires de maison hantée avec crise de la cellule familiale, on en a déjà eu à foison : pensons au film de Robert Wise, La Maison du Diable (dont il s'agit ici du remake), ainsi qu’au très réussi Crimson Peak de Guillermo Del Toro qui trouvait dans le baroque de ses décors et de sa réalisation aérienne ce qu’il fallait d’élégance et de puissance visuelle pour traduire ses thématiques par le langage cinématographique. Or, ce qu’apporte le réalisateur Mike Flanagan, c’est une rigueur digne d’un établissement de correction où toute créativité serait sévèrement punie. Une scène dans un bar lesbien offre quelques éclairages aux néons, d’accord. Pas de quoi dynamiser un ensemble étiré en longueur comme on s’amuse d’un vieux chewing-gum dans l’espoir de lui redonner texture et saveur. Non que le malaise ne finisse par s’installer, non que la caméra statique ne laisse au public le soin d’imaginer le pire avant d’être surpris. Mais la retenue constante lasse, et ce n’est pas le sérieux de plomb que revendiquent et les acteurs et la mise en scène qui apportera cette poussière d’aventure ou d’énigme pourtant essentielle à un tel projet.


L’ennui frappe à la porte du manoir, hante les couloirs, surgit des coins les plus obscurs. Autrefois, hier, de nos jours. Sous le lit, dans les cauchemars, d’une époque à l’autre. L’ennui est partout. Et l’horreur joue à cache-cache avec les plâtres.

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le 7 nov. 2019

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