Monsieur Propre et un cheval sont dans un bateau...

On avait mal commencé, The Shield et moi. Faut dire que la série a tout pour me déplaire. Les séries policières : ça va 5 minutes. Les séries avec des caille-ra, ça va 5 minutes. Les séries filmées avec un côté genre réaliste je-te-balance-la-caméra-un-peu-épaule-et-si-t-as-la-nausée-t-as-qu-à-prendre-un-seau, même quand c'est bien fait ça va 5 minutes. Résultat, au bout de 15 minutes, je dormais.

Puis, voyant Mister Nomé seul en crise d'hystérie collective - oui il était tellement enthousiaste qu'on aurait cru qu'il était plusieurs - devant la série qu'il avait, du coup, continuée tout seul, je me suis dit que peut-être j'avais loupé quelque chose. J'avais un tricot¹ sous la main, donc j'ai re-tenté le coup.

C'est donc l'histoire de Monsieur Propre et de son équipe : un cheval et deux types discrets, la strike team, chargée de gérer tout ce qui concerne les gangs dans la partie de Los Angeles qui leur est assignée. Ils y arrivent d'ailleurs fort bien si l'on est pas trop regardant quant aux règles. Mais bon, hein, une règle c'est fait pour être contourné. Non ? Tiens, j'aurais cru.

Ce qui est intéressant - je reviendrai plus tard à l'histoire de Monsieur Propre - c'est que le récit est beaucoup plus vaste que cela. On y rencontre aussi un chef voulant faire de la politique et qui, tel un Nicolas Sarkozy se sort de toutes les histoires louches la tête haute - et on ne veut pas toujours savoir comment. Il y a aussi bien sûr le flic super bon qui sait qu'il est super bon et son sidekick-qui-n-en-est-pas-un tant on se demande lequel est là pour mettre l'autre en valeur, seul duo qui semble échapper à la corruption ambiante, mais ils n'ont aucun mérite on les a vaccinés quand ils étaient petits.

Et Monsieur Propre, donc. Il n'a de propre que le nom. D'ailleurs, même pas, parce qu'en fait c'est un surnom que je lui donne parce que sinon comme nom de flic c'est un peu pourri, Monsieur Propre, c'est comme Cletus Van Damme, on a pas idée d'inventer des noms pareils. Mais bon. Je me doutais bien qu'on ne pouvait pas faire confiance à un mec avec le carrelage qui se reflète sur son crâne. D'ailleurs, on ne peut pas faire confiance à un mec avec une dentition de cheval non plus. Quant aux types discrets, c'est précisément parce qu'on ne les remarque pas qu'ils sont dangereux.

Ils ne restent pas toujours discrets, d'ailleurs. Les relations s'enrichissent, les personnages s'étoffent et le scénario, sans fausse note, nous embarque dans la noirceur des comportements humains². La variété des réactions, des situations dans lesquelles les personnages sont placés nous montrent que personne n'est tout blanc ou tout noir, même le plus boiteux des chevaux.

Ce qu'il y a de beau, d'intéressant dans The Shield, ce sont les rapports humains. Ou les rapports homme-cheval, le cas échéant. Jusqu'où vont l'amour, l'amitié, la loyauté ? Au nom de qui ou de quoi est-on prêt à commettre les pire atrocités ? Une fois que l'on a franchi la ligne, peut-on revenir en arrière ?

C'est noir, intelligent, malsain, addictif, cynique, superbement bien écrit.


¹ le tricot augmente ma tolérance télévisuelle de 45 à 70%, après c'est selon la difficulté de l'ouvrage et l'humeur générale.
² mais comme je n'accepte pas que les hommes puissent être aussi mauvais je préfère dire que cela se passe entre un personnage de javel et un cheval, vous suivez ? Pour les types discrets vous n'avez qu'à dire que c'est un taureau et un écureuil, au pif.