The Shield
8.1
The Shield

Série FX (2002)

Voir la série

Do you have any idea what you've done to me ? - I've done worse.

La lecture de cette critique est plutôt déconseillée à ceux qui ne l'ont pas vue : ce serait dommage de se gâcher certains éléments d'une série qui, exploitant les ressorts de la télévision, joue beaucoup sur la surprise.

Beaucoup de choses à dire sur cette série aussi intense qu'imparfaite, qui imprègne le téléspectateur de toute sa puissance et de l'inéluctable descente aux enfers de ses personnages, pour la plupart intéressants quoique campés par un casting inégal – le jeu de la fille ado de Mackey (qui est également la fille de Michael Chiklis), en particulier, est assez abominable –, mais le fait est que chacun des acteurs principaux sont tout à fait à la hauteur, voire transcendent des personnages pas toujours bien écrits (Shane).
The Shield, à l'instar de The Wire (mais la comparaison s'arrêtera là car les deux séries n'ont pas grand chose à voir sur le fond comme sur la forme), met en place un échiquier dans lequel on suit deux groupes en parallèle : celui des flics qu'on pourrait dire intègres (Dutch, Claudette... Aceveda ?), et celui des dissidents, la fameuse Strike team dont on suit les déboires saison après saison. La série a le bon goût de ne pas caricaturer cette opposition qui n'en est d'ailleurs pas toujours une, sur le simple fait que Vic, personnage principal, ne se situe pas du bon côté du conflit... La mode des anti-héros dans les années 2000 aidant sans doute, j'ai été étonné de ne pas trouver ce personnage aussi méchant que prévu. Le pilot donne pourtant le ton : on voit Vic abattre froidement quelqu'un, une scène tout sauf gratuite quand on a vu l'ensemble de la série mais dont les scénaristes ont du se dépatouiller avec difficulté dans toutes les saisons qui ont suivi. Comment, en effet, développer toute une série sur un personnage profondément immoral, avec qui toute empathie est impossible ? Avec l'aide d'un Michael Chiklis insufflant tout un tas de nuances à son personnage, Shawn Ryan tente ainsi de jouer sur deux tableaux, rappelant régulièrement que le personnage a une conscience morale limitée tout en l'humanisant franchement ça et là, notamment à travers sa famille et ses collègues de la Strike team. Finalement, au fil des saisons, je n'ai pas toujours cru au Vic presque caricatural du pilot, capable du pire sans éprouver le moindre remords. Mais le difficile numéro d'équilibriste auxquels se prêtent Shawn Ryan et Michael Chiklis avec le personnage de Vic tout au long de la série est bien mené.

J'ai aussi le sentiment que la série, s'étalant sur sept saisons, souffre d'un défaut que l'on retrouvera notamment (et de manière beaucoup plus gênante) quelques années plus tard dans Sons of Anarchy : le teasing permanent. Jusqu'où iront Vic, Shane et les autres avant de se faire attraper ? C'est particulièrement problématique dans la saison 5 – la préférée de beaucoup de fans, j'ai l'impression, ce que je peux toutefois comprendre – dans laquelle le personnage de Whitaker est un adversaire déterminé comme la Strike team n'en avait encore jamais eu : en menaçant Vic à chaque épisode, le personnage alourdit un échiquier beaucoup plus subtil dans le reste de la série (l'opposition Vic/Aceveda, notamment, est plus intéressante). Kavanaugh devient cela dit, progressivement, un personnage intéressant, plus complexe qu'il n'y paraît, dès lors que sa traque envers Vic tourne à l'obsession et que, lui aussi, se découvre une facette plus noire que prévue. A ce titre, la sortie du personnage, anticlimatique à souhait, est presque émouvante : Kavanaugh décide de se rendre de lui-même quand il réalise qu'il devient un Vic Mackey 2.0...

La saison 4, souvent mal aimée, est à part dans le parcours de la série : c'est sans doute celle qui s'inspire le plus directement de The Wire, notamment à travers le personnage de Monica Rawling (impériale Glenn Close, parfaite du début à la fin) qui tente une nouvelle méthode le temps d'une saison et fait de la lutte contre la drogue sa priorité. Presque indépendante des autres, cette quatrième saison a le mérite de ne pas se reposer sur une tension artificielle entre la nouvelle venue et Vic. Monica Rawlking, personnage joliment nuancé, semble presque se reconnaître en Vic : il y a une connivence intéressante entre les deux personnages et la série aurait sans doute gagné à ce que Glenn Close soit présente plus longtemps que sur une unique saison.

Parmi tous les personnages qui composent la série, le développement le plus notable est sans doute celui de Shane. D'insupportable boulet multipliant les erreurs irréfléchies dans les quatre premières saisons, il devient à partir de la fin de la saison 5 (formidable d'intensité) un personnage complexe et émouvant, qui continue de faire des erreurs (...) mais celles-ci sont, cette fois, rationnellement compréhensibles. Peut-être plus encore que Michael Chiklis, Walton Goggins est sans doute l'acteur dont la performance m'aura le plus impressionné dans les dernières saisons. Ses remords dans la première partie de saison 6 sont bouleversants et toutes les scènes qu'il partage avec Mara dans le dernier quart de la série sont tout bonnement exceptionnelles, d'une émotion rare.

The Shield fait partie de ces quelques séries, avec surtout Six Feet Under, qui atteignent leur climax en fin de parcours. A la fois, il est gratifiant de voir une série qui ne dévoile pas toutes ses cartes dès le départ puisqu'après avoir suivi tous ces personnages pendant sept saisons, l'empathie est telle que l'émotion est grande et que (fait rare s'il en est) la conclusion est tout sauf décevante, de celles qui tendent à donner à l'ensemble de la série une autre couleur. Le parcours de la série, malgré tout, a le défaut d'être irrégulier : jamais mauvais (ce qui est plutôt remarquable) mais souvent moyen et en cela assez frustrant car un peu trop dilué sur la longueur.
Ludoo
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleures fins de séries - Top 20, Top 10 FX, Les meilleures séries avec un anti-héros et Séries - Notation par saisons

Créée

le 17 juil. 2014

Modifiée

le 17 juil. 2014

Critique lue 596 fois

9 j'aime

10 commentaires

Ludoo

Écrit par

Critique lue 596 fois

9
10

D'autres avis sur The Shield

The Shield
Vnr-Herzog
10

Bad boys bad boys, whatcha gonna do when they come for you

Bienvenue à Farmington, le quartier le plus difficile de Los Angeles. Un commissariat pilote est mis en place pour lutter contre la criminalité galopante des environs, l'une de ses arme principale...

le 16 mai 2010

134 j'aime

19

The Shield
TheBadBreaker
9

Wrong Cops

Critique par saison, contient du spoil, ne pas lire plus que vous n’en avez vu, à laisser hors de portée des enfants, ne pas utiliser chez la femme enceinte, ne pas reproduire les faits chez vous...

le 25 juil. 2014

61 j'aime

4

The Shield
Gothic
10

Fange et Vic, Mackey des Anges

Los Angeles, commissariat de Farmington. "The Barn". Ses bons éléments, ses brebis galeuses. Ses coups de filets, ses coups fumants aussi. Gangs, trafic de drogue, prostitution, tueurs en série,...

le 13 août 2014

51 j'aime

27

Du même critique

Tell Me You Love Me
Ludoo
8

Du sexe, mais pas que !

S'il y a bien quelque chose à dire sur Tell Me You Love Me, c'est le fait qu'elle est l'antithèse absolue d'un film X : le sexe y est profondément cru et jamais glamourisé, quitte à apparaître...

le 5 août 2012

23 j'aime

2

Bloodline
Ludoo
5

We need to talk about Danny

C'est embêtant, j'aimerais beaucoup aimer la série. Il faut dire que l'emballage de celle-ci est une franche réussite : photographie, bande-son (utilisée avec parcimonie, juste ce qu'il faut quand il...

le 28 juil. 2015

22 j'aime

Gilmore Girls
Ludoo
8

Critique de Gilmore Girls par Ludoo

Gilmore Girls est un vrai bijou d'écriture. Une série unique, synonyme de fraicheur dans le paysage télévisuel, et ultra-référencée, les dialogues étant remplis de références culturelles en tous...

le 18 févr. 2011

14 j'aime

2