Watamote
6.6
Watamote

Anime (mangas) TV Tokyo (2013)

Watashi ga Motenai no wa Dou Kangaetemo Omaera ga Warui, abrégé en Watamote pour les sains d’esprit, est une série étrange qui aura suscité des réactions très variées et une question commune sur toutes les lèvres : « Comment est-on censé regarder ce machin là ? ».


Watamote met en scène Tomoko Kuroki, aussi appelée Mokocchi, une adolescente recluse de 15 ans qui a décidé de changer de vie en rentrant au lycée. Son but : devenir une fille populaire. Pas facile quand on est asocial au point de gerber dès qu’on se retrouve entouré par plus de deux personnes. Armée de ses illusions et de sa culture d’otaku, à base de dating-simulator pour filles et autres audio-drama érotiques, Mokocchi nous entraîne dans une suite d’initiatives aussi calamiteuses que douloureusement drôles.


Un élément de réponse à notre question, Watamote est à la base un manga à gags et l’adaptation ne renie pas ses origines. Il ne faut donc pas s’attendre à un véritable scénario. Il y a certes une subtile évolution de l’intrigue mais cela reste fort léger. Une information primordiale pour ajuster nos attentes et ce sera bien la seule, car pour le reste Watamote est un spectacle qui ne nous laisse aucune réponse et refuse d’en imposer.


Cet anime est une comédie hors-norme qui repose son humour sur l’inaptitude sociale de Mokocchi. Il n’y a pas besoin d’être un sadique pour en rire, le fait est que le ridicule de l’héroïne atteint des sommets tellement hauts que l’on ne peut pas s’empêcher de s’amuser devant ses maladresses tout en se sentant mal, gêné même, pour elle. Cependant, les gags sont tellement peu forcés et l’embarras tellement grand que l’expérience est bien souvent inconfortable à vivre. Dans cette très noire alchimie, on en vient à se demander si la scène était censée être drôle, et ainsi durant toute la série on vogue entre être désolé du désopilant et être désolé tout court.


Un mélange d’humeurs déstabilisant, intéressant, mais dur à mâcher. Heureusement une autre partie de l’humour de Watamote est beaucoup plus simple à approcher et nous permet d’un peu respirer. En effet, que ce soit dans les dessins, les sous-titres, et même les musiques, Watamote est bourré de références (heureusement pointées par d’autres no-lifers plus doués que moi). Un côté très geek qui est souvent l’occasion d’esquisser un sourire, en plus de refléter avec intelligence la manière dont la protagoniste appréhende le monde.


Petite illustration avec le titre qui est très révélateur, à la fois parodie des titres à rallonge des Light Novel (LN) mais aussi de leur contenu. Comme on le sait, une bonne portion des LN propose, avec des variations plus ou moins originales, des vies scolaires incroyablement excitantes, aux clubs aussi fous qu’improbables et remplies de jeunes filles attrayantes qui possèdent chacune un archétype leur assurant une place au sein de relations amoureuses très triangulaires. Ici, le manga prend une direction totalement opposée en montrant une vie scolaire morne et une fille, désespérément seule, biberonnée à la culture d’otaku au point d’être perdue devant la réalité.


Une satire donc, dont les reflets sarcastiques virent parfois au sinistre. L’épisode 10, dépressif à souhait, est l’exemple le plus évident mais l’attitude de Mokocchi a souvent de quoi inquiéter (tendances un peu suicidaire notamment). Et pourtant Watamote ne nous force pas à prendre en pitié l’héroïne, qui a un caractère assez détestable au demeurant, et n’utilise d’ailleurs aucun acteur extérieur pour justifier ses malheurs : pas de moquerie de la part d’autres élèves, pas de tyrannie familiale, etc. Au contraire, les rares personnes en contact avec elle, son amie Yuu ou Megumi la senpai angélique, sont d’une extrême gentillesse à son égard.


Un constat très nuancé au milieu duquel se trouve une fille singulière et qui pourtant reflète des aspects très ordinaires. A défaut d’avoir une approche réaliste, la série réussi à nous partager toute l’anxiété, la solitude et les problèmes de communication auxquels Mokocchi doit faire face durant son quotidien. Il est facile de se projeter dans ce personnage et de se rappeler, avec une belle dose d’auto-dérision, les moments peu glorieux de notre vie sociale. Il y a ainsi un certain attachement qui se crée entre le spectateur et Mokocchi, un attachement qui nous donne envie de continuer à regarder ses déboires, irritants mais évocateurs.


Si notre ressenti envers Mokocchi variera énormément d’une personne à l’autre, il n’en est pas de même pour sa voix. Vraiment, la performance de sa seiyuu, Kitta Izumi, est excellente et donne beaucoup d’impact aux différentes facettes de sa personnalité.


De manière générale, l'adaptation semble bien complémenter la source de base. Les graphismes ne sont pas au top certes mais la vision artistique est respectée avec quelques remaniements et ajouts habilement amenés, comme les chansons insérées dans les épisodes qui appuient au bon moment les scènes les plus fortes.


On pourrait croire jusqu’à présent qu’on a devant nous l’anime de l’année mais ce n’est pas le cas, alors qu’est-ce qui cloche au juste ? Le problème, c’est la nature de Watamote qui est comme je le rappelle un manga à gags au départ. Le fait de voir l’héroïne trébucher sans arrêts et sans avancer est pesant sur le long terme, l’ironie se recycle et la formule a de quoi lasser. Un marasme sans doute remarqué par la direction car une orientation légèrement différente se forme lors des derniers épisodes, moins drôles et aux monologues plus terre à terre. Mokocchi prend alors davantage conscience de ses problèmes même si le résultat reste toujours identique. Le mot de la fin du dernier épisode, peu satisfaisant, essaye également de conclure autrement que par le vide. On appréciera l’effort, mais la faiblesse persévère et s’avère ici capitale.


Malgré ce gros défaut, Watamote parvient à s’imposer comme une expérience originale, une curiosité qui vaut le détour et que je recommande.

Skidda
8
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le 12 oct. 2013

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