Mon cher (regretté) Usul...

Malheureusement, je n'aime pas cette série. Pourquoi malheureusement ? Parce qu'avant cette série, je pensais être en phase avec Usul. Déjà, j'appréciais son regard original sur le monde du jeu vidéo. Et par ailleurs, sur un tout autre sujet, je pensais que ses opinions antiracistes étaient similaires aux miennes.

Il se trouve que j'ai assez vite déchanté.

Je préviens tout de suite : ma critique est nécessairement subjective, mais aussi, comporte différents sujets plus ou moins distincts. Celui où je suis le plus "sûr de moi" concerne la vidéo d'Elisabeth Levy (et celle des flics). Sur les autres vidéos, ma critique est moins assurée, moins convaincue, et correspond plus à des sentiments qu'à des arguments précis. Il ne faut donc pas prendre toute ma critique au même niveau.

Sur son 1er épisode, assez intéressant d'ailleurs, à propos de BHL, j'ai tiqué sur l'un de ses arguments, à savoir que BHL et Soral seraient les deux faces d'une même pièce. J'ai trouvé ça un peu idiot, mais passons, il ne s'agit après tout que d'une formulation, pas forcément très poussée.

Bon ensuite à un moment, il fait un épisode sur Chouard, en minimisant complètement ses accointances avec une partie de l'extrême-droite française. Alors oui, il a en partie raison de dire que lui n'est pas directement impliqué. Mais non, Chouard n'est pas totalement sain(t) dans l'histoire, car il relaie sans filtre critique des propos qui eux sont condamnables. A aucun moment, il ne fait réellement preuve d'esprit critique envers ceux-ci. Et je ne sais pas si du coup, on peut parler de naïveté de sa part. En fait, je n'ai pas spécialement de problème avec le fait de discuter avec des gens avec qui on n'est pas d'accord. Je trouve cela même très sain (et pas saint). Mais je pense qu'on se doit de s'en distinguer clairement. Bien sûr, Usul a depuis fait machine arrière suite à certaines remarques de gens ayant vu la vidéo. Il n'empêche que sa vidéo était mûrement réfléchie, et que son rétro-pédalage semble plus contraint que sincère. Mais après tout, pour reprendre ce que je viens de dire juste au-dessus, il faut savoir discuter avec tout le monde, donc finalement je n'ai envers cette vidéo qu'une petite critique. Disons que ce n'est pas le coeur de ma critique envers Usul, juste une petite pique. Ne nous formalisons donc pas sur ce paragraphe je vous prie :p Vous remarquerez d'ailleurs que je ne fais pas de remarques sur les propositions de Chouard, je n'ai pas d'avis tranché là-dessus.

Pour en venir maintenant là où j'ai un profond désaccord avec certains arguments d'Usul (je préviens pour ceux qui lisent en diagonale, c'est ici qu'est le coeur de ma critique), c'est sur sa vidéo concernant Elisabeth Levy (et aussi, depuis peu, sur celle des flics).

En fait, Usul valide les théories de racisme d'Etat, d'islamophobie d'Etat, de racisme structurel, institutionnel, etc. Il est complètement dans la veine de la vague d'étudiants américains qui font ce que j'appellerais une caricature de la sociologie sur les sujets touchant au racisme. Et de ce fait, il valide le discours des Indigènes de la République et de Tariq Ramadan (pour ne citer qu'eux), et s'inscrit en quelque sorte plus ou moins dans la lignée d'Edwy Plenel. Cette lignée qui pense que la laïcité est plus oppressive qu'émancipatrice. Sur ce sujet spécifique, je suis sur la ligne complètement opposée. Je pense qu'en validant ces histoires de racisme structurel, on participe à l'enfermement des gens dans des catégories. On s'oppose à leur "racisation", mais on ne fait que les raciser. De ce fait, la distinction dominé/dominant, ou racisé/racisant, devient un dogme, qui empêche de voir toute la complexité de l'être humain, des êtres humains. Et surtout, cette vision dominé/dominant, lorqu'elle parle de l'Etat dans la bouche d'Usul, est tout simplement fausse. L'Etat n'est pas raciste. Il y a des éléments racistes dans la société française, des éléments "dominateurs" peut-être. Même au sein des politiques, certes. Mais il n'y a pas de loi raciste. La laïcité par exemple, n'est pas un principe blessant, mais émancipateur. Bien sûr, certains peuvent dévoyer ce terme, mais pas comme un Médine (cité régulièrement par Usul) l'entendrait, au travers de son titre déguelasse Don't Laïk, qui mélange torchons et serviettes.

De la même manière, sur sa vidéo récente sur les flics, Usul parle de problèmes structurels liés à la police. Or, s'il est vrai que de nombreux comportements problématiques se retrouvent au sein de la Police :

1. Cela n'est pas généralisable à l'ensemble des policiers


2. Aujourd'hui, la police est beaucoup plus sensibilisée pour avoir un comportement digne qu'autrefois


3. Si problème global il pourrait y avoir (ce que je conteste), il s'agirait avant tout de ce que j'appelerais un problème de société plutôt qu'un problème institutionnel.

Bref, Usul, en jouant l'intellectuel engagné indigné anti-raciste, tombe en fait dans de nombreux travers qui font qu'on peut considérer, avec un peu de mauvaise foi certes, qu'il utilise lui aussi des arguments à la limite du racisme, ou en tout cas qui essentialisent les gens dans leurs catégories ethniques. En ce sens, de par sa portée auprès de nombreux jeunes qui ne rêvent que de s'indigner (et on les comprend), et de par la forme excellente de ses vidéos, je pense qu'il est nécessaire de lui apporter des contre-arguments forts issus du mouvement de la gauche républicaine (mouvement duquel je me sens plutôt proche, sans forcément vouloir m'inscrire dans un quelconque mouvement politique).

Pour finir sur quelques autres objections, plus mineures, et en vrac.
- Désolé si j'en choque certains, mais on ne peut pas mettre sur le même plan des gens comme Elisabeth Levy et Alain Finkielkraut avec d'autres personnalités comme Eric Zemmour ou Jean-Marie Le Pen. Les premiers, malgré des arguments souvent réfutables, apportent tout de même des réflexions sur lesquelles il me semble nécessaire de s'attarder. Et surtout, ils ne tombent pas dans les délires racistes des seconds. De ce fait, je suis toujours ulcéré qu'on caricature Alain Finkielkraut en raciste, comme le fait Usul dans l'une de ses vidéos. Alors que je comprends tout à fait qu'on le fasse pour Eric Zemmour... même si je pense qu'il est préférable de lui apporter des réponses argumentées plutôt que de simplement l'ostraciser. Je pourrais dire la même chose de Dieudonné, auquel il faut apporter des contre-arguments clairs plutôt que l'interdire, ce qui ne fait au final que lui apporter de nouveaux soutiens.
- D'une manière moins essentielle, sa vidéo sur les jeunes est assez naïve et me semble également caricaturale (faudrait que je la revoie pour me rappeler pourquoi j'avais été assez cirsconspect, mais j'avais halluciné qu'autant de gens la partagent sur les réseaux sociaux)
- Enfin, sur ses autres réflexions sur des sujets plutôt économiques, je ne me prononcerai pas, car je ne me sens pas assez informé/convaincu/spécialiste.

Désolé encore si ma critique part un peu dans tous les sens, mais je souhaitais absolument parler de cette série d'Usul, et SensCritique, de par son format, est une plateforme idéale pour cela.