Les meilleures BD de 2016 selon benton

Annotation :

Airboy m'a vraiment surpris. Je ne m'attendais pas mais alors pas du tout à ça. C'est la première fois que je lis un comics qui va aussi loin dans son délire et dans l'auto-dérision absolue.

En gros, les deux auteurs, Greg Hinkle et James Robinson se mettent eux-mêmes en scène, dans une mise en abyme amusante, où on les voit galérer pour trouver l'inspiration afin de faire un reboot d'une vieille gloire des comics : Airboy. Là où le comics est amusant c'est qu'il ose tout et n'importe quoi et met ses personnages / auteurs dans des situations toutes aussi improbables les unes que les autres, et notamment dans des scènes what the fuck de drogue et de sexe décomplexé.

Les deux auteurs ont beaucoup d'auto-dérision pour oser se représenter de la sorte car c'est très cru. C'est évidemment exagéré (vraiment ?) mais ça n'en reste pas moins drôle, car ça joue naturellement en équilibre instable entre fantasme et réalité. Les auteurs invoquent des détails, personnels ou non, qui renforcent les aspects réels de l'histoire, tout en versant dans l'excès volontaire pour mieux faire exploser les frontières dans un élan cathartique jubilatoire. C'est con mais c'est bon (le sexe démesuré de Greg Hinkle).

En contrepartie, narrativement parlant, ça ne va pas bien loin. Si on oublie ses délires, l'histoire reprend un schéma plutôt classique (jusque dans son final, très classique au bout du compte) qui reprend en quelque sorte l'idée de Last Action Hero. C'est plutôt bien traité, avec un humour à la cool qui marche toujours bien, mais le cœur du projet ne me paraît pas se trouver là.

Les auteurs sont plutôt là pour parler, sous couvert d'une outrance décomplexée (mais toujours "bon enfant" - même si les drogues c'est mal), de crise existentielle, personnelle et artistique. Le côté excentrique du comics empêche sans doute de se sentir totalement concerné par ces problématiques mais c'est peut-être aussi ce que voulait le scénariste James Robinson, se défouler de manière légère sur des problèmes beaucoup moins drôles dans la vie réelle.

Annotation :

Enfin, au bout du quatrième tome Black Science propose enfin autre chose et calme son rythme jusque-là effréné. Et c'est un peu mieux car on découvre les personnages sous un nouveau jour. Enfin surtout un : Grant McKay, auquel ce tome est entièrement consacré.

Pour une fois, un des personnages se retrouve seul et tente ainsi de faire le point sur lui-même, délesté de l'influence néfaste - en tout cas déstabilisante - des autres membres de l'équipe. Cela change, et la narration est aussi différente, elle prend enfin le temps de poser les situations et d'explorer un peu plus profondément la psychologie de Grant McKay.

Le tome semble scindé en deux. La première partie est une plongée dans les méandres de l'esprit de McKay sous une forme un peu téléphonée, à savoir un enchaînements de situations plus ou moins métaphoriques et symboliques (monstres, transformations, spectacle de marionnettes...) sous forme de délires hallucinatoires incohérents.

Je ne suis pas très fan de cette partie. C'est une manière plutôt banale d'évoquer les tourments d'un personnage, surtout que l'histoire de Grant McKay n'a rien de très profond ou original (une histoire d'adultère, puis de suicide, et McKay qui répète les mêmes erreurs alors qu'il s'était juré de les éviter... on n'est jamais très loin du cliché de la famille dévastée et névrosée dépeinte dans la plupart des fictions).

J'ai préféré la dernière partie qui semble repartir sur de nouvelles bases en poursuivant l'exploration du concept des infinivers. Et enfin, Black Science raconte autre chose qu'une sempiternelle course poursuite dans un monde hostile et au bord du chaos. Grant McKay retrouve ainsi Rebecca et découvre qu'elle a atteint son but et s'est fait une place dans un univers parallèle.

Il y a de vrais enjeux mis en place, un enchaînement logique, un vrai rapport entre les personnages, un dénouement... L'histoire se termine même trop vite, mais les personnages paraissent enfin vivants et crédibles, peut-être car ils se font vraiment face pour la première fois, assument leurs actes et ne se cachent plus derrière leurs secrets.

Malgré quelques facilités toujours présentes (l'appareil miracle de Grant est un deux ex machina permanent), le ton a changé et la série semble avoir franchi un cap.
A voir si ça se confirme par la suite.