Ce quatrième album de Muse sonne un peu comme une grande cacophonie bien organisée. Partagée entre le délire paranoïaque d'invasion extra-terrestre (voir de fin du monde) et la passion pour des western spaghettis (Ennio Morricone pour la musique), Muse ne sent plus péter et nous lâche une bonne dizaine de chansons truquées, parfois insipides et peu inspirées, mais aussi bien bandantes que géniales.


Black Holes & Revelations est en fait une vaste blague si on le compare aux trois premiers albums. Le ton général est moins pessimiste, plus enjoué, plus coloré. D'ailleurs, on sent très bien que le groupe ne prend plus du tout au sérieux et à coupé les ponts avec le passé quitte à se ramasser complétement, ils explorent de nouveaux sons et instruments encore jamais utilisés auparavant, comme par exemple, la trompette sur KOC ou City of Delusion. Bien sûr on reconnait parfaitement la griffe Muse, mais le son général s'est vraiment uniformisé. Pour quel résultat ? Pas si mal car chaque chansons est très différente, très influencé par des tas d'artistes eux aussi très différents.


BHAR s'ouvre sur de petites nappes de synthés inquiétantes, évoquant probablement la fin du monde, et la voix de Bellamy se pose en douceur tel l'Angélus d'un prêtre. C'est la première piste tout à fait illuminée, Take a Bow. Quelques secondes plus tard, on passe par des sons electro, puis un rythme techno s'emballe. Plus tard encore, Bellamy pousse sa gueulante, et les guitares électriques arrivent, pour faire sonner le tout comme un gigantesque morceau rock et progressif, avec un semblant de technicité. On pense à du Pink Floyd. C'est chiant et sympa à la fois. Comme le reste de l'album d'ailleurs...


La pénible Starlight, évoquant U2 par sa mélodie trop propre et son rythme de papy du rock, bien trop diffusée à la radio, bien trop commerciale finalement. Mais le tout est bien construit et le rendu général convenu mais agréable. La suite, c'est du RNB façon Muse, avec Supermassive Black Hole (quel nom à la con) et une boite à rythme classieuse à la place de la batterie, une guitare rock, simple et discrète, une basse lourde et fuzzée, un chant rappelant Kiss de Prince. A la fois excellent, et pitoyable. C'est vous dire.
Map of the Problematique propose un cadre fort séduisant, tragique et sombre, plus dans le ton habituel du groupe. On pense évidemment à Dépêche Mode et Enjoy the Silence pour son ambiance oppressante et sa profondeur glaciale. Un bon morceau au son juste énorme, et à la construction pourtant si normalisée, avec seulement quatre accords tout le long ! Les mêmes sur le refrain et les couplets. Dingue.
On continue à écouter (subir diront certains ?) le disque avec un petit morceau insignifiant et un peu jazzy avec Soldier's Poem, qui ne tient pas la comparaison avec dans le même style calme, Unintended du premier album.
Invincible est très bien produite, mais fait fort dans la mièvrerie. Dommage car le solo de gratte reste appétissant. Mais la chanson en elle -même est trop grotesque, avec des accords et un chant tout simplement plats. C'est "gnian-gnian" quoi.


Voici donc pour la première partie du disque, un gros bordel quand même. Heureusement, la suite est bien plus intéressante. Enfin, ça dépend pour qui encore une fois.


Assassin déchire sa race, un morceau très speed et technique comme rarement Muse nous en aura pondu. La petite guitare truquée au début fait penser au générique de K2000, c'est amusant, puis tous les instruments explosent. Probablement LE morceau de l'album qui tranche la setlist en deux, et qui dit : "On va arrêter de rigoler maintenant". Énorme, que ce soit au niveau de la construction (dommage qu'elle ait été amputée pour l'album d'ailleurs de son pont disponible sur le single de KOC) ou de son ambiance déjantée. Exo Politics s'enchaine parfaitement avec une batterie lourde et puissante, un chorus du feu de Dieu avec un chant et une voix superbes, et un refrain certes pompeux, mais qui structure le tout impeccablement. L'une des meilleures chansons de l'album. Dommage que le solo de guitare soit un peu faiblard...


City of Delusion, ou l'apogée de BHAR. Guitare sèche au début, violons qui accompagnent agréablement l'ensemble et donnent un côté "oriental" , basse tortueuse et efficace, solo de trompette sublime. Même l'excellent Absolution ne possède pas de chansons aussi complète que celle-ci. Une très belle production, au ton très enjoué et rafraichissant.
Hoodoo mêle un peu de piano classique qui se fait maltraiter, avec une ambiance clairement empreintée à la BO de Kill Bill (Nancy Sinatra). On passe du slow tendre et sensuel à l'apocalyptique piano de fin du monde et un chant déchirant. Un peu de catastrophisme habituel ne nous fera pas de mal, d'autant qu'il est parfaitement placé, juste avant la titanesque et absurde Knights of Cydonia.


Knights of Cydonia est la chanson foutraque et complétement allumée de l'album. Pendant l'introduction, on entend comme une guerre entre des cowboys et des extraterrestres, avec bruits de lazers, soucoupe-volante et autres hennissements de chevaux. Burlesque au possible, KOC se montre être l'un des morceaux les plus épiques et abracadabrantesque jamais écrits. Les chœurs à la Queen, la trompette mexicaine, le rythme de cavalcade, c'est du très lourd. Et ce rythme heavy final pour conclure avec cette musique somme toute indéfinissable, ressemblant à un générique de manga des année 80.


Voila donc difficile de décrire le plaisir sournois avec lequel on peut écouter ce grotesque quatrième album studio de Muse. La première partie avant Assassin n'est franchement pas terrible (jusqu'à Invincible inclus), mais les cinq derniers morceaux sont tellement fous et réussis qu'ils remontent la pente sans efforts, et proposent de découvrir une facette nouvelle du groupe, qui d'un coup de baguette magique peut se montrer à la fois comique et décomplexé. Pas le meilleur album, c'est certain, sans doute le plus déroutant, mais aussi le plus drôle, avec quelques perles à ne pas manquer !

Addryu
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le 6 févr. 2012

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Addryu

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