Voilà du beau travail ! D'abord, les vraies BD de science-fiction se font assez rares en ce moment, et Bajram met le paquet pour donner de la profondeur à ses horizons cosmiques : dessin ligne claire réaliste, introduction d'images informatiques 3D, jeux de couleurs soulignant puissamment les ombres angoissantes et les séquences en lumière artificielle. Un orangé soutenu domine tout l'album, en contraste avec des gris et des noirs. Superbes anneaux de Saturne; rendu convaincant des tracés lumineux laissés par les étoiles autour d'un vaisseau lancé à grande vitesse (planches 4, 7). Fignolé.

Les vaisseaux spatiaux flottent dans le vide, avec d'excellents rendus de profondeur; la mise en page, moins audacieuse, utilise surtout l'alternance de bandeaux pleine largeur, et de vignettes multiples. Les décors pleine page sur lesquels se surimposent des vignettes sont pourtant présents (planches 1, 8, 19). Morceau de bravoure : un anneau de Saturne troué par une explosion (planche 20) !

On a du mal à comprendre l'utilité des épigraphes de séquences, censées être tirées d'une énigmatique "Bible de Canaan", qui, en fait, reprend presque textuellement le début de la Genèse biblique, en en modifiant certains mots, qui sont supposés faire "scientifique" : "énergie", "espace-temps", "matière".

Le récit n'avait pas besoin de cette référence religieuse pour générer une sorte d'effroi sacré. Car le problème majeur des "héros", ce mur noir qui gagne tout l'univers, et où tout s'engloutit, est suffisamment bien mis en récit pour susciter une peur primordiale : le mur de la Mort, de l'Au-delà, de l'Inconscient, on peut penser à tout. D'autant que les explicatives relatives à ce "mur" restent assez exotiques dans cet épisode : la paroi serait sensible à des champs gravitationnels (ou anti-gravitationnels) qui permettraient d'y creuser une sorte d'entonnoir provisoire. Bien entendu, les héros doivent y aller : passage mystique dans une transcendance, ça c'est de l'aventure !

Une autre richesse du récit, c'est que les "héros" qui vont s'affronter à cet Inconnu radical sont une équipe de salopards au passé assez lourd, bien individualisés. On n'échappe d'ailleurs pas (planches 36 et 37) à un exposé du passé de chacun de ces joyeux aventuriers : une courageuse tête brûlée, un paniquard suicidaire en quête de rédemption, un violeur, un physicien génial mais tyrannique, une fille victime de viols chroniques, et émasculant ses agresseurs...

L'introduction d'une problématique temporelle ajoute une dimension au récit : le commandant de l'escadre saturnienne a évité la cour martiale à l'officier June Williamson, qui a désobéi à un ordre de massacre sur Uranus il y a 20 ans, et c'est la fille de ce commandant qui dirige les salopards...

Scènes de sexe : des filles se promènent nues, et évidemment , quand il y a des violeurs dans l'équipe, ce n'est pas très indiqué...

Les trois dernières planches sont un sommet de tension et de fantastique. Superbe récit !
khorsabad
9
Écrit par

Créée

le 3 juin 2012

Critique lue 1.7K fois

25 j'aime

4 commentaires

khorsabad

Écrit par

Critique lue 1.7K fois

25
4

D'autres avis sur La Genèse - Universal War One, tome 1

La Genèse - Universal War One, tome 1
sebastien
10

Critique de La Genèse - Universal War One, tome 1 par sebastien

Bonne BD dans l'ensemble, au style graphique plutôt agréable. L'univers de la BD, bien que plutôt convenu n'en reste pas moins sympathique. Le scénario lui, commence lentement, mais au fil des...

le 24 juin 2010

7 j'aime

4

La Genèse - Universal War One, tome 1
Jben
7

Critique de La Genèse - Universal War One, tome 1 par Jben

Universal War One est une BD au background science-fiction plutôt convenu : au XXIème siècle, l'humanité est partie à la conquête de l'espace et fait face à une menace insondable : un gigantesque...

Par

le 19 juin 2010

7 j'aime

La Genèse - Universal War One, tome 1
Apostille
8

Quand des criminels font le mur...

Un futur pas si lointain dans le système solaire... Un groupe de militaires en sursis de cour martiale sont réuni pour former l'escadron "Purgatory". Dans ce futur spatial s'élève un "mur", opaque et...

le 20 oct. 2013

6 j'aime

Du même critique

Gargantua
khorsabad
10

Matin d'un monde

L'enthousiasme naît de la lecture de Gargantua. Le torrent de toutes les jouissances traverse gaillardement ce livre, frais et beau comme le premier parterre de fleurs sauvages au printemps. Balayant...

le 26 févr. 2011

36 j'aime

7

Le Cantique des Cantiques
khorsabad
8

Erotisme Biblique

Le public français contemporain, conditionné à voir dans la Bible la racine répulsive de tous les refoulements sexuels, aura peut-être de la peine à croire qu'un texte aussi franchement amoureux et...

le 7 mars 2011

35 j'aime

14