Plus qu'un simple film de guerre, Apocalypse Now est un film psychologique voire psychédélique. Cette remontée de la rivière est un voyage intérieur jusqu'au plus profond de la jungle et donc de l'âme pour Willard. De son entrée absurde avec cet assaut époustouflant visuellement que même un Soldat Ryan de tonton Steven ne parviendra pas à égaliser, avec ces trompettes de cavalerie et du Wagner à fond la caisse mené par un Robert Duvall bluffant, extraordinaire, d'un cynisme effroyable, avec la peur que cette guerre et ce napalm qui dégage les poumons ne s'arrêtent. De cette ombre de Brando qui plane tout le long du film, de ses extraits de voix, à son CV pour terminer en apothéose par un monologue à 3 millions de dollars... littéralement ! Ce célèbre colonel Kurtz, l'homme enfanté par la politique US qui est devenu, trop fort, trop grand et qui doit être mis hors d'état de commandement. Douce hypocrisie du terme utilisé par une Amérique perdue dans un conflit qui ne leur appartient pas. Les enfants de l'Amérique, perdus entre ses chefs et la jungle, vivant la guerre manière sex, drug & rock'n'roll!

A la base, Apocalypse Now devait être le premier film post-vietnam et donc premier film critique, loin de la propagande US des "Bérets Verts" avec John Wayne. L'histoire nous apprendra qu'il sera coiffé sur le poteau par le film de Cimino et son Voyage Au Bout de L'Enfer. Car plus qu'un film, celui de Coppola fut une épreuve, un tournage de 238 jours qui faillit mettre un terme à la carrière de Coppola tant financièrement que physiquement. "Apocalypse Now n'est pas un film sur la guerre du Vietnam, c'est le Vietnam". Par ces mots d'introduction au festival de Cannes en 1979, Coppola avait tout dit. Réalisateur, équipe, acteurs,... tous furent entre la vie et la mort tel des Marines. D'une crise cardiaque de Martin Sheen par excès d'alcool, de coke et speed qui tournait dans l'équipe, aux envies suicidaires d'un Coppolla à bout et qui a tout hypothéqué pour son art. Il en ressortira finalement avec 300 km de bobines à monter pour aboutir à 2 montages. L'original de 1979 (2h20) et le Redux en 2001 (3h15). Ce dernier divisera les fans. Personnellement, je ne peux que vous conseiller de débuter avec la version originale, plus rythmée alors que c'est déjà un film assez lent dans sa seconde partie. Réservez ensuite le Redux à ceux qui ont apprécié, cette version vous enfoncera encore plus dans la jungle, puisque cette remontée de la rivière est également historique et la version longue vous proposera la célèbre scène de la plantation française représentative de l'époque de la colonisation, sans apporter cependant grand chose au récit.

La scène finale est magistrale avec un Martin Sheen face à Brando et un Dennis Hopper déjanté (n'étant même pas un rôle de composition pour ce dernier, tellement stone durant le tournage que ca pètera plusieurs fois avec son collègue Marlon) C'est l'exemple même de ce film, remanié, dans le doute, psychédélique, philosophique et surtout symbolique avec ce parallèle de l'assassinat du colonel et le sacrifice du bœuf par la tribu primitive. Est-ce vraiment elle la primitive ? Celle qui parvient à contenir sa violence dans ce sacrifice, véritable catharsis ? ou l'autre peuple, loin de chez eux, qui termine par s'entre-tuer ?

Le film, monté, s'ouvrant enfin à tous, bruits de palette dans la salle et cette mélodie des Doors qui nous chantonne "This Is The End"... La signification est énorme...
Apocalypse Now est un film incroyablement fort, pour son histoire et surtout son difficile tournage. Rien que pour ca il restera à tout jamais un classique du cinéma.

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le 1 juil. 2011

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FlyingMan

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