Le maître Miyazaki Hayao cherche depuis longtemps quelqu'un pour lui succéder, et n'aura que de rares fois laissé la direction d'un Ghibli, afin de trouver un éventuel prétendant, mais après les essais décevants de Morita Hiroyuki avec Le royaume des chats, ainsi que Miyazaki Goro, son fils, avec Les contes de Terremer, nos espoirs quant à une pérénité de l'esprit du maître s'amenuisaient. Est-ce que Yonebayashi Hiromasa, qui travaille depuis plus d'une dizaine d'années dans le studio, et qui dirige ce nouveau film, sera l'élu ?
Dans la banlieue de Tokyo, sous le plancher d'une vieille maison perdue au cœur d'un immense jardin, la minuscule Arrietty vit en secret avec sa famille. Ce sont des Chapardeurs.
Arrietty connaît les règles : on n'emprunte que ce dont on a besoin, en tellement petite quantité que les habitants de la maison ne s'en aperçoivent pas. Plus important encore, on se méfie du chat, des rats, et interdiction absolue d'être vus par les humains sous peine d'être obligés de déménager et de perdre cet univers miniature fascinant fait d'objets détournés.
Arrietty sait tout cela. Pourtant, lorsqu'un jeune garçon, Sho, arrive à la maison pour se reposer avant une grave opération, elle sent que tout sera différent. Entre la jeune fille et celui qu'elle voit comme un géant, commence une aventure et une amitié que personne ne pourra oublier...

Le Studio Ghibli, c'est comme le Studio Disney, ça veut tout et rien dire. On ne pourra pas nier non plus que contrairement au studio américain le studio japonais ait toujours souhaité créer des oeuvres originales plutôt qu'adapter des contes existants, de même qu'ils n'ont jamais succombé à la médiocrité pour l'appât du gain. Cependant si le nom de Ghibli est un gage de qualité, il n'est cependant pas un gage d'excellence, en particulier quand Monsieur Miyazaki Hayao n'est pas de la partie. Dans le cas présent, le célèbre auteur est absent (bien qu'il ait co-écrit le scénario), et ça se ressent, le tout n'ayant l'air d'être qu'un ersatz de Ponyo. La technique est évidemment là, car les artistes restent les mêmes, et l'on reconnaît donc le niveau de perfection dans l'animation ainsi que la recherche du détail, toujours poussée à son paroxysme, mais chose inédite, l'oeuvre est adaptée du livre de Mary Norton, et qui plus est ne dégage pas cet élément unique à Miyazaki qui nous faisait glisser sans prévenir dans les recoins de notre enfance.
Tout ce qui est cher à l'auteur est singé, mais mal, et surtout jamais mené jusqu'au bout, finissant par nous contrarier plutôt que nous émerveiller, ce qui est évidemment à l'opposé des attentes d'un spectateur qui consomme un produit du studio.

Bref, Arrietty n'est pas un mauvais anime, mais simplement un Ghibli mineur, tout comme l'était Le royaume des chats ou Les Contes de Terremer. Les possibilités sont toutes loupées, que ça soit la tension vis-à-vis de la bonne qui veut capturer les chapardeurs, bien trop molle, tout comme la notion d'amour impossible entre les deux protagonistes, qui en leurs âges auraient pu nous servir quelque chose de platonique, formidable, et poignant, mais hélas totalement éludé pour ne laisser place qu'à un vague jeu du chat et de la souris. La bande-son quant à elle est incroyablement cul-cul, mais par une alchimie étonnante, elle se marie à la perfection avec l'esprit attendrissant de ces petits êtres, et c'est finalement à elle que l'on devra les quelques moments d'émotions portés par l'oeuvre, et l'on ne pourra pas s'empêcher de l'écouter après avoir vu le film, même si pour cela on devra le faire en cachette.
On notera d'ailleurs une certaine recherche dans l'ambiance sonore, tout du moins au début, visant à amplifier les sons pour tenter de nous immerger dans l'univers des chapardeurs, mais qui sera malheureusement oubliée très rapidement, renforçant ce sentiment d'oeuvre inaboutie qui ne va pas jusqu'au bout de ce qu'elle pouvait promettre durant sa première demi-heure. Autre chose regrettable, l'oeuvre n'offre pas ces strates uniques à Miyazaki, qui étaient capable de nous présenter quelque chose d'enfantin dans sa forme, mais révélant le plus souvent des facettes extrêmement sombres dans son fond. Il est le seul à maîtriser ce type de narration qui permet de toucher deux publics, et même mieux, évoluer dans notre perception au fur et à mesure que l'on revoit la même oeuvre en prenant de l'âge, et Arrietty en est la preuve.
Yonebayashi Hiromasa, le réalisateur, essaie de copier le maître, et tentera de nous placer une vaine critique envers l'Homme, paraissant forcée et semblant avoir été improvisée au dernier moment, comme si pour lui l'oeuvre de Miyazaki ne se résumait qu'à cela.
Pour conclure, Arrietty: Le petit monde des chapardeurs plaira aux enfants par son côté amusant, bien qu'ils risquent de s'ennuyer par moment, mais laissera dubitatif les adultes qui espéraient quelque chose de plus développé et plus émouvant.
Mention spéciale pour la bande-originale composée par Cécile Corbel, qui bien qu'elle puisse sonner de prime abord comme quelque chose que l'on penserait réservé aux adolescentes de 14 ans, colle parfaitement à l'esthétique et à l'univers des chapardeurs, et réussira à maintenir l'oeuvre à un niveau bien plus haut qu'elle ne l'aurait été sans.
SlashersHouse
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le 23 juin 2011

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