mars 2011:


Je n'ai jamais vu de film de Darren Aronofsky. A lire les notes du film, il semblerait qu'on aime ou on n'aime pas. Cygne tout blanc ou cygne tout noir. Aussi m'attendais-je à rien de bien précis, craignant le pire et espérant le meilleur. Ma déception n'en fut que plus légère. J'ai lu ou entendu que le film était "rococo", une caractéristique que j'abhorre presque toujours. Me faudra du temps pour trouver un film rococo qui m'a plu.

Néanmoins, Nathalie Portman est un argument difficile à balayer d'un revers de la main. Cette actrice a un visage fascinant. Je ne peux pas dire que son physique me plaise, trop fine, presque trop garçonne parfois, qui plus est dans ce film où elle s'est taillé un corps comme un cure-dents, encagée dans un squelette saillant et une musculature quasi virile, un look de danseuse anorexique, cependant je trouve qu'il émane de son visage un charme discret mais tellement puissant que je finis toujours par m'avouer qu'elle est magnifiquement belle.
A bien y réfléchir, je me dis que c'est son talent de comédienne, son jeu très précis, cette extraordinaire sureté qui m'attire. Elle joue tellement bien que je la trouve superbe.
Avec Charlotte Gainsbourg et Kate Winslet, je crois qu'elle fait partie des actrices de notre époque qui m'impressionnent le plus, une valeur sûre qui ne peut que rendre une affiche attrayante. Voilà la raison pour laquelle j'ai vu ce film, en plus de la curiosité de découvrir le cinéaste.

En tout cas, ce n'est certainement pas mon peu de culture et d'appétence pour la danse. Jusqu'à maintenant, je n'ai jamais été bouleversé par cet art.
J'ai une amie danseuse qui raconte de façon très émouvante et totalement mystérieuse son rapport à la danse, physique, sensuel mais également presque spirituel ou philosophique. Sans les lunettes nécessaires, je reste malheureusement aveugle à ces subtilités. A mon grand dam, sincèrement.

Et sur ce Black swan, en dépit de chorégraphies très bien filmées (l'introduction construite sur un joli numéro d'ombres et lumières) je suis encore une fois resté à quai. J'imagine que les gens qui ont aimé le film ont su apprécié cette mise en bouche.

J'en suis resté donc à la thèse première : ce personnage sujet à des délires visuels et autres hallucinations au fur et à mesure qu'il s'ouvre à l'âge adulte, que le cygne blanc accepte le côté obscur de la farce ("Nina, je suis ta mère!" : dit Barbara Hershey que je n'ai pas reconnue, la pauvre s'est horriblement trafiqué le visage, façon travelo public).

Alors est-ce qu'Aronofsky a vraiment voulu filmer les difficultés que tout un chacun connait lors de ce passage, l'acceptation de ce nouveau grand corps, avec ses désirs compliqués qu'il nous oblige à assumer, cette terrible tentation de le détruire, de lui faire du mal, etc.? Je ne sais pas. J'en fait peut-être une lecture psy tordue. Mais c'est l'impression que cela me fait.

Aborder cela en exagérant les sentiments comme les interprétations inconscientes du personnage permet à Aronofsky de présenter un film spectaculaire, à la dramaturgie un brin grandiloquente, grâce notamment à des personnages très caractérisés, sans doute trop. A ce moment là, on peut sans tomber dans l'excès évoquer les stéréotypes trimballés par chaque personnage. Cela peut engendrer une certaine lassitude à la longue, voire une légère irritation. En ce qui me concerne, je reste mitigé. Je veux bien accepter cette proposition, certes outrancière, d'une réalité plus subtile et complexe mais ce qui me gêne c'est finalement que cela débouche sur rien d'autre qu'une apothéose (dans tous les sens du terme, même l'antique) avec cette sur-dramatisation dans le dénouement, peut-être d'une jolie logique sur le papier mais d'un trop grand poids à l'image.

Et donc je reste sur ma faim. Non seulement l'histoire ne m'apporte pas le divertissement que j'espérais, mais en plus, je ne crois pas qu'elle raconte quelque chose de neuf, ni de vraiment percutant, encore moins pertinent.
La foutue question "et alors" m'a salement encombré la tête à la fin du visionnage. Pas bon signe. Voilà ce n'était pas un film pour moi.
J'ai au moins pu apprécier le travail de Nathalie Portman et me dire que je n'étais pas non plus rétif à cette mise en scène. Je m'en contenterai.
Alligator
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le 17 avr. 2013

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Alligator

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