Le cyberpunk-asiatique, c'est possible !
Toujours cité comme étant un "classique" de SF, je m'attèle donc au visionnage du film de Ridley Scott. Datant des années 80, soit la période la plus kitsh du cinéma, une question se pose : Blade runner échappe-t-il à la règle ?
Le fléau des films de SF est souvent le même : une idée de départ novatrice, suivi d'un chaos scénaristique. Blade runner contourne cette règle de manière forte admirable. L'histoire se situe dans le Los Angeles de l’année 2019, cité multiculturelle formant une ambiance cyberpunk-asiatique (oui, c'est possible !). En résumant grossièrement, Blade runner met en scène une chasse aux réplicants, sorte de copies robotiques au combien proche de l'être humain, par un "Blade runner", sorte de superflic chargé d’éliminer ces derniers. A partir de ce scénario somme toute assez classique, une histoire complexe et originale va naitre. En effet, le film ne se contente pas de raconter une banale chasse à l’homme. Loin de là, il va, au travers de l’étude des réplicants, émettre une philosophie propre concernant la nature de l’homme, les relations au sein de la société, l’évolution technologique … On pourra tout de même trouver dommage que Scott se contente d’effleurer un sujet à la fois complexe et passionnant. Là où Matrix posait la problématique de la réalité virtuelle, là où Bienvenu à Gattaca traitait avec brio du sujet au combien d’actualité de l’être génétique, Blade runner n’exploite le thème de « l’Homme-machine » qu’en surface. Dommage, il y avait pourtant du potentiel …
Concernant le casting, c’est de ce côté une bonne pioche. Harrison Ford est convainquant dans son rôle, même si on pourra regretter un manque d’une certaine profondeur de personnage (ou bien est-ce volontaire de la part du réalisateur, afin de justifier le twist final ?). Une chose est certaine, Rutger Hauer, leader des réplicants survivants, effectue une prestation magistrale. Capable de passer par toutes les émotions en un unique plan, tout en respectant fidèlement les émotions propres aux réplicants, être normalement dénué d’émotions humaines, du moins partiellement, c’est fort !
La bande originale, loin d’être marquante, colle cependant parfaitement à l’ambiance lourde et pesante qui règne sur Los Angeles.
Et l’ambiance de Blade Runner, parlons en … ! C’est indéniablement le point fort de l’œuvre. Tout est parfait, on s’y croirait. Mis à part les défauts techniques propres à l’époque (1980’s), rien n’est à modifier. Scott mélange avec grande habilité le style cyberpunk des films post-apocalyptiques et celui d’un Chinatown futuriste mais tellement proche. L’ambiance y est lourde, malsaine, sombre … La seule source de lumière qui illumine la cité, plongée dans une nuit pluvieuse perpétuelle, sont des néons et spots lumineux de publicité à la gloire de Coca-Cola et autres multinationales. Ce savant mélange procure au film une ambiance particulière et unique.
Il aura donc manqué une chose à Blade runner pour entrer dans les classiques de SF, ce qui fait la force de la plupart des grands films, ce qui différentie un bon film d’un excellent film : une thématique exploitée d’une manière suffisamment complexe, faisant parler de lui des dizaines d’années après sa sortie … Quoiqu’il en soit, Blade runner reste un bon film, que tout fan de SF se doit de voir au moins une fois.