Violence, vengeance, virilité et virtuosité

Voilà un film comme on a rarement la chance d'en voir, maîtrisé visuellement et scénaristiquement, et qui m'a littéralement scotché sur mon fauteuil.
Venant de Belgique (Flandres), cette terrible histoire de trafic de testostérone, hormones et autres vitamines est bien plus qu'un polar glacial, c'est une descente aux enfers aux accents de tragédie grecque. Jackie, éleveur musculeux et taiseux, se trouve au centre d'un gros marché de produits interdits destinés à engraisser plus rapidement les boeufs de la région. Un policier, enquêtant sur ce trafic, est froidement abattu par cette mafia locale, amenant la police à s'intéresser aux allers et venues de notre héros et des personnes en contact avec lui. Cette soudaine agitation fera resurgir de vieux fantômes dans la tête de Jackie, victime dans l'enfance d'un drame terrible.
A partir de cette trame, Michaël R. Roskam déroule son film avec une virtuosité implacable, attrapant le spectateur par l'émotion et ne le lâchant plus jusqu'au dénouement, deux heures après! On s'enfonce dans cette campagne flamande par vraiment folichonne, peuplée d'êtres cassés, torturés, au passé lourd et au présent sans horizon. On assiste à d'opaques rencontres de mafieux, où le danger est palpable dans chaque plan. Nous pénétrons dans l'intimité de Jackie, s'injectant dans le corps les mêmes produits dont il bourre ses boeufs, devenant ainsi un quasi monstre à la violence sous-jacente et psychologiquement dévasté. L'histoire avance inexorablement, toujours plus noire, toujours plus oppressante, sans que l'on puisse jamais imaginer la direction qu'elle va prendre, la complexité des personnages ne le permettant jamais.
Car en plus d'une mise en scène particulièrement virtuose, jouant avec finesse des gros plans et du rythme de chaque séquence, le scénario remarquablement bien fichu, ne laisse de côté aucun personnage.
Matthias Schoenaerts, dans le rôle de Jackie, est tout simplement sidérant de présence, de violence contenue et de fragilité. Il porte le film sur ses larges épaules, entouré de comédiens épatants, inconnus dans nos contrées, mais renforçant ainsi le récit d'une véracité supplémentaire.
la fin sur le blog
http://sansconnivence.blogspot.com/2012/02/bullhead-de-michael-r-roskam.html
pilyen
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le 21 févr. 2012

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