Mé liamo Butch e yo braquos dé bancas

Années 70, on m’annonce un mix de biopic, film policier et western : je me pourlèche alors les babines, à moi les duels énervés, les attaques de banque brutales et les duels de testostérone en plein soleil. Redford et Newman en tête d’affiche, c’est avec confiance que j’insère la galette dans le lecteur tout en me servant un petit cidre frais bien décidé à en découdre.


Mais il y a tromperie sur la marchandise, et bien vite il faut se rendre à l’évidence. Entre les trois échanges de bastos qui mettent en danger les célèbres blondinets, ça roucoule, ça rigole, ça pinaille, entre blagues vaseuses, petits clins d’œil de beaux gosses et apprentissage d’espagnol en mode « Bryan iz in ze kitchen ». Alors les minutes s’égrainent sans que rien ne se passe, les deux virtuoses du vol à main armée n’en peuvent plus de se carapater, heureusement ils sont servis par des acteurs qui n’ont pas leur pareil pour rendre passionnant le vide, d’autant plus qu’ils sont tout deux sublimés par une photographie qui en impose, alors on se raccroche aux branches.


Et les vingt dernières minutes récompensent quelque peu l’attente, seventies en diable, poisseuses et radicales. Mais c’est trop tard, le mal est fait, à aucun moment Butch et son collègue, tout droit échappés des plages californiennes, n’ont réussi à réellement emmener, dans les terres que j’espérais, cette petite comédie romantique pantouflarde qui fait la part belle à l’amitié pure et dure, celle qui se rit de la mort.


Alors oui, c’est mignon, c’est surement touchant, mais à la vue du matos qu’il y avait sur la table, on pouvait s’attendre à un film autrement plus corsé. En l’état, s’il est très réussi d’un point de vue formel, niveau mise en scène, il est autrement plus discutable. Quid des ralentis langoureux qui empruntent le seul tic de mise en scène qu’il ne fallait pas emprunter à la horde sauvage, de la bande son en mode Looney Toons et surtout du triangle amoureux pompeux dont le seul intérêt potentiel n’est jamais exploité. Katharine Ross n’est qu’un faire valoir aux deux esthètes qu’elle couve de son amour maternel, sans réelle consistance, sans réelle intention... le crayon à son origine manquait de mine. Comme si George Roy Hill s’était dit que ce serait sympa de réunir Rob et Paul, sans apporter autre chose à l’écran qu’une amitié sans concession bâtie autour d’un intérêt commun : le braquage comique (faut les voir plaisanter avec un employé qu’ils s’apprêtent à faire exploser).


Considérant la bonne réputation du film, je concède que j’ai certainement commencé la séance avec en tête une envie bien précise. Du western seventies craspec, sanguinolent et énervé. En tout et pour tout, 20 minutes remplissent ces critères, l’heure et demie restante est davantage orientée cœur tendre, ce qui n’est décidément pas pour moi, affadir la violence d’un sujet potentiellement radical, par des sourires en coin peu inspirés et une romance qui piétine, c’est un paradoxe qui, certes, se défend mais auquel je ne parviens pas à adhérer.

oso
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le 15 avr. 2016

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