Cargo
5.4
Cargo

Film de Ivan Engler et Ralph Etter (2009)

Je ne comprends pas pourquoi ce film est si mal noté sur Netflix et ailleurs.


J'ai hésité à le voir : aillant tendance à faire confiance aux notes attribuées sur Netflix, j'ai toutefois essayé de voir si il n'y avait pas une mauvaise note sur un film que j'aimais, pour me convaincre que le système de notation ne valait pas tout. Une fois fait, j'ai fini par me décider à voir Cargo, en me disant qu'il y avait une chance pour qu'il n'ait été apprécié à sa juste valeur.


Et c'est exactement ça. Pendant les deux tiers du visionnage de Cargo, je n'ai pas arrêté de penser à des trucs, à des histoires, à des scénarios qui trottent dans ma tête. Et pour être franc, il n'y a que trois possibilités : ou bien le film est à chier et je m'emmerde, ou bien le film est bien et je suis captivé, ou alors le film est moyen mais la réalisation est tellement originale et le contenu si inspirant que je déborde un peu trop dans mon imaginaire et fini par louper le train en marche.


C'est cette dernière chose qui s'est passée : mais malgré mon retard, j'ai pu reprendre l'histoire en cours. Car elle est suffisamment claire pour permettre les divagations. Je dois dire qu'une chose prime par dessus tout : les cadrages sont magnifiques, et dignes des films "Aliens" ou de ces films à l'ambiance sérieusement maîtrisée (je pense aussi à certains passages de la série Stranger Things, dans le complexe souterrain).


Le cadrage donc, mais les couleurs aussi, très immersives : la chaleur des corps pâles sur le fond froid du décors, le vert glauque du liquide cryogénisant, les couloirs étriqués, les lampes torches qui balayent l'air vicié et poussiéreux. La présence d'une chose inquiétante, et la maîtrise du hors-champ. J'apprécie ce dernier point, moi qui ai tant été transporté par Shinning ou Solaris. Que ce soit les communications entre la protagoniste et sa famille, ou les cachoteries entre membres de l'équipage, rien ne tombe dans la redite de ce qu'on a pu voir dans tous les autres films du genre.


Bien que sentant la petite production, les créateurs ont eu le bon goût de contrôler leur scénario pour ne pas trop tomber dans les clichés et mener à bien une histoire à l'arrière-goût Tarkosvkien. Et au vernis rappelant Avalon aussi. Hormis un ou deux petits mouvements de caméras un peu surdosés dans le premier moment de suspense, le contrôle reprend le dessus. N'ayez crainte : vous n'aurez pas, comme parfois, cette impression d'un film amateur tourné avec une mauvaise caméra et des plans navrants montés en une mayonnaise vômitive. Cargo est maîtrisé, même dans sa jeunesse. Petit, parfois cheap, mais aux accents de grandeur et à l'optimisation des moyens qui forcent le respect. Car on sent bien que le film manque de moyen : pourtant on n'est pas déçu et on est même bouleversé.


Car le film est bluffant par son contrôle dans la retenue des dialogues, et par l'usage du silence pour décupler la portée des scènes. J'ai réellement été transporté, comme j'ai pu l'être par les films de Kubrick, et plus tard par STALKER de Tarkosvky où le cerveau prend le dessus sur les yeux, et où l'idée de ce qui forme l'essence de l'humanité transpire par l'image. Non seulement le film allie les plans stylisés d'un Alien avec la portée d'une oeuvre SF aux accents de grandeur russe, mais en plus il se permet une innovation qui m'a fait chialer lorsque, sortant de mes pérégrinations mentales, j'ai croisé le chemin d'une astronaute adolescente projetée dans une réalité virtuelle et transportée par la beauté des arbres qu'elle ne toucherait plus jamais.


En somme la qualité allemande se sent dans les dialogues et la caméra. L'histoire un peu lente à se mettre en place, avec des personnages revêches, révèle peu à peu l'amour simple entre deux êtres, et se permet un final époustouflant digne d'un chef-d'oeuvre à la portée Tolstoïenne. Malgré qu'il ne soit pas un très grand film, Cargo a quand même le mérite de tirer très près du but. Il manque juste un peu de temps, de profondeur et de génie pour marquer durablement les esprits.


Tout amateur de SF se doit de posséder ce film dans sa collection, pour enrichir sa bâtisse. Admiration immense pour ce film à petit budget qui joue dans la cours des grands, et sincères encouragement pour le réalisateur à continuer dans sa voie.

Héraès
7
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le 25 sept. 2016

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