C'est la rentrée des ­classes. Au lycée Gustave-Flaubert, le directeur de cet établissement pilote a décidé que tous les élèves porteraient le même uniforme au nom de l'équité démocratique. Professeur de français désabusé qui a passé tout l'été à lire Schopenhauer, Germain replonge sans conviction dans sa classe et donne un sujet de rédaction qu'il pense facile : raconter son week-end. Les pires ­banalités vont se succéder jusqu'à ce qu'il lise le texte d'un certain Claude Garcia (Ernst Umhauer) qui raconte s'être immiscé dans la maison de son copain Rapha.

Pour qu'un film soit bon, comme un livre d'ailleurs, encore faut-il que le thème, l'enjeu soit susceptible de convaincre. Or, François Ozon, en charge d'y parvenir, s'empresse d'oublier le conseil que le professeur, interprété par Fabrice Lucchini, prodigue à son élève chez qui il devine un goût certain pour l'écriture et le récit- " faites en sorte de capter l'attention par un sujet fort, une action brillante, des propos accrocheurs " - alors même que son opus, sensé défendre cette cause, sombre très vite dans le bavardage stérile et la banalité la plus triviale. Ainsi Ozon a-t-il raté son but malgré la bonne volonté d'acteurs talentueux, tous prêts à l'y conduire. L'idée était bonne, excellente même puisque axée sur la transmission du savoir et l'éveil d'une vocation, encore fallait-il un scénario suffisamment crédible et rigoureux pour la développer avec subtilité et conviction. C'est raté.


La raison en est que le sujet se dilue dans un amateurisme regrettable au point que Ozon ne nous sert là qu'un film bâclé et maladroit. En assurant, bien en vain, que la réalité sert l'imaginaire ou vice versa, il nous démontre le contraire tant son imaginaire à lui tourne trop vite court. Il y avait pourtant à dire.

L'histoire de ce lycéen doué, remarqué par son professeur de français avec lequel s'établit un lien d'intérêt et de sympathie est si peu probante que l'on décroche dès les premières scènes. Tout d'abord parce que la famille qui inspire l'adolescent n'a rien d'inspirante : comment trouver sur l'échelle sociale un couple et son fils unique dénués à ce point de saveur culturelle et humaine ? Il fallait pour que l'on adhère au sujet choisir une famille en mesure de subjuguer l'écrivain en herbe et justifier l'histoire qu'il se plaît à raconter jour après jour à son professeur au point de tenir celui-ci en haleine. Malheureusement il ne se passe rien, rien qui justifie la faute professionnelle que le maître va être amené à commettre sous l'effet de cette supposée fascination. Oui, cela est totalement illogique.


A l'exception de quelques réparties drôles et quelques moments bien venus, la spectatrice que je suis est restée étrangère à cette démonstration dont le final est accablant. Dommage, les ingrédients étaient là qui pouvaient constituer un bon scénario entre des mains plus expertes et chez un cinéaste mieux inspiré. Malgré des acteurs qui ne déméritent pas - surtout le jeune Ernst Umhauer - car l'excellent Lucchini semble s'être mis en retrait de son rôle, Dans la maison n'incite guère à s'y attarder. On est plutôt tenté de rester sur le seuil tellement rien de captivant ne s'y passe, aucune démonstration ou action exaltante nous y retient. Le seul exploit de François Ozon est de parvenir à nous offrir un mauvais film avec de bons acteurs, ce qui était déjà le cas avec 8 femmes. Mais étant donné que ce cinéaste a la chance d'être "tendance" et a su mieux faire auparavant, il ne manquera probablement pas de laudateurs.
abarguillet
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le 13 oct. 2012

Modifiée

le 3 oct. 2014

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abarguillet

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