Prends la DeLorean, on se casse en 1993.

Detention est décrit comme un "film d'horreur comique" - ce qui lui porte totalement préjudice. Il faut dès le départ admettre que le sous-genre sanglant / rigolo est assez difficile à vendre, puisqu'il tape dans deux publics assez différents, et pâtit de la popularité de la saga Scary Movie. Les films des frères Wayans ont volé à l'horreur comique les quelques rares lettres de noblesse que des œuvres telles que Evil Dead II lui avait apporté.

Au final, Detention est davantage une comédie avec quelques touches d'horreur minimes (peut-être quatre ou cinq minutes en tout). Et c'est surtout un BON film.

L'histoire est celle de Riley Jones, une lycéenne un peu loseuse avec une jambe cassée. Autour d'elle gravitent plusieurs personnages assez clichés (la meilleure copine blonde co-conne, le branleur hipster, l'asiat' intello, le pote lourdingue ...) et une sombre histoire de tueur en série échappé d'un film d'horreur. Si tout ça sonne familier, c'est normal - et volontaire.

Parce que le film de Joseph Kahn - réalisateur de clips ultra convoité - se veut davantage comme un hommage aux années 80 et 90. Sans jamais se prendre au sérieux et sans jamais perdre de vue son but principal - divertir - il enchaîne les clins d’œil avec brio et style. Alors évidemment, quiconque n'a pas la moindre idée de qui sont Steven Seagal, Michael Keaton (pre-Birdman et Spotlight) ou C&C Music Factory se retrouvera sûrement un peu perdu. Pour les autres, c'est un plaisir constant d'entendre citer des noms qui n'ont plus été prononcés depuis plus de quinze ans.

On retrouve une sorte d'insouciance assumée et une énergie extrêmement communicative tout au long du film, que ce soit chez les acteurs - Shanley Caswell et son sens du timing comique, Josh Hutcherson et son charme très vintage, Spencer Locke et ses expressions faciales - ou chez le réalisateur, qui sature son film des références qui ont du bercer sa jeunesse. Mettez Clueless, The Breakfast Club et Retour vers le futur dans un mixer, saupoudrez de Scream, avec quelques touches de Dirty Dancing, d'E.T. et de La Mouche, et appuyez sur START : c'est le concentré de Detention.

L'histoire en elle-même ne cherche ni à être réaliste, ni à faire sens : tout est hors norme, totalement déjanté sans connexion ou presque. Mais c'est un hommage vibrant et totalement jouissif à un autre temps du cinéma. Le spectateur fait partie intégrante du film, puisque le fameux "quatrième mur" est souvent brisé (la scène d'intro consiste en un personnage qui parle directement au spectateur) et de nombreux inserts textes apparaissent à l'écran pour donner des informations supplémentaires ou ajouter une touche humoristique.

Avant tout, il faut reconnaître à Joseph Kahn un vrai sens stylistique. Rien que les crédits du film sont visuellement stupéfiants et extrêmement créatifs. Si les procédés que le réalisateur emploie peuvent paraître plus appropriés aux formats des clips vidéos ou des publicités, il est étonnant de voir qu'ici, ils s'adaptent parfaitement au ton du film et participent même à sa réussite.

Il convient aussi absolument de mentionner que le film comporte une scène de danse sur Mmm Bop des Hanson. Oui, oui, j'ai bien dit SCÈNE DE DANSE. SUR LES HANSON. Ça fait totalement exploser son quotient de coolitude déjà extrêmement haut.

Au final, Detention est un petit bijou à la fois vintage et post-moderne (dans l'aspect parodique, ses références & son recyclage d'idées constant) qui plaira aux nostalgiques et aux allumés bien plus qu'au grand public (je suis les deux, ça tombe bien). Il ne révolutionnera pas le cinéma moderne, il est à prendre au 3e degré constamment, mais c'est typiquement le genre de film qu'on imaginerait devenir culte dans 10 ans. Concrètement, regarder Detention, c'est regarder un film de 1985 qui aurait été projeté dans la DeLorean de Marty McFly, atterrirait en 2014 dans une soirée dédiée aux années 90 et qu'on forcerait à prendre des amphétamines. Si vous n'y voyez rien de fun, passez votre chemin. Si en revanche, ça ressemble à une expérience que vous aimeriez tenter, allez-y les yeux fermés, vous prendrez votre pied.