Délicat de noter cet exercice commercial qu'est la réécriture de non pas un, mais deux classiques de l'horreur portés par un Sam Raimi dont on connait maintenant l'approche stylistique sur le bout des doigts.
Les deux premiers Evil Dead sont déjà des films très différents l'un de l'autre, mais fondent leur réussite notamment sur leur gratuité : une donnée difficilement reproductible dans le cinéma commercial contemporain où il faut du set-up, un pay-off narratif final et surtout, du sens. Du coup, Fede Alvarez au scénario a rempli son cahier des charges du divertissement contemporain et répond à toutes ces exigences, balayant la gratuité qui faisait le fun des films originaux au service d'un drame humain (!) qui divise un frère et une soeur. Le film en pâtit sévèrement, ne serait-ce que rythmiquement. Ca met du temps à se lancer, et les personnages sont plutôt moroses. Mais le véritable problème, c'est que du chaos originel des interventions de l'entité maléfique, il ne ressort aujourd'hui que de l'ordre. Méthodiquement, tout ce qui arrive est préalablement écrit dans le Necronomicon (que l'on appelle jamais par son nom, même en off durant le générique), comme sorti d'une quelconque prophétie. Le montage plat en rajoute en plus une couche en accompagnant chaque événement gore d'une illustration issue du livre d'Abdul Al-Hazred : "Tout se déroule selon le plan !" qu'on vous dit...
L'autre gros point noir réside dans le sound design du film. Dans l'ensemble c'est plutôt correct, mais sans génie, à l'exception d'une catastrophique tendance à balancer des jingles sonores en "Scream-o-vision" à chaque fin de séquence alors qu'il est évident que le film cherche à être pris au sérieux. Cette orientation très 1er degré donne tout de même quelques belles choses, surtout dans le pay-off final, et notamment car l'actrice qui tient le rôle clef du film se débrouille à merveille dans ses multiples rôles. Parfaitement reloue, flippante et bad-ass quand il le faut, elle assure d'autant que le maquillage est juste parfait. Les effets-spéciaux ne sont pas en reste non plus, avec des effets live très convaincants qui font véritablement la différence avec le tout-numérique qui portait un poil préjudice à Drag me to Hell (pour ne citer que lui). Malheureusement, la réussite des effets visuels rappelle le manque de folie et de prise de risque dans la mise en scène. Chaque intervention des possédés apparaît ainsi très décevante car uniformisée à l'excès. Ceux-ci agissent tous de la même manière, à se demander si le Malin a véritablement envie de s'éveiller tant il manque de créativité dans ses assauts. Enfin, et c'est là probablement le symbole le plus évident de la nouvelle démarche narrative du film, la cabane n'est plus vivante. Elle ferme bien des portes de temps en temps, mais elle n'est plus le corps maléfique dans lequel les personnages sont en train de se faire digérer.
La filiation avec les films d'origines passe donc par le jeu. Un jeu de références certes, mais surtout d'anticipation lorsque le spectateur est mis face à des situations miroirs, ou des motifs auxquels il associe des règles constamment repensés pour le surprendre ou l'amuser. Impossible d'être pleinement satisfait en l'état, mais le plaisir n'est pas non plus absent. Un remake en demi-teinte.