En 2001, Rob Cohen est une valeur sure de la série B d’action-thriller – un faiseur davantage qu’un créateur, mais surtout un entertainer hors-pair. Alors quand Fast and Furious surprend son monde en raflant 200 millions au box-office mondial, c’est en soi l’aboutissement commercial d’un cinéaste de seconde zone qu’Hollywood persévère encore aujourd’hui à reléguer aux sympathiques arnaques pour spectateurs peu exigeants.


Qu’est-ce qui peut expliquer le succès d’un film comme celui-ci ? Car sans surprises, Fast and Furious n’a pas grand-chose de très original : un flic infiltré dans un gang de street racers qui braquent des camions. Deux trois modifications dans le script, et on est dans Point Break, dont Rob Cohen réalise un ersatz inavoué. Derrière son schéma simpliste et le handicape d’un montage bordélique se cache pourtant un produit d’une linéarité exemplaire. Calibré, Fast & Furious l’est, mais dans ce cadre rafraichissant sans aucune espèce de prétention, Rob Cohen surprend de simplicité : l’intrigue, les personnages, les enjeux, tout est vide et pourtant si bien dessiné. Pas d’arcs secondaires, des dialogues aussi creux qu’ils sont expéditifs : revoir le premier volet d’une des sagas les plus cultes de la décennie 2000, près de quinze ans après sa sortie, c’est replonger dans le mauvais goût libérateur de l’entre-deux-millénaires.
Fast & Furious est moche, ringard, réalisé avec les pieds, écrit par des beaufs en puissance pour des cas encore plus désespérés. Le film de Rob Cohen n’a pourtant jamais prétendu être autre chose qu’une VHS perdue entre un Stallone et un Norris, avec son budget anémique et ses scènes d’action torchées. C’est ce qui fait son charme, cette simplicité désuète, ce ridicule ton sérieux qui semble avoir disparu de nos écrans, laissant peu à peu la place au cynisme et à l’autodérision, certes réjouissants, mais bien trop souvent hypocrites dans leur exploitation à outrance.


La série B n’a pas disparu, loin de là, mais c’est avec une pointe de nostalgie que l’on redécouvre Fast & Furious, sorte de produit purement 2000s, dans son esthétique, dans sa gentille sauvagerie et son hyper-sexualisation à outrance des rapports entre personnages. Oui, Fast & Furious est un film mongol, mais au travers de ce qui restera peut-être comme l’un des piliers de l’actionner moderne pré-Nolan, Rob Cohen signe le témoigne décomplexé du cinéma transitoire coincé entre la Guerre Froide et le 11 septembre : facile, idiot, et pourtant si reposant. Ou comment ériger la beauferie subversive auto-moto-minou au rang d’Art.

Vivienn
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le 18 avr. 2015

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