Fou et foutraque. Trash et dérangeant...
"God bless America" fait partie de ces films indés US (et fauchés) qui débarquent en salle sans prévenir et ce seulement grâce au soutien de quelques festivals courageux qui ont réussi à le sauver du triste sort destiné à pas mal de prods du genre ; un direct-to-dvd souvent synonyme de mise à mort injustifié d'un film à l'international. Car il en faut du courage (heureusement que certains en ont) pour distribuer et soutenir un film si barré ; c'est simple c'est sûrement le film le plus audacieux, le plus irrévérencieux et le plus trash qu'il est donné à voir cette année. Rien que ça.
Le ton est donné dès le début par une scène démente qui va voir notre "héros" démonter une famille entière dans un bain de sang mémorable. Pour des présentations c'est plutôt efficace. Car sa dépression et son dégoût de l'évolution de la société, il va les faire payer à ceux qui représentent les déviances du monde "moderne" ; pseudo vedettes de TV réalité trash, présentateurs véreux et populistes... Tout le monde y passe. A travers ce déluge de violence, le film fait passer une critique acerbe (et rarement vue) sur la société US actuelle, et donc sur notre monde en général. "L'évolution" technologique qui a fait migrer notre monde dans le 100% connecté et nous a fait oublié les vraies valeurs de respect d'autrui a mis à bout de nerf notre héros. Et comme la société est sourde à son analyse, il va se lier à une gamine de 15ans encore plus en colère (mais pour des raisons souvent gratuites) pour faire parler le colt (et la AK-47) pour marquer le coup... à la TV.
Et c'est bien là le paradoxe du discours du film ; nos 2 héros ne sont ni plus ni moins que le résultat de la société qui est critiquée. Et finalement ils représentent ce qu'elle engendre de pire. Du coup pas facile de dire qui est "gentil" et qui est "méchant", même si le film plonge souvent (par provocation sûrement) dans un manichéisme dérangeant ; dans leur refus de voir évoluer la société, nos Bonnie & Clyde modernes assènent un discours parfois très réac qui ne respecte aucun autre point de vue. C'est purement polémique (et le film joue de ça) mais on est quand même mal à l'aise avec cet esprit de pensée unique qui est proposée. Sur le net on appellerais ça un troll.
Le film se justifie (un peu) dans un long monologue face caméra et on appréciera le jusqu'au-boutisme de l'entreprise qui jamais ne mettra de l'eau dans son vin. Cela fait quand même du bien de voir un film (qui, au passage, est cinématographiquement très soigné) qui parle autrement et va à contre-courant de pas mal de discours convenu. Pour le fond on reste septique quant à sa capacité à être aussi mûr qu'il voudrait faire croire.