Blame it on Hollywood

Il y a des jours où j'irais bien m'immoler devant les studios hollywoodiens.
Faire un acte symbolique pour leur faire comprendre qu'ils transforment peu à peu l'industrie cinématographique en sac à merde. Je pensais qu'on avait appris quelque chose de la brillante adaptation du Seigneur des Anneaux ; mais visiblement non, certains semblent croire encore qu'un livre est mieux adapté quand on le transforme en scénario en se mouchant dedans. C'est bel et bien le cas des Hunger Games.

Un jour un réalisateur et une scénariste (qui est auteur d'un livre assez exceptionnel appelé The Hunger Games, oui oui, elle-même) se réunissent, et commencent à discuter des grandes lignes de l'adaptation du livre.

"Bon alors, on a un livre super sanglant avec plein de morts et des thèmes graves abordés, un livre qui fait réfléchir sur l'emprise du pouvoir, sur la gestion des inégalités, sur l'absence d'adolescence aussi, sur la mort, etc. Quel angle on va prendre pour filmer tout ça ?"

"Bah on a qu'à prendre l'angle le moins intéressant, on a qu'à insister sur l'histoire d'amour, parce que c'est bien ça qui fait pleurnicher les jeunes filles en fleur."

Le producteur, dans un coin, a ouvert sa grande gueule :
"Ouais, oubliez pas de couper toutes les scènes d'exécution aussi, de pas mettre trop de sang surtout parce que les filles mouillent mieux leur petite culotte quand elles ont moins de 18 ans. Hein, parce que si on se colle une étiquette -18 de la MPAA, on fera 2 millions d'entrées en moins et ça m'casse les couilles. Puis foutez une actrice avec du gras dans les fesses, on voudrait pas que les associations anti-anorexie nous tombent dessus. Et on a qu'à foutre des effets spéciaux pourris aussi, ça me coutera moins cher".

Dieu a créé le monde en sept jours, le film a été décidé en 7 minutes.
Et Gary Ross cru que tout cela était bon.

Les affiches sont apparues, mon oeil a twitché. Ca commençait à sentir le roussi, et pas le roussi classique, le roussi du film à gros budget. Le pire genre de roussi. Le roussi adapté au moins de 12 ans.

A l'avant-première, après avoir attendu 2h que les têtes d'affiche se dandinent sur le tapis rouge et viennent nous faire coucou niaisement dans la salle, le film débutait.
Apocalypse, enfer et damnation. La qualité des plans est mauvaise, la rythmique désarticulée, l'héroïne qui est censée crever la dalle fait 10 kilos de trop, l'acteur principal ressemble à un labrador piqué à la niaiserie, les effets spéciaux piquent les yeux, les incrustations sont mal faites, les costumes achetés à Taïwan.
Ils sont censés s'entretuer, et même un coup de poing dans la gueule est placé hors-champ, pour pas choquer l'audience adolescente (et leur papa-maman).

Et moi, dans la salle, serrant dans mes petits poings mon poster de Katniss offert pendant l'attente, j'avais le coeur brisé. Hollywood venait de vomir sur la littérature, venait de me prouver que l'espoir était perdu, que plus rien ne pouvait sauver le peu de sensibilité, d'esprit encore présents dans ce bas monde et couchés sur les pages d'un livre.
Et depuis ce jour, j'ai décidé d'arrêter. Arrêter de croire qu'il existe encore des gens qui tiennent aux choses vraies, et pas à celles enrobées de marketing et de bullshit mielleux qu'on injecte à grands coups de regards langoureux dans un décor post-apocalyptique aux générations futures.

Sur ce, je m'en retourne utiliser mon imagination dans des livres qui ne risquent pas d'être adaptés au cinéma pour cause de manque de matière commerciale.