Qu'est-ce que ce film? Difficile de trouver un genre, un courant, auquel le rattacher... En tout cas, impossible d'évoquer La nuit du chasseur sans évoquer ce personnage culte incarné par Mitchum, le pasteur Powell, inspiré d'un véritable tueur en série. Personnage à la fois mystérieux, burlesque, terrifiant, mystique, sombre, manipulateur et charismatique ; ses deux poings sont devenus légendaires au fil du temps.
Qui est-il vraiment? Un simple imposteur psychopathe ou avide d'argent? Psychopathe sans doute, mais nul doute pour moi que cet homme d'église en est vraiment un, et croit dur comme fer que ses actions sont guidées par le tout-puissant. Preuve en est qu'il refuse dans son lit la belle Shelley Winters, qui lui semble totalement dévouée.
Mais Harry powell le révérend tueurs de veuves, c'est aussi l'homme au chapeau, l'homme au cheval, l'homme qui chante et l'homme aux poings mythiques... Autant d'éléments qui font de lui un personnage hors-norme parmi les tueurs du cinéma américain. Si il sait se montrer effrayant notamment grâce à une mise en scène de Laughton qui porte la manipulation des ombres propres, ombres portées et contre-jour à son plus haut niveau, il apparaît à d'autres moments comme un être burlesque (quand il raconte l'histoire de ses poings) voire cocasse (quand il tente de faire parler le père de John dans son sommeil) mais surtout déterminé, à tel point que le film prend des allures de road-movie dans la seconde partie.
Pour s'opposer à lui, seulement un jeune garçon solide comme un roc, qui cherche avant tout à protéger sa petite soeur. On voit la difficulté de se faire comprendre lorsque l'on est bambin, on subit perpétuellement la loi des adultes. Qu'est-ce donc que cette mère qui se remarie quelques semaines après être devenue veuve, avec le premier venu? Ce n'est pas temps l'argent de son père que John cherche à cacher mais plutôt ses faiblesses et ses doutes, qui sauront retrouver leur place logique chez Mme Cooper (Rappellons que le film prend place pendant la grande dépression et voir alors des enfants errants sur les sentiers n'était pas chose rare)
Mention spéciale à la scène qui dévoile le cadavre de Mme Harper, dont les cheveux se mêlent aux algues au fond du lac où se trouve la voiture à laquelle Powell l'a attachée, sur une chanson de ce dernier, qui confère à ce passage une dimension esthétique d'une grande beauté.
A défaut d'un scénario solide, le film compense par son aspect visuel novateur, enchaînant les jeux de lumière, surtout la nuit lorsque le pasteur commet ses méfaits, mais le personnage excptionnel de Robert Mitchum efface quelques peu les autres, qui ne manquent pourtant pas d'intérêt.