La Petite Sirène
6.4
La Petite Sirène

Long-métrage d'animation de John Musker et Ron Clements (1989)

Aussi étrange que cela puisse parautre, bien que je sois née dans les années 90, que je regardais les Disney et tout et tout, rares sont finalement les films de la periode 90's que je possédais. À part les deux Disney de ces années que j'avais, tous les autres que je regardais étaient plus vieux. Je n'ai donc pas d'affinité particulière avec la recette 90's. Je le dis tout de suite, parce que trop nombreux sont les gens qui pensent que si on aime un Disney de notre génération, c'est parce qu'on est nostalgique. J'ai vu La Petite Sirène seulement il y a quelques années la première fois, d'accord ? Je suis assez claire ? Ok. Alors on peut continuer.


Pas de nostalgie, donc, et un regard directement adulte sur cette histoire. Clairement, ce n'est peut-être pas le meilleur, mais il a un petit charme qui le rend aussi bon que n'importe quel film des décennies passées (sauf Basil.) et largement meilleur que tous les autres de ces mêmes décennies. D'abord, premier constat : le rythme est enfin maîtrisé. Finies les scènes empilées sans fil conducteur. On se retrouve ici donc avec une vraie situation d'énonciation, qui permet de présenter un peu plus les personnages que précédemment, en développant leurs envies propres et les rouages. Ainsi, au début du film, on a une présentation (sommaire, certes. Ça reste un film pour enfants, mais c'est un peu ce qu'on demande à un Disney en même temps), d'un côté du prince, de l'autre d'Ariel et de son père et même d'Ursula. En comparaison des introductions faites à l'arrache des oeuves précédentes, celle ci est autrement plus agréable et surtout, donne plus le temps de s'attacher aux protagonistes et de comprendre les personnages avant que l'intrigue débute. Ensuite, la suite propose sur la même lancée une succession de scènes dont la maîtrise est indéniable, si bien que l'ennui n'a pas place. Ensuite, l'animation a fait un bond en avant par rapport aux précédents. Elle souffre encore de petits défauts et ajustements, mais on ne peut que lui reconnaître une qualité certaine, notamment à travers les mouvements ondulatoires des cheveux de Ariel, les effets de bulles et de courants, encore credibles de nos jours. Rien à voir avec les apparences brouillonnes (qui avaient leur charme, mais qui étaient trop semblables les unes aux autres, quand la décennie presente cherchera constamment le renouvellement) et les erreurs grossières des précédentes décennies. Le character-design n'est pas le plus réussi du studio, la synchronisation labiale est presque catastrophique, mais l'apparence visuelle reste tout de même bien agréable.
Enfin, le studio parvient enfin à proposer un contenu à la fois fidèle à ce qui fait son charme (c'est à dire les histoires avec happy-end, d'amour, et l'alternance constante entre humour et émotions) et modernisé (à travers l'absence de morale culpabilisatrice même si pour cela, il a fallu dénaturer complètement l'oeuvre originale). Et ça fait du bien.


Le scénario, donc, dénature totalement le propos initial, comme d'ailleurs à chaque fois, pour extraire des contes une version à la sauce Disney, c'est a dire permettant l'union entre la sirène et l'humain. Alors certes, c'est très fleur-bleu, très guimauve, mais on note quand même quelques améliorations, qui, aujourd'hui, ne sont plus si visibles (les studios ont fait bien mieux depuis) mais qui le sont si on compare à d'autres. Ici, même si l'amour est encore au premier regard, il y a tout de même une légère avancée, dans le sens ou les deux personnages apprennent tout de même à se connaître avant de se marier. Du côté du prince on constate d'ailleurs l'apparition des sentiments. Il n'y a plus de morale conservatrice, plus de "reste à ta place", mais bien une ouverture sur la possibilité d'aller chercher ailleurs, sur la possibilité de se defaire des injonctions traditionnelles pour vivre sa propre expérience. Il y a une certaine avancée même si reconnaissons-le, Ariel reste bien passive face aux évènements, ne change pas vraiment, et reste dans un caractère juvénile-adolescent naif... il reste donc une sacrée marge de manoeuvre...


Ariel, justement, parlons-en. L'heroine du film est une sirène adolescente, attachante malgré ses innombrables défauts (notamment l'égocentrisme et les caprices, ainsi qu'une extreme naïveté), qui souhaite se détacher du giron de son père, le roi Triton, monarque respecté mais peu compréhensif, qui déteste les humains (on ne saura d'ailleurs jamais pourquoi, ce qui est une lacune du scénario). Ce personnage de Triton est touchant, attachant, car ses doutes de père nous parlent. Il veut proteger sa fille et ne se rend pas compte qu'il ne participe pas à son bonheur. Ariel, elle, agit comme toute adolescente : en rebellion avec son père, elle tombe amoureuse d'un humain, dont elle sauve la vie et qui accapare ensuite toutes ses pensées. Une lecture très basique de l'adolescente, mais qui reste agreable, et qui change de la fille passive face à l'autorité. Cette gamine a un quelque chose qui fait qu'on la suit sans déplaisir. Le prince Eric, lui, est bien plus plat. Il est également, étrangement, encore plus naif et fleur-bleu que Ariel, ce qui le rend pathétique. Heureusement, il se rattrappe un peu vers la fin. Ursula est, elle, une méchante qui a une classe certaine. Notamment sa transformation finale en énorme pieuvre gigantesque, de quoi vibrer pour un combat final rempli d'une action encore une fois maîtrisée. Enfin, signalons des personnages secondaires plus humoristiques, mais tous utiles, tous plus enthousiasmants les uns que les autres, notamment Sebastien.


Enfin, La Petite Sirène voit apparaitre la construction du récit comme une comédie musicale, avec des chansons, nombreuses, parsemant le film. Ici, les chansons servent à quelque chose : outre les deux premières, faisant plus office d'introduction, "Partir là-bas" est la cristallisation de l'état d'esprit de la jeune fille, "Sous l'ocean" une argumentation bien plus rejouissante qu'un long dialogue, "Embrasse la", elle, permet de chanter l'état d'esprit d'un prince coincé entre ses sentiments naissants et ses rêves imbéciles, et la chanson d'Ursula, enfin, est là encore une argumentation inquiétante des desseins de la sorcière.


La Petite Sirène n'est pas le meilleur des Disney. Il a des défauts, beaucoup de defauts peut-être. Si je ne les ai pas évoqué ici, c'est aussi parce que je voulais mettre l'accent sur ce filmen tant que précurseur d'une formule magique enchanteresse, la formule Disney. Pour cela, j'ai passé un bon moment devant ce dessin animé.

Presci1508
7
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le 24 oct. 2016

Critique lue 159 fois

Presci1508

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