Un film à part me semble-t-il dans la filmographie de Lubitsch.

Par sa forme d'abord, le cinéaste se tourne là vers une comédie romantique fantasmagorique, plongeant les héros dans un monde totalement fabuleux (au sens littéraire du terme). Un peu comme dans Die puppe, Lubitsch s'amuse. Il plante des décors incroyables, une royauté montagnarde. Il se paye un château aux formes arrondies comme de belles bacchantes, celles du roi. Les personnages aux accoutrements en trompettes, retroussés, font des virgules.

Surtout le cadre est continuellement transformé, au gré des idées farfelues de la mise en scène. Lubitsch découpe, rigole, un large sourire farceur. Bing, le mot est laché : ce film est une grande farce!

L'opposition brigands et soldatesque, blanc et noir donne l'occasion une nouvelle fois à Lubitsch de briser les carcans sociaux. La fête pré-nuptiale, pleine de beuveries et de mouvements engloutie un instant les apparences. Les brigands s'invitent à la fête et Lubitsch jubile.

C'est foutraque, joyeux autant qu'improbable. Un film en forme de rêve, un drôle de rêve. Un rêve d'après biture.

Mais Lubitsch sait bien que le spectateur n'est pas un con et qu'il ne faut le leurrer pour l'amener là où il croit aller. La fin échappe au contrôle du spectateur. Et la morale habituelle est détournée. Lubitsch est un sacré farceur.

Ce qui m'empêche de pleinement souscrire au spectacle est sans doute dans le casting. Je suis loin d'être convaincu par les comédiens, à commencer par Paul Heidemann dont le physique médiocre limite un tant soit peu sa composition de play-boy. Comment dire? Sa dentition douteuse et son faciès monolithique rendent sa partition pour le moins fade. En regard de cela Pola Negri apparait comme la plus allumée de tous. Jouant un peu trop de la même gestuelle par moments, elle parvient cependant à maîtriser plus justement les variations émotionnelles de son personnage et ainsi à lui donner une densité intéressante. De plus j'avoue qu'elle est parvenue souvent à me faire sourire, dévoilant des talents de comique physique que j'étais loin de soupçonner.
Alligator
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le 21 févr. 2013

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