oct 2010:

La salle de l'Utopia de Montpellier était pleine à craquer. Dimanche grisâtre ou réel succès du dernier Bertrand Blier? A voir l'âge moyen du public de retraités, je me dis que le cinéaste a tapé juste quand il a choisi de faire un film sur le cancer. Bizarre, parce qu'a priori, on pourrait croire le contraire. Seulement, "Le bruit des glaçons" ne fait pas peur, n'est pas triste à s'en ouvrir les veines, il fait plutôt risette face à cette peur du crabe et même offre une vision plutôt rassurante, positive de la maladie et de comment s'y prendre pour lutter contre elle. C'est aussi là où le bât blesse à mon humble avis : la légèreté du propos, un poil simpliste également. Ou alors je n'ai pas bien compris où Blier voulait en venir.

Quoiqu'il en soit, je suis sorti tout sourire de la salle. Sans déborder d'un enthousiasme fanatique, je n'étais pas mécontent d'avoir vu ce film et puis le temps passant, le recul devenant de plus en plus large, l'impression de vide, de creux prend une plus grande part dans mon regard.

Certes, les comédiens sont très bons. La direction d'acteurs, ce style particulier que Blier impose à ses acteurs est plus qu'évidente. Il y a un ton "Blier", et de la troupe c'est sûrement Albert Dupontel qui parait le mieux chanter cet air-là. Anne Alvaro n'a pas un rôle "à dire" mais "à jouer". Elle le fait très bien. Les femmes sont toujours un peu moins bavardes chez ce cinéaste, non? Voire. En tout cas, elle assure en grande comédienne qu'elle est. Avec elle, Jean Dujardin, Audrey Dana et Myriam Boyer sont parmi ceux qui m'ont le plus impressionné finalement.

Donc ça joue bien mais je suis un peu déçu par les dialogues. Merde, on a connu Bertrand Blier plus vif, plus piquant, plus fin! C'était sa marque de fabrique, sa devanture de boutique. Certaines répliques sont mêmes plus qu'ordinaires, bel et bien mauvaises. "J'ai commencé à écrire et à boire, je ne sais plus dans quel ordre" ou quelque chose dans ce goût-là : voilà le type de sentence qui voudrait faire "joli" mais qui ne veut strictement rien dire, qui n'a pas de sens réel et me fait sortir du film illico.

Le sujet était bigrement excitant : un alcoolo fait face à son cancer personnifié. Très futé, très "Blier" pour le coup, le sujet est bien amené mais patauge un peu en cours de route. J'ai craint le pire : l'emmerdement, le foutraque, le marécage abscons. Finalement, Blier ne se perd pas mais au 3/4 du film j'en ai eu bien peur. Le film perdait en rythme, des personnages secondaires encombraient un peu la trame.

J'adore Bertrand Blier, sa fougue, son impertinence, sa grossièreté, sa provocation, sa poésie du gras. Je préfère ses premières créations à celles de la période "Anouk Grinberg". De ses récentes productions, je n'ai vu et apprécié que "Combien tu m'aimes?". Ce "bruit des glaçons" me laisse un peu froid en fin de compte. Je regarderais bien "Notre histoire", qui m'attend sur une étagère depuis longtemps, pour renouer avec la touche "Blier".
Alligator
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le 14 avr. 2013

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