Edgar Wright (après le sommet Scott Pilgrim) conclut une "trilogie" débutée par les formidables Shaun of the Dead et Hot Fuzz, avec son film le plus sombre mais aussi le plus fou. Cela débute comme une comédie de potes nostalgiques et cela finit comme un épisode de Doctor Who tourné par une équipe ivre (avec l'une des meilleurs bande-originale « compilation » de l'histoire du cinéma pour lier le tout). A la fois similaire aux deux épisodes précédents dans son appropriation des codes d'un genre pour mieux les dynamiter, The World's End repose davantage sur ses antihéros.

Dans cet opus les auteurs versent dans le contre emploi, avec Nick Frost interprétant de manière tout à fait crédible le quadra responsable et Simon Pegg survolté en junky maniaco-dépressif. C'est moins un retour vers la jeunesse idéalisée qu'une acceptation du temps qui passe sans mettre de côté le plus important : être heureux, quelle que soit la forme que puisse prendre ce bonheur. Tout en dressant un nouveau portrait inimitable de la « génération X », celle des ados des années 90.

The World's End va encore plus loin, en appuyant bien fort là où ça fait mal, en particulier lorsque le film s'en prend à l'uniformisation du monde, où toute personnalité (des êtres, des lieux, des désirs) se trouve nivelée, voire gommée. Il faut donc clamer (et réclamer) haut et fort la liberté de l'homme, quand bien même cela passe par la destruction de la planète. The World's End est un pamphlet d'humanisme militant. Personne ne peut nous obliger à nous plier à sa volonté, ni la société, ni le progrès, ni les bonnes âmes, ni Dieu, ni maître. La vraie liberté de l'individu est d'avoir la totale emprise sur lui-même et ses décisions, bonnes ou mauvaises.

Au final chacun trouve sa parcelle de bonheur dans un monde bouleversé et surtout libéré de la dictature de la technologie et du conformisme. On pourrait croire l’œuvre anarchiste, elle est d'ailleurs joyeusement punk, mais le message est bien plus subtil que cela. La majorité des protagonistes trouveront leur apaisement dans l'accomplissement de rêves simples. Évidemment, seul contre tous, roi des parias, roi des humains, Gary King continuera à vivre comme un personnage de fiction, héros d'un univers enfin à sa mesure. The World's End est drôle et triste, joliment stupide, imparfait et fragile. A notre image.
Ed-Wood
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le 10 sept. 2013

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Ed-Wood

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